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Sécurité routière: les routes à 80km/h, efficace ou pas?

Trois tronçons de routes nationales vont être testés à 80 km/h.

Trois tronçons de routes nationales vont être testés à 80 km/h. - Martin Bureau - AFP

Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a annoncé ce lundi  les tronçons de routes où sera expérimentée la limitation de vitesse à 80km/h au lieu de 90. Pour certains, la mesure permettrait de sauver 400 vies par an, pour d'autres elle serait sans effet.

Ecartelé depuis un an sur cette mesure, Bernard Cazeneuve a finalement annoncé ce lundi devant le Conseil national de la sécurité routière (CNSR), les trois tronçons de routes où la limitation de vitesse à 80km/h sera testée. Ils se trouvent sur la RN 7 (18 kilomètres dans la Drôme), la RN 151 (17 kilomètres dans la Nièvre et 32 kilomètres dans l'Yonne) et la RN 57 (14 kilomètres en Haute-Saône).

Onze mois que le ministre de l'Intérieur n'était plus apparu devant l'instance consultative de la sécurité sur les routes. Le 16 juin 2014, il s'était mis à dos une partie du CNSR en annonçant qu'une baisse de 90 à 80 km/h de la vitesse maximale autorisée sur les routes secondaires bidirectionnelles ne pouvait "être envisagée que de manière expérimentale et sur des segments très accidentogènes". Pourquoi ce dispositif est-il si polémique? Le point sur ses atouts et ses faiblesses.

400 vies sauvées par an

Pour comprendre le statut controversé de la mesure, il faut remonter au 18 mars 2014. Ce jour-là, deux experts, Claudine Perez-Diaz et Claude Got, annoncent dans une tribune au Monde leur intention de démissionner du comité des experts auprès du CNSR, déplorant que "la France abandonne sa sécurité routière". Ils estiment que le gouvernement a commis une grave erreur en refusant d’abaisser de 90 km/h à 80 km/h la vitesse sur les routes à double sens dépourvues de séparateur médian, où 2.000 personnes sont tuées chaque année.

Selon eux, à l'instar de Chantal Perrichon, la présidente de Ligue contre la violence routière, la mesure permettrait de sauver jusqu'à 400 vies par an.

Aux Pays-Bas (80 km/h), au Danemark (80 km/h) et en Suède (70 km/h), la mesure est déjà en vigueur. Or, ces trois pays font partie des pays où le taux de mortalité sur les routes est le plus faible.

Alors pourquoi ne pas appliquer la limitation à tout l'Hexagone si celle-ci s'avère si efficace chez nos voisins européens? 

Contre-exemples en Europe

Parce que d'autres pays tels que l'Allemagne et le Royaume-Uni, adeptes de limitations de vitesses moins strictes sur les mêmes types d'axes routiers (respectivement 100 km/h et 97 km/h), servent de contre-exemples. En effet, ces deux pays affichent un nombre de victimes sur les routes inférieur à chez nous, aiment à rappeler les associations d'automobilistes qui pointent du doigt une mesure très impopulaire. Selon le délégué général de l'association 40 Millions d'automobilistes, Pierre Chasseray, 80% des Français sont opposés à une limitation à 80 km/h.

Même son de cloche chez les élus locaux. Interrogé par BFMTV, Gérard Dériot, président UMP du conseil départemental de l'Allier, juge que la limitation de vitesse "poussera les automobilistes à doubler les files de camions qu’ils sont obligés de suivre", et que "forcément ça se passera dans de mauvaises conditions". Jean-Marc Belotti, de la Fédération des motards en colère, n'y croit pas non plus et voit une "mesurette" qui ne fera pas gagner tant de vies.

Pour les partisans du 80 km/h, trois tronçons d'expérimentation, c'est toujours cela de gagné. Ils donnent "rendez-vous en décembre quand le gouvernement sera confronté à la sanction des chiffres et qu'il verra que son objectif (moins de 2.000 morts en 2020) sera compromis", prédit Chantal Perrichon. L'expérimentation, quant à elle, devrait durer jusqu'en 2017.