Coup d'État au Niger: interrogations sur l'avenir de la présence militaire française au Sahel

Après le Mali et le Burkina Faso, le Niger, devient le troisième pays du Sahel, région minée par les attaques de groupes liés à l'Etat islamique et à Al-Qaïda, à connaître un coup d'Etat depuis 2020. Le président élu Mohamed Bazoum est séquestré depuis mercredi dans sa résidence par des membres de la garde présidentielle, dont le chef, Abdourahamane Tiani, est le nouvel homme fort du pays.
Le général Tiani, proclamé chef de l'Etat par ses pairs, a justifié le coup d'Etat de mercredi par "la dégradation de la situation sécuritaire". S'il a qualifié d'"appréciable" le soutien des "partenaires extérieurs" du Niger, la France et les Etats-Unis font partie des principaux, il leur a demandé de "faire confiance (à ses) Forces de défense et de sécurité (FDS)".
Une situation néanmoins inquiétante pour la présence militaire française, dans une région où "la menace terroriste se répand", a souligné Caroline Roussy, directrice de recherche à l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS) et responsable du programme "Afrique/S", sur BFMTV.
1500 militaires au Niger
Situé en plein cœur du Sahel, le Niger est l'un des pays les plus pauvres au monde, vaste territoire désertique d'une population de quelque 20 millions d'habitants, avec une croissance démographique parmi les plus élevées de la planète. Niamey est le dernier allié avec lequel la France entretient un partenariat dit de "combat" contre les jihadistes, dans cette région minée par l'instabilité, la précarité et les attaques.
Car à l'été 2022, au Mali, sous la pression d'une junte malienne hostile, la France a quitté le pays où elle traquait les groupes armés depuis neuf ans pour installer le gros de ses forces au Niger voisin. Les forces spéciales françaises stationnées au Burkina Faso ont également dû en partir du l'an dernier. Le régime, issu d'un coup d'Etat en septembre 2022, a lui aussi exigé le retrait des militaires tricolores de son territoire.
Cette réorganisation, qui a signé la fin de l'opération Barkhane, s'est accompagnée d'une nette décrue des effectifs militaires français au Sahel, passés d'environ 4500 à 2500, dont 1500 au Niger et 1000 au Tchad.
Alors qu'auparavant le Niger servait essentiellement de base de transit pour les opérations au Mali, le pays accueille désormais le cœur du dispositif militaire français, sur la base aérienne projetée (BAP) de Niamey, où sont déployés en permanence cinq drones Reaper et au moins trois avions de chasse Mirage. Les armées françaises ont pour mandat d'appuyer les troupes nigériennes au combat et de les aider à monter en puissance ses armées, alors que le groupe Etat islamique au Sahara (EIS) a regagné du poil de la bête à la frontière malo-nigérienne.
"Aucune solution de repli"
Que va-t-il arriver aux 1500 militaires Français déployés au Niger? "Il n'y a aucune solution de repli dans la région", a souligné le journaliste spécialiste de l’Afrique, Antoine Glaser, à franceinfo. Avant d'ajouter: "Cela veut dire qu'il y aura sans doute une partie des militaires français, entre 1500 et 2000 effectifs, qui rentreront en France."
"Petit à petit, c'est une période historique pour la France qui se termine, une période post-coloniale de présence militaire. De la Mauritanie au Soudan, les djihadistes ont réussi à faire fuir l'ensemble des Occidentaux", analyse encore Antoine Glaser.
"La menace terroriste est extrêmement volatile. Dans cette confusion, la situation peut-elle profiter aux terroristes? C'est la question que tout le monde se pose", ajoute Caroline Roussy, directrice de recherche à l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS)
Si rien n'a pour l'instant été annoncé concernant le futur des militaires français dans la région, la France a annoncé samedi suspendre "toutes ses actions d'aide au développement et d'appui budgétaire". Dans un communiqué, le ministère français des Affaires étrangères a demandé "le retour sans délai à l'ordre constitutionnel nigérien, autour du président Bazoum, élu par les Nigériens". Emmanuel Macron avait lui condamné "avec la plus grande fermeté" un coup d'État "dangereux" pour la région.