"C'est comme une drogue": plongée dans l'univers des Sneakersaddicts

Le salon Sneakerness se déroule ces samedi et dimanche à l'espace 104 de Paris. - Jérémy Maccaud - BFMTV
Prendre son pied en achetant une paire de baskets. C'est avec cette idée en tête que convergent ce week-end plusieurs centaines de passionnés de baskets au Centquatre, à Paris, pour la deuxième édition francilienne du Sneakerness: un salon consacré entièrement à ce type particulier de chaussures, où des milliers de paires s'étalent sous les yeux d'un public extrêmement averti.
Ces accrocs s'appellent les sneakersaddicts et ils viennent de toute la France et d'Europe pour l'occasion. Pour le plaisir des yeux ou pour investir jusqu'à 1.000 euros dans une simple paire, tous possèdent leur propre vision de leur passion. BFMTV.com vous propose de découvrir leur(s) univers.

James, "la performance" et Michael Jordan
Pour James, tout a commencé grâce à un certain Michael Jordan, le plus grand basketteur de tous les temps. "Ce mec a fait le basket, et les baskets", explique ce Parisien du 20e arrondissement, en référence aux célèbres Air Jordan de Nike, vendues à plusieurs dizaines de millions d'exemplaires à travers le monde.
"On s'identifie à des icônes, à des personnes qui ont construit quelque chose grâce à leur talent", évoque-t-il. "Jusqu'à acheter des pompes qui leur ressemblent."
Cette utilisation iconique s'illustre aussi par la récente collaboration entre le rappeur Kanye West et Adidas, et la mise en vente des Yeezy Boost 350 Black. Vendues 200 euros la paire le jour de leur sortie, totalement épuisées en quelques heures, certains modèles se négocient ce samedi entre 500 et 1.000 euros. James fait partie de ces potentiels intéressés.
"Les sneakers c'est comme la bourse"
Si notre interlocuteur est capable de dépenser autant d'argent dans une simple paire de chaussures, c'est parce qu'il connaît parfaitement son sujet. Et notamment la façon dont évoluent les prix d'une basket à une autre. "C'est un peu comme la bourse", s'amuse-t-il. Bien informé, James a une idée très précise de le cote qui va accompagner la sortie d'une nouvelle paire.
"On se rend vite compte qu'en achetant deux paires, on peut facilement se faire rembourser la première en revendant la seconde", poursuit-il. "On peut commencer à se faire un peu d'argent en achetant trois ou quatre fois le même modèle." Jusqu'à pouvoir en vivre? "Non", tranche-t-il, "c'est possible, mais trop compliqué."
Mais au-delà de ce petit business, c'est bel un bien un véritable collectionneur qui s'exprime. Dans sa chambre, ce sont près de 100 paires de sneakers montantes qui ornent les murs. Auxquelles s'ajoutent une centaine d'autres baskets d'un autre type.

Merys, des feutres, de l'argent de poche...
Merys, également connue des sneakersaddicts en tant que @merystache, se souvient très bien de sa première paire de baskets reçues en cadeau. Elle était en primaire, et c'est à ce moment que sa passion a débuté. À l'adolescence, toutefois, les choses ont pris une drôle de tournure. Elle raconte:
"Rapidement j'ai voulu avoir mes propres baskets alors j'en achetais des toutes vierges, toutes simples, que je personnalisais avec des gros feutres à peinture", se souvient cette jeune femme de 26 ans.
"Puis des amis, et de plus en plus de monde, m'ont demandée de leur faire des chaussures également." De quoi se faire pas mal d'argent de poche: une paire achetée 80 euros se revendait ainsi le double de son prix.
... une bougie et une grande famille
Aujourd'hui, l'intérêt de Merys pour ces chaussures n'a absolument pas faibli. Son amour des sneakers se traduit maintenant par la confection de petits accessoires, comme des porte-clefs ou des pendentifs. Sa dernière création en date: une bougie en forme de basket montante, taille réelle, entièrement sculptée à la main.

