BFM DICI
bfmdici

Mort d’Émile: des habitants du Vernet prêts à fournir leur ADN "si c'était demandé"

placeholder video
Alors que les enquêteurs établissent un important travail de recoupage des ADN, des habitants du Vernet se disent prêts à fournir le leur si cela est nécessaire. "Je serai le premier à le faire si c’était demandé" réagit François Balique, le maire du Vernet.

15 mois. Les enquêteurs de la Section de Recherches (SR) de Marseille travaillent maintenant depuis 15 mois pour tenter d’expliquer la disparition puis la mort du petit Émile sur la commune du Vernet (Alpes-de-Haute-Provence). Parmi les actes d’investigation qui occupent ces militaires, il y a un important travail de recoupage sur des ADN.

Selon nos informations, une "trace" étrangère à celle de la famille a été découverte par les équipes du professeur Christian Doutremepuich et le laboratoire d'hématologie médico-légale de Bordeaux lors des récentes expertises menées sur les ossements et les vêtements de l'enfant.

Le procureur de la république d’Aix-en-Provence, Jean-Luc Blachon, ne souhaite "ni confirmer, ni infirmer" cette information et en appelle "au respect du secret de l’instruction".

"Attention aux corrélations hâtives"

Cette "trace" peut être un élément important ou totalement insignifiant. En somme, c’est un élément fragile et les enquêteurs le savent. Selon nos informations, la section de recherches de Marseille continue de travailler comme d'habitude, pas à pas, et sans se mettre une pression néfaste.

Le travail sur l’ADN "n’est qu’un acte banal et qui n’a pas de sens en tant que tel" explique une source qui suit de près le travail des enquêteurs mobilisés sur le dossier. "Ils n’ont pas encore fini leurs expertises et contre-expertises, (...) ils ont encore pas mal de travail là-dessus. C'est pour ça qu'il faut être prudent. Attention aux corrélations qui seraient abusives et qui n'ont rien de certain. Il faut éviter de jeter l'opprobre sur quelqu'un ou de créer une situation qui pourrait être compliquée localement" conclut-elle.

"Localement", c’est donc au Vernet que ça se passe. Récemment, des habitants ont encore été auditionnés par les gendarmes. La plupart des villageois rencontrés aimeraient savoir exactement ce que les expertises pratiquées sur les ossements et les vêtements ont révélé. Sont-ils prêts à fournir leur ADN si la justice l’exige? 

Émile Louis : les mystères du cimetière - 06/10
Émile Louis : les mystères du cimetière - 06/10
11:49

"Si les juges le demandent, il faut s’y plier. Je serai le premier à le faire si c’était demandé pour que cela aide à fermer les portes afin de percer ce mystère qui dure. Si cela disculpe et met hors de cause les habitants un par un, il faut évidemment le faire", déclare François Balique, le maire du Vernet.

"Tout le monde devient suspect"

Lui comme ses administrés n’ont jamais fourni leur ADN. "Je ne comprends absolument pas pourquoi cela n’a jamais été fait jusqu’à présent" se demande maître Isabelle Colombani, l’avocate des grands-parents du petit Émile.

Un magistrat qui connaît parfaitement le dossier répond: "Si nous n'avons pas de base de comparaison, aucune trace relevée, je ne vois pas l'intérêt. Et puis, prendre quel ADN, celui de tout le Vernet? Tout le Haut-Vernet? Que la famille?", se demande-t-il.

Et de craindre le pire en termes de suspicion: "C’est lourd et très connoté, car dès qu'on prélève, tout le monde devient encore suspect. Bonjour l'ambiance dans le village et bonjour le tintamarre médiatique derrière. Après 'la famille est coupable', 'le village est coupable', je trouve qu'en opportunité, c'est doublement contre-indiqué".

Les habitants prêts à donner leur ADN

De leur côté, les habitants se disent prêts à collaborer rapidement s’il le faut. Pour enfin savoir. "Au village, tout le monde attend. On se demande pourquoi l'enquête ne bouge pas plus vite. Pour ma part, j'attends le résultat, mais j'ai un peu peur de la réponse. Elle sera peut-être dure à accepter", craint Gilles, un villageois qui ne rate rien des derniers rebondissements de l’affaire.

"C'est normal qu'on demande l'ADN aux gens du village. Je ne vois pas pourquoi ça devrait déranger quelqu'un. Du moment qu’on n’a rien à se reprocher, pourquoi refuser? À mes yeux, ça aurait déjà dû être fait", conclut l’habitant.

Un voisin qui souhaite rester anonyme ne dit pas autre chose. "S'ils veulent mon ADN, ce n'est pas un problème. Je comprends qu'il y ait des gens qui refusent, c'est leur avis. Moi, je n'ai rien à voir avec tout ça", soupire le villageois, qui estime que les habitudes au Vernet n’ont pas changé.

"Ici, on en voit beaucoup, des petits gamins, qui se baladent tout seul. Avec des petits vélos sans pédale. On en voit passer et il n'y a personne avec eux. On se demande comme ça se fait et on nous répond 'c'est le village; ici, ça ne craint pas'".

"Pourquoi refuser?"

Ce village, Christian le connaît bien puisqu’il fait partie de l’une des plus vieilles familles de la vallée. "Si les enquêteurs décident de mener des recherches parmi les villageois, bien évidemment, il faudra donner notre ADN. Il faut qu'elle sorte, cette histoire. Au plus vite ça va sortir, au mieux ce sera pour nous, au village, et pour la famille".

Tous les villageois pensent-ils comme lui? Christian n’en sait rien. Mais il prévient: "les gens qui vont s'opposer à ce qu'on prenne leur ADN s'engagent dans une mauvaise pente. Pourquoi refuser? C'est sûr, on sera fichés pour d'autres affaires aussi." 

Pour lui, l’ambiance entre les habitants ne s’est pas vraiment dégradée. "Beaucoup de gens disent qu'il y a des suspicions au sein du village, je ne suis pas d'accord. Il n'y a pas une soirée pendant laquelle on n'en parle pas, c'est vrai. Mais on se pose des questions sur ce qu'il a pu se passer. On ne se pose pas de questions sur untel, untel... C'est peut-être pour ça qu'il y a toujours une bonne ambiance" conclut Christian.

Lui, comme tous les habitants croisés cette semaine au Vernet, sont en tout cas prêts à collaborer rapidement avec la justice si cela pouvait enfin permettre aux enquêteurs de percer un mystère qui n’a que trop duré.

Valentin Doyen et Estelle Hottois