Aires marines protégées, chalutage de fond... Les enjeux du sommet mondial des océans qui s'ouvre à Nice

Le président français Emmanuel Macron (au centre) tient une photo alors qu'il visite le centre d'exposition "La Baleine" un jour avant l'ouverture de la troisième Conférence des Nations Unies sur les océans (UNOC) - Laurent Cipriani / POOL / AFP
Emmanuel Macron est arrivé dimanche à Nice pour accueillir les dirigeants de la planète à la veille d'un sommet de l'ONU sur les océans où il entend "mobiliser", en particulier contre l'"énorme erreur" de ceux tentés de "se détourner du combat climatique".
Ce sommet mondial des océans, qui s'ouvre ce lundi 9 juin, doit se tenir jusqu'au 13 juin, en présence d'une soixantaine de chefs d'État et de gouvernement.
"C'est l'occasion de sonner la mobilisation générale", a assuré Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, sur BFMTV. "Les océans, on ne peut pas vivre sans eux", a-t-elle martelé, pointant leur rôle "essentiel" dans la production d'oxygène et de nourriture.
Exploitation minière des fonds marins, traité international sur la pollution plastique et régulation de la surpêche et de la pêche illégale... Les enjeux de cette troisième conférence de l'ONU sur les océans (Unoc3) sont nombreux.
• Renforcer la protection des aires marines protégées dans le monde
La création de nouvelles aires marines protégées (AMP) devrait être annoncée à Nice par plusieurs gouvernements, ce qui pourrait permettre d'atteindre 10% de protection au niveau mondial (contre 8,36% aujourd'hui), selon le cabinet de la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher.
La communauté internationale s'est fixée un objectif de 30% de protection en 2030 (objectif "30X30"). Mais au rythme actuel, cet objectif ne sera pas atteint avant 2107, selon Greenpeace.
Au-delà de la quantité, la protection doit également être de meilleure qualité, estiment les ONG, car de nombreux pays n'imposent pratiquement aucune règle au sein de leurs parcs marins, autorisant par exemple le chalutage de fond, une pratique de pêche jugée destructrice.
Au niveau mondial, seulement 2,7% de l'océan bénéficie des plus hauts niveaux de protection, un chiffre qui tombe à 0,1% pour les eaux de France métropolitaine.
• Limiter le chalutage de fond
Autre enjeu: le chalutage de fond. Mis en lumière dans le film "Ocean" du Britannique David Attenborough, cette pratique est critiquée pour son impact carbone et les dommages qu'il engendre sur les habitats marins sensibles (herbiers, coraux, etc.).
Mis sous pression par les ONG, Emmanuel Macron a annoncé samedi 7 juin à la presse régionale une limitation du chalutage de fond dans certaines aires marines protégées (AMP) afin de mieux protéger les écosystèmes. Il a admis que cette technique de pêche, qui râcle le fond de la mer, "vient perturber la biodiversité et des écosystèmes qu'il faut apprendre à protéger".
Le chalutage de fond a été pratiqué pendant 17.000 heures dans les aires marines protégées françaises en 2024, selon un rapport publié en mai par Oceana, qui appelle à bannir la pratique.
Les ONG restent toutefois sceptiques. "Il y a un tout petit peu de progrès sur la formulation: le chalutage de fond a pris la place qu'il mérite" dans la communication gouvernementale, a souligné auprès de l'AFP François Chartier de Greenpeace. Cependant, "on a l'impression qu'il annonce qu'il ne va rien annoncer", a-t-il ajouté, déplorant le "peu d'ambition" des déclarations du président.
Quant aux chalutiers, ils dénoncent des mesures qui mettraient fin à leurs activités. "S'ils appliquent ce qu'ils veulent, le chalutage en Corse est fini. On espère qu'il y aura des compensations, parce qu'on n'a plus d'avenir", explique à BFMTV Philippe, chalutier sur l'île de Beauté.
"Avant, la pêche c'était un métier de liberté, maintenant c'est un métier de contrainte."
• Protéger la haute mer
Un des points-clés pour atteindre l'objectif 30X30 est la ratification du traité sur la Haute Mer, signé par 110 Etats en 2023, qui doit permettre de mieux protéger la vie marine dans les eaux internationales (au-delà de 200 milles marins - 370 km - des côtes).
À ce jour, 32 pays et l'Union européenne l'ont ratifié et d'autres pourraient le faire la semaine prochaine, alors que la France espérait réunir 60 ratifications à Nice pour permettre une entrée en vigueur du traité dès 2026. Paris entend désormais atteindre ce chiffre avant la fin de l'année 2025.
• Exploiter les abysses
La France devrait profiter du sommet pour tenter de convaincre plus de pays de rejoindre la coalition en faveur d'un moratoire sur l'exploitation des grands fonds marins, qui rassemble actuellement 33 pays seulement.
Un élargissement de cette alliance enverrait un signal au président américain Donald Trump, qui a décidé unilatéralement d'autoriser cette pratique dans les eaux internationales du Pacifique.
Toute annonce sera également surveillée de près à l'approche de la prochaine réunion, en juillet, de l'Autorité internationale des fonds marins (AIFM), qui travaille depuis des années sur l'élaboration d'un code minier. Ce texte doit établir les règles d'extraction commerciale de minéraux convoités pour la transition énergétique tout en préservant les fonds marins, classés "biens commun de l'humanité".