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La série phénomène "Squid Game" fait son retour, en plein chaos politique en Corée du Sud

La série "Squid Game".

La série "Squid Game". - Netflix

Alors que la tentative de loi martiale du président sud-coréen a plongé le pays dans une crise, l'arrivée de la saison 2 de Squid Game et sa critique acide de la société de consommation se teinte d'un nouveau sens.

La première de la saison 2 de la série phénomène sud-coréenne Squid Game est présentée ce lundi 9 décembre. Cette dystopie, critique sanglante du capitalisme et de l'argent fou, aura une résonance toute particulière après l'éphémère loi martiale qui a plongé la Corée du Sud dans le chaos politique.

"Il est extrêmement malheureux et rageant (...) que la nation entière ne puisse pas dormir à cause de circonstances aussi absurdes", a fustigé lundi Hwang Dong-hyuk, réalisateur et auteur de "Squid Game", lors d'une conférence de presse à Séoul.

Six jours plus tôt, le président sud-coréen Yoon Suk Yeol avait proclamé dans la nuit la loi martiale, avant d'être obligé de rétropédaler six heures plus tard par 190 députés ayant réussi à voter contre sa mesure, pendant que des soldats armés tentaient de les déloger du Parlement où ils s'étaient réunis en urgence.

Yoon Suk Yeol a depuis échappé de peu à une motion de destitution et se voit poussé vers la sortie par son parti, qui cherche à gouverner à sa place. L'opposition crie à un "deuxième coup d'État" et a promis de retenter samedi de faire destituer le président, alors que des manifestations massives se profilent.

Dystopie centrée sur une société violente, gangrenée par les divisions et les inégalités, "Squid Game" fait ainsi son retour dans un contexte de tensions bien réelles en Corée du Sud. La sortie mondiale de cette saison 2 est fixée au 26 décembre.

Programme le plus vu du catalogue de Netflix, il est considéré comme l'une des créations sud-coréennes ayant le plus contribué à faire du pays un géant culturel, aux côtés du film oscarisé Parasite et du boys band de K-pop BTS.

Société en crise

Avant que ne soit déroulé le tapis rouge pour la première, Hwang Dong-hyuk s'est dit "abattu" à cause des récents événements. Les Sud-Coréens ont dû "descendre dans les rues et doivent passer le reste de l'année dans l'anxiété, la peur et la dépression", a-t-il déploré.

"Que ce soit par une destitution ou une démission volontaire, j'espère que la personne responsable rendra des comptes aussi vite que possible", a-t-il ajouté.

Nouveaux personnages, nouvelles épreuves

La saison 2 introduira plusieurs nouveaux jeunes personnages, dont un "expert en cryptomonnaies" lourdement endetté et une personne transgenre n'ayant pas les moyens de financer sa chirurgie de transition. Le protagoniste Seong Gi-hun sera lui toujours là, incarné par l'icône de la saison 1, Lee Jung-jae.

Les nouveaux épisodes se dérouleront trois ans après sa victoire finale au "jeu du calmar", qui donne son nom à la série. Et Seong Gi-hun aura la ferme intention de faire tomber les organisateurs de cette compétition en plusieurs épreuves ultraviolentes et mortelles, auxquelles participent des personnages désespérés par leur manque de moyens.

Le soft power coréen mis à mal

La première saison, sortie en 2021, avait donné un énorme coup de fouet au "hallyu", la diffusion rapide de la culture sud-coréenne initiée en 2012 par le succès planétaire de Gangnam Style, du chanteur Psy.

Mais dans un communiqué, plus de 3.000 cinéastes sud-coréens ont estimé que le président Yoon Suk Yeol avait sévèrement mis en péril la croissance culturelle de leur pays:

"Le hallyu est tombé dans les abysses" à cause du président, ont dénoncé dimanche ces professionnels du secteur, parmi lesquels figure Bong Joon-ho, le réalisateur de "Parasite".

"Peu importe le niveau d'imagination cinématographique, ce qui semblait n'être qu'une simple hallucination s'est produit dans la réalité", ont-ils écrit. "Pour les cinéastes sud-coréens, Yoon Suk Yeol n'est plus le président. Il n'est qu'un criminel pris en flagrant délit de trahison".

330 millions de visionnages

La première saison de Squid Game était inspirée - très librement - de la répression en 2009 d'une grève d'employés du constructeur automobile Ssangyong Motor (rebaptisé KGM). Près de 30 personnes sont mortes après l'écrasement du mouvement, certaines s'étant suicidées, d'autres ayant succombé à des maladies.

Cette saison avait mis en avant des personnages marginalisés par la très compétitive société sud-coréenne, dont une transfuge nord-coréenne et un employé criblé de dettes. Elle cumule 330 millions de visionnages, selon Netflix. Pour le réalisateur Hwang Dong-hyuk, ce triomphe tient aux "liens" de la série avec "la société dans laquelle nous vivons".

Dans la deuxième saison, les spectateurs pourront ainsi toujours "trouver des scènes connectées aux conflits absurdes, aux divisions et aux bouleversements qui surviennent dans le pays et dans le monde", a-t-il assuré.

B.P. avec AFP