"Ça constituerait un choc inédit": quel sera l'impact des taxes de Trump sur les entreprises françaises? (selon le service des douanes, 2.000 seraient touchées)

Des conteneurs sur le port du Havre, le 21 janvier 2021. - Sameer Al-DOUMY © 2019 AFP
La hausse des droits de douane aux États-Unis "sera plus difficile pour les industries de fabrication de matériel de transport (construction aéronautique et navale) et par ailleurs pour les microentreprises et pour les entreprises indépendantes", indique une étude du service statistique ministériel des douanes, publiée ce vendredi 25 juillet.
Les États-Unis appliquent actuellement des taxes de 10% sur les produits européens, sauf pour les automobiles (25%), l'acier et l'aluminium (50%). L'UE a entamé des discussions avec Donald Trump, espérant que ce taux serait abaissé mais le président américain reste inflexible.
Ces derniers jours, plusieurs sources dont un porte-parole de la Commission européenne ont indiqué que la conclusion d'un accord était imminente.
Ce dernier pourrait toutefois prévoir des droits de douane à 15%.
Un marché de 49 milliards d'euros
Le document des douanes analyse de manière précise les effets attendus. Il rappelle que les États-Unis sont le deuxième client des entreprises françaises, après l'Allemagne, avec des exportations d'une valeur de 48,6 milliards d'euros en 2024.
2.000 entreprises françaises y réalisent plus de 10% de leur chiffre d'affaires.
L'essentiel de ces flux sont réalisés par des grandes entreprises ou des entreprises de taille intermédiaire, même si des TPE-PME sont également concernées. Le service interministériel des douanes relève la plus forte vulnérabilité de ces petites entreprises.
"Les capacités à absorber les chocs sont plutôt moins favorables et surtout très hétérogènes dans les petites structures", indiquent les douanes.
Celles-ci précisent que l'impact d'une hausse des droits de douane de 10% est trois fois plus importante sur les taux de marge des petites entreprises indépendantes que pour la moyenne.
L'industrie du transport très exposée
Les exportateurs français vers l'Amérique agissent principalement dans l'industrie, et plus particulièrement "dans les secteurs de la construction aéronautique, de la fabrication de parfums, de préparations pharmaceutiques et de vins effervescents" relève le service des douanes.
Logiquement, ces secteurs sont les plus exposés à l'augmentation des droits de douane. L'aéronautique et la construction navale sont les activitées les plus menacées, comme l'avait déjà relevé une étude du Cepii (Centre d'études prospectives et d'informations internationales).
L'ampleur des dégâts dépendra évidemment du taux qui sera appliqué par les États-Unis.
Les douanes relèvent qu'une hausse de 10% "reste d’un ordre de grandeur comparable aux fortes fluctuations récentes qu’a pu connaître le cours de l’euro/dollar".
Au contraire, un taux de 30%, brandi comme menace par Donald Trump, "constituerait un choc inédit".
Dans l'hypothèse la plus probable désormais d'une hausse contenue par un accord commercial, en retenant des droits de douane additionnels de 10% légèrement inférieurs à ce qui pourrait arriver, les douanes anticipent une baisse de 3,8 points du taux de marge de l'industrie des transports (hors automobile) contre 0,6 point pour la moyenne des exportateurs.
Leur taux de marge, évalué en moyenne à 30,2% actuellement, tomberait à 26,4%, soit un niveau légèrement inférieur au taux de marge moyen des entreprises françaises (27,9%).
Par contre, si les droits de douane bondissaient à 30%, en cas d'échec des négociations, leur taux de marge serait amputé de 12,8 points.
Dans ce cas, ces entreprises devraient s'acquitter de 3,5 milliards d'euros de tarifs douaniesr (contre 1,2 milliards d'euros avec des droits de douane additionnels de 10%) et leur niveau de rentabilité serait vraisemblablement très affecté.
Les boissons et le cuir moins en danger
Si l'on s'en tient à cet indicateur, les effets seraient plus limités pour le secteur du luxe, où les marges sont également plus élevés. Ainsi, dans l'hypothèse la plus probable d'un taux additionnel de 10%, les marges des fabricants de boissons diminueraient de 59% à 57,2%, et celles des industriels du cuir de 58,4% à 57,3%.
Les dégâts seraient également plus contenus dans l'industrie pharmaceutique (2,8 milliards d'euros d'exportations vers les États-Unis).
Même dans l'hypothèse de droits de douane à 30%, leur taux de marge -actuellement de près de 50%- ne serait réduit que de 2,9 points. Dans l'option de barrières douanières à 10%, ce taux de marge passerait de 49,5% à 48,6% (-0,9 point).