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Alain Juppé a-t-il vraiment changé?

Alain Juppé est "l'homme politique de l'année", selon le magazine GQ.

Alain Juppé est "l'homme politique de l'année", selon le magazine GQ. - BFMTV

Après avoir fait la une des Inrocks, Alain Juppé a été élu "homme politique de l'année" par GQ. Le candidat à la primaire UMP pour la prochaine présidentielle a une image plus détendue et bénéficie d'une certaine popularité.  Mais a-t-il vraiment changé?

La scène valait le détour. Alain Juppé posant devant de très nombreux photographes criant son nom à la soirée des "Hommes de l'année" du magazine GQ, mercredi soir à Paris, succédant sur le tapis rouge à Omar Sy, Pierre Niney ou Julien Doré. Si l'homme politique n'était pas des plus à l'aise, il semblait néanmoins savourer le moment.

"C'est formidable je me retrouve au milieu de stars internationales donc je suis très intimidé", a ironisé le maire de Bordeaux. "C'est toujours un plaisir d'être honoré, surtout que j'appartiens à une corporation qui n'a pas toujours bonne réputation", a ajouté le candidat à la primaire UMP pour 2017.

"Une droite à visage humaniste"

Alors que les bons sondages se succèdent, qu'il a fait la une de l'hebdo Les Inrocks la semaine dernière, titré "Juppémania", le maire de Bordeaux fait, cette fois, la couverture du magazine branché masculin GQ, qui lui décerne le prix de "l'homme politique de l'année". Emmanuel Poncet, le rédacteur en chef de GQ, a l'impression qu'Alain Juppé "a fendu l'armure" et explique: "Il cristallise sur sa personne une droite à visage humaniste".

Pour le côté hype on repassera, "l'homme politique de l'année" ne connaissait même pas le magazine à en croire Nadine Morano, citée par Le Lab.

"Il faut se méfier des modes"

Si cet intérêt médiatique n'est pas désagréable, Hervé Gaymard prend ses distances avec cette "mousse parisienne". "Il faut se méfier des modes parce qu'elles sont faites pour passer", explique le député UMP de la Savoie, qui joue un rôle important dans la campagne présidentielle d'Alain Juppé. Et explique aux équipes du Grand Angle de BFMTV qu'il s'agit d'une véritable "course de fond".

Et pour l'instant, le candidat déclaré est dans une phase d'auscultation du pays. "Ce n'est pas avec des vieilles recettes qu'on redressera le pays", développe Hervé Gaymard.

L'auscultation du pays n'empêche pas de répondre aux sollicitations des médias qui sont d'autant plus faciles à accepter que les sondages sont bons.

"La route est longue, je reste modeste et serein", avait, lui-même, expliqué Alain Juppé début novembre, interrogé sur les bons sondages.

"Un rôle de composition"

Côté personnalité, où en est l'homme rigide, "droit dans ses bottes" de 1995? En recevant son prix mercredi soir, Alain Juppé a fait sourire l'assistance en précisant qu'il aurait préféré être "l'homme politique de l'année" 2017.

Ses partisans affirme que le bientôt septuagénaire s'est bonifié avec le temps. Hervé Gaymard estime ainsi que "le meilleur d'entre nous" a toujours les mêmes qualités de "rigueur", "d'abnégation" et de "sérieux" qui on forgé son image, mais qu'il a progressé en "rondeur" et "en écoute." Alain Juppé reconnait lui-même dans son interview à GQ qu'on lui a souvent conseillé de sourire.

Sa première opposante à Bordeaux n'est pas avare d'anecdotes pour montrer à quel point l'image du moment ne colle pourtant pas au personnage qui regarde "sur le côté" quand il lui sert la main ou quitte le conseil municipal quand ses opposants le mettent en colère. La socialiste Michèle Delaunay juge, en effet, qu'Alain Juppé est actuellement "dans un rôle de composition" opposé à sa nature plus "raide" et qu'il sera difficile de tenir pendant deux ans et demi.

"Une étoile filante"

Pourtant, le spécialiste des sondages Frédéric Dabi (Ifop) relève qu'il est l'un des rares UMP à "bénéficier de la bienveillance de la gauche", avec 68% de bonnes opinions chez EELV et 67% au PS, dans le dernier baromètre Ifop-Paris Match.

"Il n'y a pas de 'Juppémania' à gauche et pas au PS", affirme pourtant, catégorique, le sénateur PS Luc Carvounas. Il pronostique que le maire de Bordeaux "sera, au contraire, une comète, une étoile filante".

Lancé dans la course pour 2017, Alain Juppé a loué des locaux à deux pas de l'Assemblée nationale et est entouré d'une petite équipe. Si Nicolas Sarkozy est bien élu président de l'UMP le 29 novembre, il aura à faire face à une machine qui risque d'être au service de l'ex chef de l'Etat. La "Juppémania" suffira-t-elle face à un tel rouleau compresseur?

Karine Lambin avec Pauline Revenaz