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Covid-19: faut-il rendre le vaccin obligatoire pour les soignants?

Une soignante administrant le vaccin Pfizer-BioNTech à l'hôpital Hôtel-Dieu à Paris le 2 janvier 2021.

Une soignante administrant le vaccin Pfizer-BioNTech à l'hôpital Hôtel-Dieu à Paris le 2 janvier 2021. - Sameer Al-Doumy

Depuis lundi, les soignants âgés de 50 ans et plus peuvent désormais se faire vacciner contre le Covid-19 en France. Certains plaident pour en faire une obligation pour les professionnels de santé.

Critiqué pour sa lenteur dans ce dossier, le gouvernement cherche à accélérer le rythme des vaccinations contre le Covid-19. Ce lundi, la première phase a déjà été élargie à tous les professionnels de santé de 50 ans et plus ou présentant des facteurs de risque, auxquels se sont ajoutés les pompiers et aides à domicile de plus de 50 ans.

Le chef de l'État a précisé, ce mardi lors d'un déplacement à Tours, que l'ensemble des soignants qui le souhaitent pourraient être vaccinés lors de la première phase, qui durera jusqu'à la fin du mois de mars. Mais certains professionnels veulent aller plus loin et s'interrogent: doit-on rendre la vaccination contre le coronavirus obligatoire pour les soignants?

Un devoir d'exemplarité?

C'est du moins l'idée défendue par Daniel Guillerm, le président de la Fédération nationale des infirmiers dans une tribune publiée le 26 décembre dernier dans le Journal du dimanche, et ce au nom du "devoir d'exemplarité", du risque de poursuites pénales auquel ils pourraient devoir faire face s'ils contaminaient des patients mais aussi en vertu de l'application du "principe de précaution".

"Je voudrais que tout le personnel des Ehpad, soignants ou pas, se fasse vacciner" de manière obligatoire, a également plaidé lundi sur BFMTV le Dr Robert Sebbag, infectiologue à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris.

"Le virus vient de l'extérieur", a-t-il poursuivi, uavançant que "les gens qui ne voulaient pas se faire vacciner et qui avaient choisi ce métier à risque" ne devaient alors "pas aller travailler" afin de ne pas prendre le risque de contaminer des patients.

En ce début de semaine, certains soignants ont déjà reçu la première injection du vaccin de Pfizer et BioNTech. C'est par exemple le cas du professeur Djillali Annane, chef du service de réanimation à l'hôpital Razymond-Poincaré de Garches, invité de BFMTV ce mardi. Sur notre plateau, il affirme ne pas être favorable à une obligation pour les soignants, notamment car "cela ne serait pas réalisable" concrètement selon lui.

"Si on rend quelque chose obligatoire, il faut être en mesure d'en fournir le contenu. Or on ne peut pas aujourd'hui vacciner un million de professionnels de santé en France", explique-t-il.

Le Pr Djilali Annane dit avoir constaté, dans son service, que 21 des 22 soignants éligibles à la vaccination s'étaient fait vacciner contre le Covid-19. "Quand je décide de me faire vacciner, mes collègues tendent à se faire vacciner dans la foulée. On emporte les gens indécis avec soi", explique le Pr Djillali Annane.

Les soignants réticents alimentent la défiance

Le syndicat des infirmiers, lui, est "rigoureusement opposé à l'obligation vaccinale, pour les soignants ou l'ensemble de la population", comme l'a fait savoir son porte-parole Thierry Amouroux au micro de BFMTV ce mardi, rappelant lui aussi qu'il existait une tension concernant le nombre de doses disponibles sur le territoire.

Au sein des établissements de santé ou des Ehpad, tous les soignants ne sont pas nécessairement unanimes face à la vaccination - à l'image du reste de la population, où la défiance face aux vaccins reste importante. Au-delà du Covid-19, l'Académie de médecine pointait ainsi en septembre dernier la couverture vaccinale "insuffisante" du personnel soignant contre la grippe, estimée à seulement 35% dans les établissements de santé pour la saison 2018-2019.

Aujourd'hui, pour le Covid-19, "on a 20% des agents qui sont vraiment d'accord pour se faire vacciner, le reste est pour l'instant dans l'indécision ou contre la vaccination", expliquait mardi matin Eve Guillaume, directrice de l'Ehpad "Lumières d'automne" de Saint-Ouen, en Seine-Saint-Denis.

Cette directrice d'établissement expliquait sur notre antenne que le personnel de son Ehpad étaient en fait "des Français comme les autres", pris de doutes. Elle réclame ainsi "une information transparente sur les effets indésirables" de la vaccination, afin que chacun puisse se faire une idée en connaissance de cause.

Jeanne Bulant Journaliste BFMTV