"Ça ne passe pas, c'est aussi simple que ça": le patron de Dassault très inquiet pour ses jets d'affaires, les droits de douane de Trump lui fermeraient le marché américain

Le Falcon 6X de Dassault Aviation. - EMMANUEL DUNAND / AFP
Il est dans l'expectative et préoccupé: le PDG de Dassault Aviation Éric Trappier s'est dit inquiet de l'impact que pourrait avoir la guerre commerciale lancée par Donald Trump, sur le secteur de l'aviation d'affaires.
"Pour nous c'est une inquiétude, puisque toute taxation supplémentaire d'avions français vers les États-Unis serait de nature, une fois de plus, à aggraver les problématiques de compétitivité de nos avions face aux concurrents américains", a déclaré Éric Trappier lors de la présentation des résultats semestriels.
Sur le segment de l'aviation d'affaires, le constructeur français affiche une performance légèrement inférieure par rapport à l'année passée, ayant enregistré huit prises de commandes au premier semestre, contre 11 en 2024.
"Il n'y a pas de doutes, il y a un impact des droits de douane", a indiqué le patron de Dassault Aviation, qui doit également gérer des difficultés liées à la chaîne d'approvisionnement chez les sous-traitants.
Le constat est clair: "la compétitivité est en faveur des États-Unis et cette compétitivité sera encore dégradée si on doit absorber des droits de douane. Nos marges opérationnelles sont à 6%, donc des droits de douane, même à 10%, ça ne passe pas, c'est aussi simple que ça", indique Éric Trappier.
Le PDG en appelle au retour des accords de 1979, à savoir une absence de taxation réciproque pour l'aéronautique civile, un souhait partagé par l'ensemble du secteur.
"On n'est pas toujours d'accord, mais on est tous unis (sur cette question)", a-t-il rappelé.
La perte de compétitivité en cas d'instauration de droits de douane, qu'ils soient de 10, 15 ou 30%, fermerait le marché américain à Dassault Aviation, alors que "plus de la moitié du marché" de l'aviation d'affaires se fait aux États-Unis.
Envisager tous les scénarios possibles
L'avionneur indique travailler sur les différents scénarios qui pourraient se profiler à partir du 1er août et étudie toutes les options possibles, sans dévoiler ses plans. "On verra ce qui arrive", temporise Éric Trappier, alors que l'Union européenne pourrait se voir imposer 15% de droits de douane et menace de mettre en vigueur un paquet de contre-mesures si aucun accord commercial n'est trouvé avec l'administration Trump.
Parmi les options qui pourraient être envisagées, l'installation d'une usine de production aux États-Unis.
"C'est la question que tout le monde se pose, y compris nous", déclare Éric Trappier.
Dassault Aviation dispose d'ores et déjà d'une usine de finitions aux États-Unis, à Little Rock (Arkansas), qui réalise l'aménagement intérieur des avions Falcon (sièges, meubles, systèmes de communication, peinture…). Si le constructeur était seulement taxé sur la partie "européenne" de l'avion – donc pas les travaux réalisés à Little Rock – cela représenterait tout de même une partie importante du prix de l'avion.
"Ça va quand même sacrément augmenter les coûts, et donc le prix de l'avion. Ça nous mettra en position un peu plus difficile", craint le patron de Dassault Aviation.
Un segment en pleine transition
La flotte Falcon destinée au marché de l'aviation d'affaires comprend actuellement quatre appareils: le Falcon 900LX, le Falcon 2000LXS, le Falcon 8X et le Falcon 6X, dernier-né de la gamme, qui a effectué plus de 3 400 heures de vol depuis sa mise en service fin 2023. Le constructeur développe actuellement un nouvel avion pour élargir sa gamme, le Falcon 10X: "Nous sommes dans une phase intermédiaire, toujours délicate", souligne Éric Trappier.