Ilan, bercé dans la basket
Chacun à leur niveau, Ilan et Léa forment un couple de sneakersaddicts. Du haut de ses 28 ans, le premier a ouvert en janvier 2014 une boutique dans le 17e arrondissement de Paris, Piils, où tout tourne autour des baskets.
"C'est vraiment une drogue", explique le jeune entrepreneur. "D'ailleurs, nous avons nommé notre commerce Piils, en jeu de mot avec la traduction anglaise de 'comprimé' notamment pour cette raison", sourit-il.
Cette addiction, Ilan a toujours vécu avec: son père ayant notamment été importateur de baskets. "Deux des personnes qui me vendaient des chaussures quand j'avais 7 ou 8 ans font d'ailleurs partie de mon équipe aujourd'hui", ajoute-t-il, amusé. Ce qui l'intéresse particulièrement dans son domaine? "Les créations audacieuses." Sa collection personnelle s'élève à près de 70 paires, réparties tant bien que mal, de son propre aveu, selon la technique du "fouillis organisé".
Léa, et les influences culturelles
N'est-ce d'ailleurs pas trop difficile de partager la vie d'un homme qui consacre autant de temps (et de place) aux sneakers? "Pas du tout", rétorque Léa, de quatre ans sa cadette. "Il y a plus gênant comme passion, et je suis également atteinte d'une certaine manière", poursuit-elle.
Sa démarche diffère de celle de son petit-ami. Si ce dernier est focalisé sur la sneaker comme objet à part entière, la jeune femme, elle, se réfère plutôt à la la culture, et en particulier au hip-hop. "Quand on a grandi dans les années 90, notamment avec le film Space Jam (où jouait Michael Jordan, encore lui, Ndlr) ou la musique de tel ou tel rappeur, forcément on est influencé par les shoes qu'ils portent", justifie-t-elle.
Les deux militent toutefois pour une cause commune: faire de la basket une chaussure universelle. "Pour aller en boîte, ça fait des années que mes baskets ont remplacé mes talons", déclare Léa, en riant. "Il n'est aujourd'hui plus étonnant de voir des personnes très bien habillées accompagner leurs tenues par des baskets", renchérit Ilan. "C'est d'ailleurs pour ça que de plus en plus de marques de luxe se lancent dans l'aventure, et ça marche."

Thierry: "J'ai dépassé ma frustration de gosse"
Thierry fait partie de ces fans a avoir patienté de longues minutes devant le salon avant de pouvoir pénétrer dans ce dernier. Avec sa dernière trouvaille tout juste acquise, ce collectionneur chevronné possède "très précisément" 206 paires de baskets. Toutes, sans exception, ont une place chez lui pour être bien mises en valeur.
"Pour être très franc, c'est une passion qui a débuté par une frustration", explique-t-il, un sourire en coin. "Petit, j'avais le droit à une nouvelle paire de sneakers à chaque rentrée scolaire, mais elles étaient très simples. Les beaux modèles, qui coûtaient environ 1000 francs à l'époque (environ 150 euros, ndlr) ce n'était pas envisageable."
Une collection, oui, mais "éthique"
Désormais trentenaire et avec un salaire, il peut dorénavant "rattraper son retard" en s'offrant de belles chaussures. "A vrai dire, je pense même que j'ai dépassé tout ce que je rêvais d'avoir enfant", affirme celui qui est prêt à débourser jusqu'à 1.000 euros pour une belle affaire.
Attention à ne pas collectionner n'importe comment, en achetant n'importe quelle taille. Car Thierry a "une éthique": "À tout moment je peux être amené à vouloir porter une paire de sneakers que je souhaitais juste exposer, donc si mon pied n'entre pas dedans, je n'achète pas", avertit-il.

David, les baskets, le dessin, et la cordonnerie
David réalise des baskets uniques au monde, puisque depuis deux ans il consacre son temps libre à transformer des chaussures sur demande.
"J'ai deux passions, les sneakers et le dessin", dit-il. "Un jour j'ai décidé de mixer les deux, et depuis je réponds à des demandes de particuliers, par le biais des réseaux sociaux."
Pour se faire, il suffit de lui apporter une paire de baskets ainsi qu'un motif, et "Davidz Custom" se charge du reste. En fonction du travail demandé, le tarif varie de "40 à 150 euros".
Objectif: un atelier boutique
Derrière ce travail à temps partiel, David souhaite aller encore plus loin. "Je prends actuellement des cours de cordonnerie pour apprendre à dépiécer les chaussures pour pouvoir les remonter en jouant avec les différents types de cuir", explique-t-il.
À terme, il rêve de posséder son propre atelier-boutique pour pouvoir vivre uniquement des sneakers. En attendant, il est responsable d'un magasin près des Champs-Elysées...où il vend des chaussures.