Proposition d’abrogation de la retraite à 64 ans: la gauche pousse au débat mercredi
"Ce serait sans précédent, qu'un gouvernement ou une majorité empêche un groupe parlementaire d'utiliser sa niche pour proposer des textes de loi à notre initiative", affirmait dimanche matin Fabien Roussel, le secrétaire national du parti communiste français, invité du rendez-vous Europe 1 / Les Echos / CNews.
Mercredi 31 mai, l’Assemblée nationale doit examiner en commission des Affaires sociales la proposition de loi du groupe indépendant Liot pour abroger la réforme des retraites, promulguée mi-avril. Le texte proposé pourrait ensuite passer au vote dans l’hémicycle le 8 juin.
La majorité vent debout
Sauf que le camp présidentiel fait tout pour l’empêcher. La Première ministre Elisabeth Borne affirme que cette proposition portée par Liot est "un manque de respect vis-à-vis des Français". Des députés macronistes vont jusqu’à la qualifier d’"arnaque" n’ayant aucune chance d’aller au bout de son parcours parlementaire. "On fera tout pour que ce débat n'ait pas lieu", avait assumé la secrétaire d'Etat chargée de l'Enfance Charlotte Caubel.
Dans un premier temps, le pouvoir avait d’abord cherché à utiliser l'article 40 de la Constitution, qui dispose que les initiatives des parlementaires ne sont pas recevables si elles impliquent davantage de charges publiques. "Il est assez irresponsable de la part d'un groupe parlementaire de laisser croire qu'on peut présenter une proposition de loi qui supprime 18 milliards (d'euros) de ressources et que cette proposition de loi pourrait prospérer", avait affirmé Elisabeth Borne mercredi.
Sollicité pour examiner la conformité du texte, le président de la commission des Finances, l’Insoumis Eric Coquerel a écarté cet argument. Dans une tribune du Monde publiée dimanche il répète qu'il ne compte pas bloquer la loi.
Pour faire barrage, la majorité compte désormais vider de sa substance la proposition de loi lors de son passage en commission mercredi, en supprimant l'article d'abrogation des 64 ans. Le groupe Liot serait alors contraint de réintroduire sa mesure par un amendement en prévision de la séance du 8 juin. Cette stratégie permettrait alors à la présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet de décider elle-même de la recevabilité financière. Celle-ci ne s’est pas encore décidée à le faire.
Mais d’autres scénarios pour éviter le vote sont envisagés par le camp présidentiel, dont l’obstruction parlementaire.
"Ne fracturez pas la démocratie"
"Ce qui est en train de se passer, c'est une brutalité démocratique", avait estimé vendredi la cheffe de file des députés Insoumis Mathilde Panot à propos des manœuvres du camp présentiel.
"Ne fracturez pas la démocratie ne provoquez pas une crise démocratique institutionnelle grave dont je ne sais pas dans quel état nous sortirons", a averti de son côté Fabien Roussel dimanche.
Dans l’hypothèse d’un vote bloqué, le député communiste envisage déjà une initiative commune aux forces de gauche et écologistes: "Je propose que tous ensemble, nous puissions organiser ce référendum que nous n'avons pas eu, (...) une votation citoyenne", propose-t-il. "Redonnons la parole au peuple, ouvrons des lieux de vote dans les villes, dans les mairies, avec les élus qui souhaiteraient l’organiser."
Invité de BFMPolitique ce dimanche 28 mai, Robert Ménard, le maire divers droite de Béziers, affirme de son côté qu'il ne votera pas la proposition de loi portée par Liot.
Le chef Liot Bertrand Pancher, et le rapporteur de son groupe Charles de Courson, se disent leur côté optimistes sur une victoire le 8 juin, sous réserve de fédérer les voix de la gauche, du RN et de certains LR. "Je ne vois pas comment le président Macron pourrait ne pas en tenir compte", estime Bertrand Pancher.