Soupçons de népotisme à l'Assemblée: des députés LaREM se défendent

Deux députés LaREM sont soupçonnés de népotisme car leurs filles sont employées par d'autres députés LaREM. - Eric FEFERBERG / AFP
"La polémique n'a pas lieu d'être". Les déclarations d'intérêts et d'activités ont été publiées il y a quelques semaines par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, sur lesquelles figurent notamment les noms des assistants parlementaires des élus. En consultant ces documents, on s'aperçoit que plusieurs élus de différentes sensibilités emploient le fils ou la fille d'un collègue de l'Assemblée. Notamment au sein des députés de la majorité, qui a fait voter l'interdiction des emplois familiaux début août.
Comme l'ont noté nos confrères de Streetpress, c'est notamment le cas de Christophe Arend, député La République en marche de Moselle, dont l'une des assistantes parlementaires est Charlie Trisse, la fille de Nicole Trisse, une autre élue de la majorité du même département. Cela figure noir sur blanc sur sa déclaration. C'est aussi le cas de Bertrand Sorre, élu LaREM de la Manche, dont l'une des assistantes parlementaires est Maryll Vignal, la fille du député de l'Hérault Patrick Vignal, comme l'indique la fiche de Bertrand Sorre sur le site de l'Assemblée nationale.
"Emplois croisés" au parlement européen
Mais pour Nicole Trisse, contactée par BFMTV.com, il n'y a là "ni emplois familiaux, ni emplois fictifs, ni emplois croisés". Les emplois croisés consistent, pour deux élus, à embaucher chacun un membre de la famille de l'autre. Cela permet notamment de contourner l'interdiction des emplois familiaux, comme au Parlement européen, où la pratique était déjà bannie avant que l'Assemblée française ne s'empare du problème. Au FN, l'époux de l'eurodéputée Mylene Troszczynski, Laurent Guiniot, est ainsi l'assistant parlementaire de Joëlle Mélin, une autre députée frontiste. Une autre eurodéputée, Marie-Christine Boutonnet, emploie Philippe Chevrier, époux de sa collègue Marie-Christine Arnautu.
"Ma fille a été prise en fonction de son CV, ce n'est pas moi qui lui ai trouvé un emploi", se défend Nicole Trisse, qui regrette "des amalgames". La déontologue de l'Assemblée nationale a été informée de cette configuration par sa fille, et n'y a vu selon la députée aucun problème.
"Les CV se baladent, moi j'en ai encore beaucoup qui arrivent. Si demain celui du fils ou de la fille d'un collègue se présente, je ne vais pas l'écarter pour ça", poursuit l'élue.
"Il n'y a pas de détournement de la loi"
Nicole Trisse défend les compétences de sa fille, arrivée en politique avant elle, et qui connaît très bien le département de la Moselle. "On ne peut pas empêcher les gens compétents de travailler", insiste-t-elle. La députée précise qu'elle a voté la fin des emplois familiaux, car "cela évite les polémiques". "C'est beaucoup plus clair pour tout le monde", souligne-t-elle.
Sollicité, Christophe Arend n'a pas donné suite mais a publié un communiqué dans lequel il prend la défense de ses collaborateurs. "Leurs compétences et l'efficacité de leur travail légitiment parfaitement leur place au sein de mon équipe", écrit l'élu. "Il n'y a pas de détournement de la loi. La déontologue et le Bureau de l'Assemblée ont été informés de cette situation", peut-on lire dans le document. La loi prévoit que "lorsqu'un collaborateur parlementaire a un lien familial (...) avec un autre député ou sénateur, il en informe sans délai le député ou le sénateur dont il est le collaborateur, le bureau et l'organe chargé de la déontologie parlementaire de l'assemblée dans laquelle il est employé".
"Des amalgames"
Bertrand Sorre, le député de la Manche qui travaille avec la fille de son collègue de l'Hérault, plaide lui aussi une bonne foi totale. "Je crois qu'on fait des amalgames avec ce qui a pu se passer avant la présidentielle. Je l'ai recrutée en toute transparence, sur ses compétences et son expérience, car en tant que nouveau député je voulais m'appuyer sur quelqu'un qui a de l'expérience", explique-t-il.
Maryll Vignal travaille pour lui depuis le 1er septembre, et lui a signalé dès le début que son père était lui aussi député de la majorité.
"Je ne connaissais pas son père. Je comprends les interrogations, mais je n'ai pas le sentiment d'avoir participé au 'recyclage' de quelqu'un. J'ai reçu 80 CV, j'ai rencontré 12 candidats, dont elle, et je l'ai recrutée après plusieurs entretiens", précise l'élu.
"Je regrette qu'on puisse laisser penser qu'il y a une malhonnêteté derrière ce recrutement", ajoute Bertrand Sorre, qui dit avoir voté l'interdiction des emplois familiaux "des deux mains".
Des députés emploient toujours leurs proches
Quant aux députés qui emploient toujours un membre de leur famille, car certains n'ont pas encore régularisé leur situation, ils ont jusqu'au 15 décembre pour entamer les procédures de licenciement. Parmi eux, Nicolas Dupont-Aignan, député de l'Essonne et président de Debout la France, qui emploie toujours son épouse Valérie. Gilbert Collard, élu FN du Gard, qui travaille avec sa femme Anne-Marie. Ou encore le député LR Jean-Luc Reitzer, qui emploie sa femme Michèle et son fils Charles-Emmanuel.