INFO BFMTV. "Miel aphrodisiaque": des dizaines d'intoxications parfois très graves recensées

"Le phénomène perdure ou s'amplifie". Lundi 20 janvier, les douanes françaises ont déploré l'entrée de plus en plus importante sur le territoire de cargaisons de "miel aphrodisiaque". Des tonnes de petits sachets revendus discrètement dans des commerces, ou via les réseaux sociaux, qui ne sont pas sans danger pour les consommateurs.
Auprès de BFMTV.com, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) relève que les cas d'intoxications rapportés par les centres anti-poison sont nombreux et réguliers depuis le début des années 2020.
En moyenne, ce sont 15 à 20 cas qui sont observés chaque année. Un total qui ne représente au final qu'une petite partie de l'iceberg, ces personnes étant seulement celles qui optent pour un appel à ces centres lors de l'apparition des symptômes.
"Le problème perdure ou s'amplifie, avec encore des cas au début de ce mois de janvier. Leur nombre ne diminue pas malgré les recommandations des autorités", constate la docteur Sandra Sinno-Tellier, adjointe à la directrice des alertes et des vigilances sanitaires à l'Anses.
"On sait que ça ne représente qu'une partie de tout ce qui peut se passer comme intoxication. Mais ça montre que le produit circule sur le marché", appuie-t-elle.
L'Agence avait déjà alerté sur ce phénomène en 2021, sans que cela n'entraîne une diminution tangible des intoxications.
"Quasiment exclusivement des hommes dans la trentaine"
Les acheteurs ignorent bien souvent que les petits sachets - vendus comme des aphrodisiaques "naturels" - contiennent bel et bien des substances médicamenteuses que l'on retrouve également dans des médicaments comme le célèbre Viagra.
Parfois, c'est l'équivalent de plusieurs cachets qui sont présents dans un seul petit pochon comme l'ont révélé des analyses de divers produits. Et certains consommateurs avalent sachet sur sachet, parfois au sein d'une même journée, dans l'objectif de booster leurs performances sexuelles. Des prises dont ils ignorent les dangers, puisqu'ils n'en sont pas informés par les revendeurs.
Ces molécules, le sildénafil ou le tadalafil, sont accessibles uniquement sur prescription. Elles provoquent un effet vasodilatateur, c'est-à-dire qu'elles dilatent les vaisseaux sanguins, et ont pour conséquence une diminution de la pression artérielle.
Ces traitements contre les troubles de l'érection sont pourtant disponibles avec une simple ordonnance, car leurs effets sont bien identifiés et peuvent être évités grâce à un conseil médical. Il permet d'écarter les profils à risque puis garantit également un suivi du patient pour écarter les hypothétiques dangers associés.
Réanimation, nécrose: des effets potentiellement très graves
Le profil type des victimes sollicitant ces centres anti-poison? "Quasiment exclusivement des hommes, dans la trentaine, avec une fourchette de 20 à 50 ans", explique l'Anses.
Ils appellent principalement pour des symptômes cardiaques bénins: palpitations, sueur, tremblements, maux de tête, etc. Mais d'autres manifestations plus sévères sont aussi rapportées, comme le cas d'un homme ayant souffert de convulsions le menant ensuite jusqu'en réanimation.
Une autre victime a par exemple souffert d'un "priapisme réfractaire" en jargon médical, ou "érection persistante" en langage plus courant. "Aucun traitement ne faisait effet. Cela a entraîné une nécrose pénienne, susceptible de nécessiter une prothèse", relate la docteur Sinno-Tellier.
"Les effets peuvent être très graves, y compris chez des jeunes hommes en n'ayant pas d'antécédents cardiovasculaires", insiste la porte-parole de l'agence de santé. Aucune mort imputable à ce produit n'a été portée à la connaissance de l'Anses.
Les autorités enquêtent actuellement sur les filières faisant entrer ces produits depuis la Malaisie, de Turquie, de Tunisie ou encore de Thaïlande, avant qu'ils ne soient distribués par divers revendeurs clandestins.