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"Pas de boutique afro ici": une affiche raciste collée sur la vitrine d'un commerce parisien

Anne-Marie Mendy, la gérante de Colorful Black, dans le 2e arrondissement de Paris, a relayé mercredi sur les réseaux sociaux la photo d'une affiche retrouvée placardée sur la devanture.

Anne-Marie Mendy, la gérante de Colorful Black, dans le 2e arrondissement de Paris, a relayé mercredi sur les réseaux sociaux la photo d'une affiche retrouvée placardée sur la devanture. - Colorfulblack_paris - Instagram

Un message raciste a été placardé mercredi sur la vitrine de Colorful Black, une boutique de cosmétiques et de soins pour cheveux afro qui vient d'ouvrir dans le 2e arrondissement de Paris. Sa gérante, Anne-Marie Mendy, dénonce un acte raciste. Elle a déposé plainte.

Anne-Marie Mendy, la gérante de Colorful Black, raconte l'avoir découverte mercredi matin vers 11 heures, en arrivant pour l’ouverture de la boutique. L'affiche injurieuse et raciste est placardée à deux endroits, sur les deux portes de sa boutique de cosmétiques et soins pour cheveux, dans le 2e arrondissement de Paris.

"Nous ne voulons pas ici de boutique afro de vente de cheveux en plastique. Nous ne voulons pas d’un futur quartier Château-Rouge Château d’Eau qui est devenu un quartier poubelle. (...) Pourquoi c’est toujours vous Africains qui demandez et obtenez toutes les subventions ou gratuité? Encore un loyer modéré par la ville de Paris? Pour des cheveux en plastique", dit le message, avant de conclure en grosses lettres: "Vous êtes là mais vous n’êtes pas les bienvenus".

La commerçante a déposé plainte

"Scotchée", Anne-Marie Mendy prend l'une des affiches en photo, les enlève, et poste l'image sur les réseaux sociaux. Très vite, les partages se multiplient sur Facebook, Instagram et Twitter - ce jeudi, le cliché avait été relayé plus de 10.000 fois sur Facebook. Un buzz auquel elle ne s'attendait pas.

"Aujourd’hui, je ne suis pas bien, je suis dégoûtée. Le racisme, ça n’est pas que dans ma tête. On avait eu des réflexions à l’ouverture de la boutique, mais là...", déplore-t-elle, contactée par BFMTV.com ce jeudi. "C’est triste d’être en 2016 et d’avoir ça. Pour moi, c’est inadmissible."

"J’ai trouvé ça énorme. C’est lâche. Qu’il le dise en face, qu’il le signe", s'indigne encore la gérante, qui ajoute avoir "déposé plainte contre X hier (mercredi, Ndlr) au commissariat du 2e arrondissement de Paris", sans soupçonner personne en particulier.

Anne-Marie Mendy possède une autre boutique, installée il y a six ans non loin de là. Celle-ci, située rue Poissonnière, a ouvert samedi dernier. La jeune femme confie avoir entendu des commentaires dès la veille, le vendredi soir, notamment une passante dire "ils nous envahissent". Une pétition aurait même circulé dans le voisinage, contre l'ouverture du magasin. "C’est la visibilité, c’est mon logo qui doit gêner", analyse-t-elle. "C’est la seule boutique afro dans le quartier."

Messages de soutien

Confiant venir "de la banlieue", la gérante se défend: "J’ai une société, je paie des impôts, je suis en règle. Je ne suis pas là à toucher les aides de l’Etat". Et de lancer: "Je ne veux pas la guerre contre les Blancs. Je suis avec un Blanc, mes enfants sont métis. Je voulais simplement que les gens soient informés."

A la suite de la publication de la photo, Anne-Marie Mendy a reçu de nombreux messages "réconfortants" d'habitants du quartier, et "d’autres pour dire de ne pas généraliser". Le maire EELV du 2e arrondissement de Paris, Jacques Boutault, s'est rendu sur place ce jeudi matin pour assurer la commerçante de son soutien.

"De tels messages sont choquants et inadmissibles! Je tiens à dire aux gérants et clients de 'Colorful Black' qu’ils sont, évidemment, les bienvenus. Ce qui ne l’est pas dans cet arrondissement, comme partout ailleurs, c’est le racisme et la malveillance", a réagi l'édile dans un communiqué. 

La Ligue contre le racisme et l'antisémitisme (Licra) s'est elle aussi indignée sur Twitter.

Jointe par BFMTV.com, la Licra dénonce des propos "clairement racistes" et indique avoir fait un signalement au parquet. "On ne porte pas plainte directement, l'affiche n'est pas signée. Il faut que le parquet lance une enquête pour retrouver la personne".

Que risque maintenant l'auteur de l'affiche? Selon l'association, "les propos tenus dans le message sont constitutifs de deux délits, 'provocation publique à la haine raciale' et 'diffamation', passibles de un an d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende".

Violette Robinet