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Société

Discrimination, déshumanisation...la Défenseure des droits alerte sur les risques de fracture sociale

La Défenseure des droits Claire Hédon à Paris, le 15 octobre 2021

La Défenseure des droits Claire Hédon à Paris, le 15 octobre 2021 - Ludovic MARIN © 2019 AFP

La Défenseure des droits, autorité indépendante qui peut recueillir des réclamations des citoyens concernant notamment le service public, a été saisie 115.000 fois en 2021. Un chiffre considérablement en hausse, en lien avec la crise sanitaire.

La crise sanitaire ou encore la dématérialisation des services publics ont augmenté la fracture sociale. C'est le constat que fait Claire Hédon, la Défenseure des droits, qui publie ce mardi son rapport annuel. L'année 2021 a été marquée par une saisine record de l'autorité indépendante qui comptabilise 115.000 réclamations. Un chiffre en hausse de près de 19% par rapport à l'année 2020.

Les réclamations traitées en 2021 ont porté notamment sur la protection et sécurité sociale (22,1% des réclamations traitées), le droit des étrangers (17,1%) et le droit routier (11,6%). En cause, discriminations et déshumanisation.

• La dématérialisation des services publics

"Absence de réponse, délais déraisonnables, difficulté à joindre l’agent responsable du dossier, impossibilité de prendre rendez-vous à un guichet, et, quand on y arrive, de faire aboutir une démarche…": voilà le parcours auquel sont confrontés les usagers de services publics et dénoncé par la Défenseure des droits. Claire Hédon évoque les "défaillances de relation" entre usagers et services publics, à l'origine de "l’incompréhension des usagers, de leur impatience, de leur exaspération, voire de leur colère".

La dématérialisation des services publics entraîne des difficultés d'accès à ces services à une partie de la population: personnes âgées, personnes handicapées, les personnes étrangères, celles en situation précaire mais aussi les jeunes "moins à l’aise qu’on ne pourrait le penser avec l’administration dématérialisée", note le rapport.

• L'effet covid sur les discriminations

La crise sanitaire a eu un impact sur le travail de la Défenseure des droits. "Tout en reconnaissant l’importance de la vaccination dans la lutte contre la pandémie", Claire Hédon "a déploré l’érosion progressive de nos libertés et de la cohésion de la société" alors que "les inégalités sociales et la précarité n’ont fait que s’aggraver".

La Défenseure des droits a reçu "plusieurs dizaines de réclamations" d'agents suspendus par des établissements de santé pour non-respect de l’obligation vaccinale alors même qu’ils se trouvaient en arrêt maladie. "Une discrimination fondée sur l’état de santé", selon l'institution.

Ses 231 agents ont par ailleurs notamment constaté, à travers l’instruction des saisines, "les effets persistants et particulièrement préoccupants sur les enfants d’une crise sanitaire installée dans la durée". Une partie du rapport annuel est justement dédiée à la santé mentale des enfants et aux appels de la Défenseure des droits lancés aux autorités sur l'impératif d'"une vigilance accrue".

• Les discriminations pour les enfants "dys"

Parmi les discriminations, la Défenseure des droits relève celles qui concernent les enfants "dys", c'est-à-dire souffrant de troubles du langage. "Les agents du Défenseur des droits ont continué d’observer des refus fréquents des autorités chargées de l’organisation des examens d’accorder des aménagements et adaptations en cohérence avec les besoins de l’élève en situation de handicap", est-il écrit dans le rapport rendu public.

Manque de soutien pour les enfants handicapés à l'école, mais aussi inégalités d'accès à la cantine, l'autorité constate également qu'il existe encore des "refus de scolarisation illégaux fondés sur un ou plusieurs motifs discriminatoires", en lien avec les critères de résidence, d'origine ou de vulnérabilité liée à la situation économique de la famille.

• Le travail, toujours un lieu de discriminations

L'emploi reste le domaine où les discriminations liées à l'origine sont les plus fréquentes. Mais aussi figure parmi les discriminations liées à l'âge. Les discriminations liées à la grossesse perdurent également, notamment dans le service public et dans les secteurs ayant recours à des contractuelles comme le service hospitalier ou territorial. La Défenseure des droits relève l'annonce d'une grossesse met un stop au processus de recrutement ou annule les chances de reconduction d'un contrat.

En matière de lutte contre les discriminations, une plateforme dédiée a été créée le 12 février 2021, Antidiscriminations.fr. Conçu, porté et piloté par le Défenseur des droits, ce dispositif qui propose des voies de recours pour les victimes de discriminations, comprend aussi un numéro d’appel, le 3928 et mobilise des associations, des organisations syndicales et les services de l’État compétents. En décembre 2021, la plateforme comptabilisait 14.000 sollicitations et a permis, selon le rapport, une augmentation de 22,2% des saisines sur cette thématique.

https://twitter.com/justinecj Justine Chevalier Journaliste police-justice BFMTV