Libération des otages au Burkina Faso: comment s'est déroulée l'opération?

L'armée française a libéré quatre otages, dont les deux touristes français enlevés le 1er mai au Bénin, dans la nuit de jeudi à vendredi au Burkina Faso, a annoncé l'Élysée ce vendredi. Au cours de l'opération militaire, deux officiers mariniers ont été tués.
Cette opération spéciale a été ordonnée par le Président de la République jeudi en fin de journée, selon des déclarations de l'Élysée. Emmanuel Macron a décidé et suivi son déroulement depuis Sibiu, en Roumanie, où il se trouvait pour un sommet européen.
Une préparation en amont
Lors d'une conférence de presse ce vendredi à 18h, le chef d'état-major français, le général François Lecointre, a déclaré que cette opération de sauvetage des otages français avait été préparée en amont, depuis leur enlèvement le 1er mai, notamment en réunissant des informations et en traquant les ravisseurs. Les renseignement notent qu'ils progressent vers le nord du Burkina Faso, vers la frontière avec le Mali.
Ils alertent alors sur "un risque de transfert de ces otages à une autre organisation terroriste qui agit au Mali, la Katiba Macina". S'ils sont livrés à cette autre organisation, il est probable qu'il "devienne absolument impossible de réaliser une quelconque opération de libération des otages", précise le général Lecointre.
Le groupe d'intervention militaire décide d'attendre une halte des ravisseurs côté burkinabè pour intervenir. Halte qui s'est faite jeudi soir, non loin de la frontière avec le Mali. C'était "sans doute la dernière opportunité" pour une opération de récupération des otages, souligne le chef d'État major.
Comment s'est déroulée l'opération?
Après l'accord du président de la République, l'infiltration du campement des ravisseurs terroristes est lancée. Le Général Lecointre explique que les objectifs des militaires français sont "quatre abris". "Une sentinelle veillait mais n’a pas détecté leur approche".
En revanche, plus proches des abris, les militaires entendent les ravisseurs charger leurs armes. "Ils décident donc de monter à l’assaut sans ouvrir le feu pour être sûrs de ne pas faire de pertes" chez les otages ou des civils potentiellement présents dans le campement.
C'est en pénétrant dans deux abris que les premiers coups de feu ont été tirés par les ravisseurs. C'est à ce moment là que les commandos marine Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello ont été tués, "à très courte distance".
"Les ravisseurs qui tentaient de s’évader ont été abattus. Et les ravisseurs qui ensuite ont engagé le combat, quatre d’entre eux ont été tués", et deux se sont enfuis, a déclaré le général Lecointre.
En plus des deux otages français, les militaires ont également découvert une otage sud-coréenne et une otage américaine sur le campement, "nous n'avions pas connaissance de leur présence", a déclaré Florence Parly.
L'aide des Burkinabés, des Béninois et des Américains
La ministre des Armées Florence Parly a souligné "un véritable exploit, une opération d’une rare difficulté que peu d’armées au monde sont capables de mener", lors de cette même conférence de presse.
Elle a de nouveau salué l'aide des forces armées étrangères. "Les États-Unis ont été cette nuit encore un précieux soutien", a-t-elle déclaré. Elle a également remercié et félicité la "coopération" établie avec les "autorités béninoises et burkinabè".
Il s'agissait d'une "opération d’une très grande complexité, réglée comme de l'horlogerie extrêmement fine", a déclaré le général Lecointre. Il avait déjà salué l'aide des alliés dans un communiqué, déclarant que "cette opération audacieuse" a été "rendue possible par la mobilisation des moyens de Barkhane, l'implication des forces burkinabè et le soutien américain en renseignement".
Quel groupe a enlevé ces otages?
"Il y a trois hypothèses majeures", déclare Vincent Hugeux, spécialiste de l'Afrique et grand reporter à L'Express, sur notre antenne. "L'État Islamique au grand Sahara - déclinaison régionale de Daesh -, le groupe de soutien à l'Islam et aux musulmans", une coalition forgée autour du touareg malien Iyad Ag-Ghali, "ennemi public numéro 1 à Paris". Et enfin un groupe plus local, Ansarul Islam.
"Autour de ces trois piliers gravitent des petits groupes beaucoup moins structurés, pauvres en effectifs, mais qui sont à la lisière du banditisme et du combat idéologique", et pourraient être à l'origine des enlèvements, continue Vincent Hugeux.
Depuis 2014, la France a déployé quelque 4500 hommes au Sahel dans le cadre de l'opération Barkhane qui vise à lutter contre les groupes jihadistes opérant dans la région et au Sahara.