Face à l'Etat islamique, que peuvent faire les Etats-Unis?

Des images diffusées le 30 juin 2014 montrent des jihadistes de l'Etat islamique parader dans les rues de Raqqa, en Syrie. - Welayat Raqa - AFP
Les Etats-Unis se disent désormais prêts à agir en Syrie contre les jihadistes de l'Etat islamique, en plus des frappes aériennes menées contre les insurgés en Irak. Pour Barack Obama, le groupe islamiste, qui s'est emparé de pans entiers de territoire en Syrie et en Irak, est un "cancer". Comment les Américains peuvent-ils opérer pour parvenir à stopper l'avancée des jihadistes? Eléments de réponse.
Intensifier les frappes aériennes?
En deux semaines, le Pentagone a procédé à 93 frappes contre des cibles dans le nord de l'Irak pour protéger le personnel américain et aider les peshmerga kurdes et l'armée irakienne. Mais si Washington entend venir à bout de l'Etat islamique, les bombardements aériens devraient s'intensifier.
"Ce qu'il faut, c'est une intense campagne de bombardements. L'utilisation de la force aérienne doit ressembler à une tempête et non à une ondée", explique le général David Deptula, retraité de l'armée de l'Air. "C'est une opération de grande envergure, 24 heures sur 24 heures, 7 jours sur 7. La pression des forces aériennes doit être constante pour pouvoir stopper l'avancée (des jihadistes), les paralyser et les mettre hors service".
Selon lui, le Pentagone pourrait reproduire sa stratégie appliquée en Afghanistan, lorsqu'il bombardait les talibans depuis les airs, permettant à l'Alliance du Nord de progresser au sol.
> Des troupes de combat au sol?
Les Etats-Unis ont environ 850 soldats en Irak pour épauler les peshmerga et les forces irakiennes et protéger les Américains. Mais, deux ans et demi après le retrait du dernier soldat américain, Barack Obama exclut d'envoyer des troupes de combat au sol. "La stratégie à long terme va consister à envoyer des troupes au sol pour combattre l'Etat islamique -des troupes irakiennes et kurdes", a encore souligné vendredi Ben Rhodes, le conseiller adjoint à la sécurité nationale du président américain.
> Intervenir en Syrie?
Les jihadistes font fi de la frontière entre l'Irak et la Syrie. Comme l'a dit le chef d'état-major interarmées américain, le général Martin Dempsey, l'Etat islamique "peut-il être vaincu sans que l'on s'attaque à sa branche installée en Syrie? La réponse est non". Ben Rhodes a d'ailleurs laissé la porte ouverte à l'option syrienne, puisque "nous ne nous sentons pas limités par les frontières".
Pour Anthony Cordesman, du Center for International and Strategic Studies, Washington n'aurait pas de mal à justifier une intervention en Syrie. "En invoquant la Charte des Nations unies, on peut clairement prouver que le gouvernement syrien ne protège pas la Syrie et que (Washington) est en état de légitime défense", après l'exécution du journaliste américain James Foley.
> Quels alliés?
Les Etats-Unis ne sauraient venir à bout de l'Etat islamique à eux seuls, pour la seule raison que les conflits en Irak et en Syrie impliquent à divers degrés tous les voisins de ces deux pays: la Turquie, l'Iran, le Liban et les pays du Golfe. Certains jugent ainsi que la Turquie, alliée de Washington au sein de l'Otan, laisse les candidats au jihad passer trop facilement en Syrie. Du coup, Zalmay Khalilzad, qui a été ambassadeur des Etats-Unis en Irak, juge dans The National Interest que Washington "devrait promouvoir une coopération englobant l'Iran, la Turquie et l'Arabie saoudite".
Les alliés européens de Washington ont quant à eux cautionné la semaine dernière les livraisons d'armes aux combattants kurdes.
> Quel rôle pour les Irakiens sunnites?
Les arabes sunnites représentent environ 20% de la population irakienne et se sentent stigmatisés par le pouvoir chiite, poussant certains à tolérer les exactions de l'Etat islamique. Depuis la nomination de Haïdar al-Abadi à la tête du gouvernement, Washington n'a de cesse de l'appeler à répondre aux doléances de toutes les minorités. L'idée est de pousser les sunnites à rejeter les jihadistes en leur "donnant du pouvoir et en partageant les revenus" du pétrole avec eux, explique Anthony Cordesman.