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Défense

L'Ukraine obtient de l'Occident toujours plus d'armes puissantes, mais pas d'avions "modernes"

A l'occasion de la visite de Volodimyr Zelensky dans plusieurs capitales européennes, un point sur les principales livraisons d'armes occidentales à l'Ukraine qui se sont accélérées depuis janvier 2023.

Les récentes livraisons à Kiev de chars occidentaux et de roquettes longue portée illustrent la manière dont les Occidentaux s'adaptent aux besoins de l'Ukraine et aux évolutions du champ de bataille depuis l'invasion russe en février 2022. Retour sur près de 15 mois de livraisons de matériels à l'Ukraine.

• Les armes légères, les premières envoyées sur le terrain

Le 24 février 2022, le président russe Vladimir Poutine lance l'invasion de l'Ukraine. Les troupes russes réalisent une progression éclair dans l'est et tentent d'encercler Kiev.

Rapidement, les Ukrainiens bénéficient de premières livraisons d'armes par l'Occident. Entre février et mars 2022, ils reçoivent plus de 40.000 armes légères, 17.000 manpads - systèmes portatifs de défense sol-air - ainsi que de l'équipement (25.000 casques, 30.000 gilets pare-balles), selon les données du Kiel Institute qui recense depuis le début de la guerre les armes promises et livrées à l'Ukraine.

Dans l'urgence, ces armes et équipements légers sont faciles à livrer, à prendre en main et à déplacer sur le champ de bataille. Plus aucun chiffre n'a été communiqué suite à cette toute première vague de livraisons, mais il y a fort à parier que les livraisons se sont poursuivis jusque maintenant.

• Des obusiers et lance-roquettes, dont une trentaine de canons Caesar

Face à une farouche résistance à Kiev et à Kharkiv, deuxième ville du pays, l'armée russe s'est retirée fin mars 2022 pour concentrer ses efforts sur les territoires du Donbass et du sud. Commencent alors en avril les livraisons d'artillerie (obusiers, lance-roquettes...), capables de frapper derrière les lignes ennemies pour atteindre les stocks de munitions et bloquer les chaînes logistiques russes.

Sont livrés jusqu'à l'automne 321 obusiers, dont une trentaine de canons Caesar français (dont 19 danois), 120 véhicules d'infanterie, 49 lance-roquettes multiples, 24 hélicoptères de combat, plus de 1000 drones américains.

• De la défense sol-air livrée notamment par les Américains

Malgré son repli, la Russie lance des vagues de frappes aériennes (missiles et drones kamikazes) sur les infrastructures énergétiques, les centres urbains, bien au-delà du front. Pour aider les Ukrainiens à y faire face, les pays occidentaux livrent des systèmes de défense anti-missiles, Etats-Unis, Royaume-Uni et Espagne en tête. Washington finit par accepter de livrer son très réputé système de missiles sol-air moyenne-portée Patriot.

• Plus de 200 chars et blindés légers

A partir de fin 2022, une guerre de tranchées s'installe dans l'est et l'Ukraine craint une offensive majeure russe avec l'arrivée des mobilisés. 280 chars de fabrication soviétique que l'armée ukrainienne a l'habitude d'utiliser sont envoyés principalement par la Pologne. Kiev -qui ne disposait que de chars de fabrication soviétique- en avait perdu beaucoup.

Le président ukrainien insiste pour obtenir des chars lourds et modernes occidentaux, longtemps réclamés pour prendre l'initiative et sortir de la guerre d'usure. Elle les obtient. Plusieurs pays occidentaux promettent fin janvier d'en livrer: Washington annonce des chars Abrams (toutefois pas disponibles avant l'automne 2023), Londres des Challenger 2, Berlin des Leopard 2, réputés parmi les meilleurs du monde. Le feu vert allemand permet par ailleurs à d'autres pays de promettre des Leopard 2.

"Les Ukrainiens disposent des capacités dont ils ont besoin pour reprendre davantage de territoires", estimait fin avril le chef de l'Otan Jens Stoltenberg, selon qui 230 chars occidentaux ont déjà été livrés.

• Des missiles longue-portée et supersoniques

En janvier 2023, Kiev a demandé à ses alliés de lui fournir des roquettes et des missiles d'une portée de plus de 100 kilomètres. Jusque là, ils disposaient de systèmes efficaces, mais d'une portée inféireure omme les redoutables systèmes américains HIMARS (portée de 80 kilomètres) ou leur équivalent français, des lance-roquettes unitaires (LRU) qui atteingnent environ 70 kilomètres. La France a également envoyé des Crotale, un équipement anti-aérien de moyenne portée.

La France et l'Italie ont ensemble fourni un système Mamba SAMP-T (Thales) équipé de missiles de moyenne portée Aster-30 (MBDA). Conçue pour faire face à des attaques de missiles (croisière ou balistique), engager des avions de chasse ou de drones, le Mamba est une arme supersonique (mach 4,5) capable d'atteindre une cible à plus de 100 km.

L'armée ukrainienne dispose désormais de roquettes (150 kilomètres) qui selon des affirmations russes non démenties par Kiev ont été fournies par les Etats-Unis.

Le Royaume-Uni a annoncé l'envoi de missiles Storm Shadow, qui peuvent frapper à plus de 250 kilomètres. L'Ukraine juge ces munitions cruciales pour mener sa contre-offensive et menacer des positions russes loin derrière les lignes de front.

• Et demain, des avions de combat?

Alors que se dessine cette contre-offensive, le président ukrainien Volodymyr Zelensky étoffe son arsenal lors d'une tournée européenne: Londres, où il se trouve ce lundi, lui promet des centaines de missiles anti-aériens et de drones d'attaque, Paris des véhicules blindés et des chars légers, et Berlin un nouveau plan d'aide militaire de 2,7 milliards d'euros.

En février dernier, Kiev a dévoilé son ambition de constituer deux escadrons de 12 avions de combat, soit un total de 24 appareils. La Pologne et la Slovaquie ont décidé de fournir des MiG-29, mais pour défendre le ciel ukrainien, Volodimyr Zelensky réclame surtout des avions de combat modernes, comme des Rafale, des Eurofghters, des Tornado ou des F-16.

Olaf Scholz a fermement répondu que "la question des avions de combat ne se pose même pas". C'est un "non!" pour Joe Biden qui incite les pays de l'Otan disposant d'appareils russes à les céder à Kiev. Le Premier ministre britannique, Rishi Sunnak, est sur la même ligne que Washington en ne s'opposant pas à ce que d'autres Etats en envoient.

En France, la position est plus nuancée. Questionné sur cette possibilité lors d'un déplacement aux Pays-Bas en février dernier, Emmanuel Macron a prudemment répondu que "rien n’est interdit par principe". Le président français a mis un veto sur les Rafale, mais pas sur les Mirage 2000 qui sont peu à peu retirés des unités françaises en cours de modernisation.

Du "personnel militaire aérien" de l'armée ukrainienne a été formée à Mont-de-Marsan et Nancy par l'armée de l'Air et de l'Espace. Ces équipages ont reçu une formation "à la défense sol-air et à la survie au cas où leur appareil serait abattu" avait précisé le délégué adjoint à l'information et à la communication de la défense, le général Yann Gravêthe.

Pascal Samama avec AFP