"Mitt Romney n’est pas un idéologue"

INTERVIEW - Qui est véritablement Mitt Romney, comment gouvernera-t-il s’il l’emporte ? Gérard Olivier, auteur de "Mitt Romney. Pour le renouveau du mythe américain", explique à BFMTV.com qui est le candidat républicain à la présidence des Etats-Unis, qui pourrait bien l’emporter le 6 novembre.

Qui de Barack Obama ou Mitt Romney l'emportera le 6 novembre ? Difficile de prévoir tant les sondages sont serrés à quelques heures de l'ouverture des bureaux de vote. Il est même probabale pour Gérard Olivier - journaliste qui partage sa vie entre la France et les Etats-Unis et auteur d'un ouvrage sur Mitt Romney - que le résultat ne soit pas connu au soir de l'élection. En attendant il parle de Mitt Romney, son parcours et ses convictions à BFMTV.com

Dans votre livre, vous dîtes qu’un jour il y aura un Romney président des Etats-Unis. Pourquoi ?

Pour signaler que les Romney c’est plus qu’une famille, c’est une dynastie ancienne qui trouve sa source dans l’histoire des mormons, dans l’histoire des Etats-Unis et celle du père de Mitt Romney, George Romney. Ce dernier a d’abord fait fortune dans les affaires avant de s’engager en politique. Son fils, Mitt, réussit à peu près le même parcours. Aujourd’hui, il a cinq enfants, dont certains s’intéressent à la politique, et 18 petits-enfants. Il est probable que l’un d’eux soit, un jour, président des Etats-Unis. Comme les Bush et les Kennedy à une époque, les Romney sont aujourd’hui une dynastie montante aux Etats-Unis.

Où se classe Mitt Romney sur l’échiquier politique ?

S’il est élu président, il sera comme Dwight Eisenhower, un républicain [président républicain de 1953 à 1961] qui avait servi sous l’administration Truman [président démocrate de 1945 à 1953]. Il sera modéré et gouvernera au centre. Romney n’est pas un homme politique professionnel et ce n’est pas un idéologue. C’est un bon gestionnaire d’entreprise qui compte faire de même avec l’entreprise Etats-Unis. En tant que mormon, il a beaucoup de discipline, il met en avant les valeurs familiales, dans ce sens-là il sera conservateur. En économie, il est en faveur d'un gouvernement qui favorise la libre-entreprise.

Qu’est-ce qui différencie Barack Obama de Mitt Romney ?

On ne s’en rend pas compte en France, mais ce sont non seulement deux personnalités opposées qui s’affrontent mais aussi deux projets, deux principes fondateurs qui s’opposent. Mitt Romney est pour la liberté individuelle, la liberté d’entreprendre, avec la famille comme fondement de l’échafaudage social. Pour une croissance économique qui permette à tous, avec des inégalités, de s’élever, sans intervention de l’Etat. Pour Barack Obama au contraire, le rôle du gouvernement est de niveler les inégalités, en ce sens il est social-démocrate. Ce qui est historiquement nouveau pour les Etats-Unis.

Pourquoi s’est-il lancé en politique aussi tardivement ?

Pour la même raison que son père. Pour Mitt et George Romney les affaires ne sont pas une satisfaction suffisante dans la vie. Et c’est là que la religion mormon entre en ligne : il faut servir les autres. Faire de l’argent n’est pas un but dans la vie.

Justement, la religion mormone risque-t-elle d’influencer sa façon de gouverner s’il l'emporte ?

Les mormons font la distinction entre la sphère religieuse et la sphère laïque. Quand il était gouverneur du Massachusetts, Mitt Romney n’a jamais mis sa religion en avant dans la gestion politique de l’Etat. De plus tous les mormons ne sont pas républicains, certains sont démocrates, comme Morris Udall qui se présenta aux primaires démocrates contre Jimmy Carter en 1976.

Peut-il gagner l’élection ?

Absolument. Certes les derniers sondages donnent l’avantage à Barack Obama pour ce qui est du vote populaire et du collège électoral. Mais il suffit que des Swing states basculent et il l’emporte. Il est surtout très envisageable que le résultat ne soit pas connu tout de suite.

Et s’il perd, que fera-t-il ?

Il se retirera. Mitt Romney, jusqu’ici, a passé plus de temps à faire campagne qu’à être au pouvoir. Aujourd’hui, il n’a plus de siège électif. C’est la deuxième fois qu’il se présente à la présidentielle [il était candidat aux primaires républicaines en 2008], il n’aura pas de troisième chance. Il prendra probablement des responsabilités ailleurs, à la tête d’une fondation par exemple.

|||"Mitt Romney. Pour le renouveau du mythe américain"
Par Gérard Olivier.
Edition Jean Picollec.
Octobre 2012. 22 euros.

Propos recueillis par Clémence Lemaistre