Auto-radicalisation, perquisitions: où en est l'enquête sur le meurtre du député britannique David Amess?

Les policiers au cours d'une perquisition dimanche dans le nord de Londres. - Justin Tallis
"Il a attendu son tour et quand il a été appelé, il s'est jeté sur lui avec un couteau". Les paroles du conseiller local John Lamb, ami du défunt, auprès du Guardian, donnent une image saisissante du drame qui a endeuillé Leigh-on-Sea vendredi et glacé d'effroi l'ensemble de la société britannique.
Depuis trois jours et l'assassinat du député conservateur David Amess, celle-ci vit au rythme de l'enquête policière chargée d'établir les circonstances du drame. Les investigations en cours dégagent déjà quelques certitudes ce lundi.
La scène s'est déroulée vendredi à Leigh-on-Sea, petite ville de 22.000 habitants, posée sur l'estuaire de la Tamise, quelques kilomètres à peine en retrait de la Mer du Nord, et à 60 kilomètres environ à l'est de Londres. Le député "tory" David Amess tenait sa permanence parlementaire dans une église méthodiste de sa circonscription quand il est tombé sous les coups de couteau de son assaillant.
Le suspect, interpellé sur les lieux du drame, a pour nom Ali Harbi Ali. Il s'agit d'un homme de 25 ans, d'origine somalienne, dont la "motivation potentielle liée à l'extrémisme islamiste" a vite été retenue par les enquêteurs, comme la BBC s'en est fait l'écho. Celui-ci avait d'ailleurs été poussé à s'inscrire au programme Prevent, dont la page internet précise qu'il associe autorités et communautés locales afin de "trouver des solutions et travailler au soutien et à la protection de personnes vulnérables" menaçant de "sombrer dans l'extrémisme".
Premier problème - ou première faille - ce programme est soumis au volontariat et donc à la bonne volonté de l'individu "vulnérable". Or, Ali Harbi Ali semble ne pas l'avoir suivi et les autorités n'y ont pas regardé plus avant, l'homme n'étant pas considéré comme "sujet d'intérêt", comme le remarque encore la BBC. Ainsi laissé à lui-même, Ali Harbi Ali a glissé vers l'horreur via une trajectoire d'"auto-radicalisation", selon les mots du gouvernement britannique. Il paraît d'ailleurs avoir élaboré son crime puis son passage à l'acte seul, trouvant son inspiration dans les forfaits et l'idéologie d'une milice radicale de son pays d'origine, les Shebabs.
Fils d'un ex-conseiller du Premier ministre somalien
Son milieu et son extraction sociale intéressent également les enquêteurs et les observateurs. Ainsi, le Sunday Times a rencontré le père du suspect alors que celui-ci a trouvé refuge chez sa soeur. Ce dernier, Harbi Ali Kullane, est un personnage bien introduit dans la politique de son pays: il fut conseiller auprès de la direction du gouvernement somalien.
"Je suis profondément traumatisé", a-t-il assuré auprès du Sunday Times. "Ce n'est pas quelque chose à laquelle j'aurais pu m'attendre ou que j'aurais pu imaginer".
Les interrogatoires vont s'étaler jusqu'à vendredi
Plus concrètement, les policiers ont déjà mené trois séries de perquisitions. Et l'enquête se concentre à présent autour d'une habitation de Kentish Town, dans le quartier londonien de Camden, dans le nord de la capitale. C'est là que vivait Ali Harbi Ali.
Si rien n'a filtré dans la presse à ce stade au sujet des découvertes éventuelles sur place, les investigateurs ont encore de la ressource. Le dossier étant traité par l'antiterrorisme, ils ont la semaine - jusqu'à vendredi - pour interroger et faire parler l'assassin présumé.
