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Société

Philippe Lançon de Charlie Hebdo: "J’ai eu à lutter pour me réparer"

Près de six mois après l'attaque contre Charlie Hebdo, le chroniqueur Phillippe Lançon reste hospitalisé.

Près de six mois après l'attaque contre Charlie Hebdo, le chroniqueur Phillippe Lançon reste hospitalisé. - Damien Meyer - AFP

Le chroniqueur de Charlie Hebdo, grièvement blessé lors de l’attaque du journal en janvier, est resté silencieux pendant des mois. Invité lundi matin sur France Inter, Philippe Lançon reste marqué par le drame et garde ses distances avec l’actualité.

Près de six mois après l'attentat contre Charlie Hebdo, Philippe Lançon s’exprime depuis un hôpital. Le journaliste de Libération et chroniqueur de l’hebdomadaire satirique, blessé pendant l’attaque, a subi une dizaine d’opérations de la mâchoire. Sur France Inter ce lundi matin, sa voix est calme, le ton posé mais le rythme de sa parole est marqué par cette blessure.

Il dit arriver à dormir "avec un somnifère" et ne pas repenser beaucoup au 7 janvier. "Comme, je crois, mes amis blessés et survivants, j’ai eu à lutter pour me réparer et je suis encore dans cette lutte", explique Philippe Lançon. Mais bien évidemment, certaines images restent ancrées. "J’avais mis mon manteau. On discutait les uns les autres et probablement si je n’avais pas montré un livre de jazz à Cabu, je serais sorti une minute plus tôt et je serais tombé sur les frères Kouachi", raconte-t-il. "Je pense que je ne serais pas là pour vous parler". 

Coupure avec l'actualité 

Après l’attaque, le journaliste avait fait le récit de l'attaque dans Libération, décrivant comment il avait "fait le mort" alors qu'il était touché par les balles des frères Kouachi. Mais depuis, Philippe Lançon était resté silencieux.

Il explique d’ailleurs s’être isolé de la médiatisation des événements de janvier. "J’étais à l’intérieur de cet événement et il m’était très difficile de le voir se diluer dans des paroles, des commentaires (…) que je trouvais d’extrêmement basse intensité par rapport à ce que j’ai vécu", explique-t-il. Philippe Lançon évite alors d'écouter les médias pendant plusieurs mois. 

Encore aujourd’hui, le chroniqueur littéraire se tient à distance de l’actualité. "J’écoute un peu la radio (…) très rapidement. Une fois l’information donnée, on entre dans la glose de cette information et ça c’est insupportable pour moi".

Emmanuel Todd, un "corbeau" 

Les polémiques autour de "l’esprit du 11 janvier" qui ont suivi la marche historique après les événement l’irritent. Emmanuel Todd en particulier. En mai dernier, l'historien publiait Qui est Charlie? censé dénoncer "l'imposture" de cette mobilisation. "Quand j’ai lu les entretiens qu’il a donnés, j’ai été agacé. J’ai vu un corbeau, ces corbeaux qui se déposent sur des champs de cadavres une fois que la bataille a eu lieu". Philippe Lançon regrette "le mépris (…) pour ces gens qui ,pour la plupart, avaient été sincèrement horrifiés par cet événement".

Malgré la controverse qui a suivi le mois de janvier, Philippe Lançon continue de défendre la liberté d’expression: "Bien sûr qu’on peut critiquer Charlie".

C. B