Rencontre Trump-Kim: pourquoi les Américains attendaient ce sommet?

Les américains ont suivi la rencontre entre Donald Trump et Kim Jong-un, notamment sur Times Square à New York. - Don Emmert - AFP
Ils ont vécu cette rencontre comme un spectacle. Il était 18 heures sur la côte Ouest des Etats-Unis, 21 heures sur la côte Est quand toutes les chaînes d'information américaines ont retransmis l'image, qualifiée d'historique, de leur président serrant la main, pour la première fois pour un chef d'Etat américain en exercice, du leader de la Corée du Nord. Ce sommet, organisé à Singapour, s'est conclu sur la signature d'un document commun dont le contenu reste flou.
"Le monde va voir un changement majeur", a promis Kim Jong-un au terme de cette rencontre alors que la Corée du Nord s'est engagée derrière un principe de dénucléarisation complète.
Les Américains pour cette rencontre
Près de 3 Américains sur 4 s'étaient prononcés favorables à cette rencontre, et notamment ceux qui résident sur la côte Ouest des Etats-Unis qui sont à portée des missiles intercontinentaux. Alors que Donald Trump avait annoncé ne pas s'être préparé spécialement à ce sommet, ses concitoyens ont vécu dans le suspens d'un accord. "Ils ont suivi ce sommet comme une émission de téléréalité, rapporte Jean-Bernard Cadier, correspondant à Washington de BFMTV. Ils voulaient voir si Donald Trump allait réussir son défi. Les Américains, qui ont peur des fusées intercontinentales, sont soulagés mais ils seront très attentifs aux détails."
"Les Américains sont plus nombreux à craindre l'arme nucléaire nord-coréenne que les Coréens du Sud", complète François Durpaire, historien, et consultant Etats-Unis sur BFMTV.
Dans ce document commun, Kim Jong-un s'est engagé à une dénucléarisation complète de la péninsule coréenne, sans donner plus de détail. Et si les Etats-Unis ont promis des "garanties de sécurité", certains regrettent déjà que l'accord ne précise pas que la dénucléarisation doit être "vérifiable et irréversible". "La grosse interrogation c’est de savoir ce qu’en échange les Etats-Unis vont donner comme garanties au régime nord-coréen, insiste Juliette Morillot, journaliste et historienne spécialiste de la Corée. C’est plutôt cela la grosse interrogation."
Mettre fin à la guerre de Corée
L'enjeu de ce sommet pourrait être alors qu'une étape. Les deux leaders ont parlé de "tourner la page du passé". Lors d'une conférence de presse, le président américain a annoncé que la guerre de Corée, inachevée, allait enfin prendre fin. "1953, c'est une guerre oubliée, ce n'est pas la plus importante, mais c'est la première guerre d'un type nouveau, une guerre qui n'est jamais totalement gagnée", rappelle François Durpaire, faisant référence à ce conflit qui a opposé les deux Corée, soutenue chacune soit par l'Occident, soit par la Chine.
"C'est une guerre qui a une signification particulière pour les Américains et si lui, Donald Trump, parvient à résoudre ce conflit, il entre directement dans les manuels d'histoire", poursuit-il.
32.000 soldats américains sont toujours stationnés en Corée du Sud. Une paix nucléaire entre les deux Etats pourraient, si l'accord arrive à son terme, entraîner leur retrait, ce que souhaitent une majorité de citoyens américains. "C'est pas dans l'équation", a toutefois avancé le président américain.
"Gagnant-gagnant"
Ces derniers mois, les noms d'oiseau ont volé entre les deux dirigeants. Les "fou qui affame son peuple", "psychopathe", "vieux sénile" ou "petit gros" ont été remplacés par des "fantastique", "relation formidable" ou "travail en harmonie". "On est vraiment dans quelque chose de gagnant-gagnant des deux côtés", tranche François Durpaire. Kim Jong-un, par cette rencontre et cet accord, pourrait faire bénéficier à son pays d'une ouverture économique pour en faire un Etat prospère.
Donald Trump, dont la cote de popularité a légèrement grimpé ces dernières semaines, pourrait toutefois avoir réussi le plus grand coup de sa carrière. "Le président américain va certainement annoncer que c’est un grand succès, estime Jean-Bernard Cadier. Là où il a raison, c’est qu’il a réussi à faire sortir Kim Jong-un de sa tanière."
"C’est la prime à la pression maximale. Cet homme qui, il y a quelques mois, se disait prêt à détruire ce pays, aujourd’hui il montre un geste fort", conclut François Durpaire. 18 Républicains au Congrès ont d'ores et déjà réclamé le Prix Nobel de la paix pour Donald Trump.