Autriche: quand le FPÖ de Jörg Haider dirigeait une région

Pendant 11 ans, le leader d'extrême-droite Jörg Haider a dirigé le Land de Carinthie. - Daniel Rauning - AFP
L'Autriche basculera-t-elle à l'extrême-droite? Le scrutin présidentiel, dont le résultat devrait se dessiner dans la soirée, oppose les Verts au FPÖ, parti d'extrême-droite qui a réussi à s'installer durablement dans le paysage politique autrichien. Les carinthiens connaissent bien l'extrême-droite qui a dirigé leur région pendant 14 ans jusqu'à la mort de son leader, Jörg Haider.
Un leader charismatique et sulfureux
En Carinthie, Land du sud de l'Autriche, Jörg Haider est adulé. Dimanche, son successeur à la tête du FPÖ, Norbert Hofer, a recueilli près de 40% des suffrages dans la région, signe que le souvenir de l'extrême-droite est encore bien vivace dans la contrée la plus méridionale du pays.
1989, premier coup de tonnerre. Jörg Haider se fait élire gouverneur de Carinthie à la tête d'un parti fondé par d'anciens SS et habitué jusque là aux profondeurs du classement, le FPÖ. Deux ans plus tard seulement, il doit renoncer à son poste après avoir vanté publiquement la politique d'emploi du IIIe Reich. Rebelote en 1995 lorsqu'il déclare que les camps de la mort n'étaient "que des camps disciplinaires" et qu'"il faut rendre honneur à la Waffen-SS".
Le retour en grâce et les affaires
Quatre ans plus tard, Jörg Haider revient sur le devant de la scène et reprend le Land. La même année, il fait carton plein aux législatives et fait entrer son parti au gouvernement au prix d'un adoucissement de la ligne du parti, qui perd peu à peu son électorat radical, nostalgiques du pangermanisme et du nationalisme.
Pendant les onze ans qu'il passe au pouvoir, le FPÖ voit son image sérieusement écornée par les affaires politico-financières qui touchent son leader. Jörg Haider est tour à tour accusé d'avoir accepté 5 millions de dollars de Saddam Hussein, avec lequel il n'a jamais caché sa proximité, et de s'être laissé corrompre par la banque BayernLB en échange de faveurs politiques.
Une ardoise lourde à assumer
Le 11 octobre 2008, Jörg Haider se tue dans un accident de voiture dans la région qu'il dirige toujours. L'émotion est forte, mais huit ans plus tard, ses détracteurs gardent un souvenir amer du passage du FPÖ au pouvoir. Dans Le Temps, Peter Kaiser, gouverneur social-démocrate du Land depuis 2013, fustige un piètre gestionnaire. "Le testament de Haider? Des dettes et des ennuis" estime le gouverneur.
Entraîné par la faillite de la banque régionale Hypo Alpe Adria, le Land a même frôlé la banqueroute au plus fort de la crise de la zone euro. "Nous souffrons encore des décisions prises à l’époque car la confiance a été brisée pour longtemps" estime Jürgen Mandl, président de la chambre de commerce de Klagenfurt. La popularité du leader d'extrême-droite reste pourtant forte dans la région. L'écologiste Rolf Holub se souvient encore de la distribution de billets de 100 euros aux plus nécessiteux à Noël. "Les bénéficiaires faisaient la queue" raconte l'élu.