Covid-19: les femmes enceintes doivent-elles être vaccinées?

"La femme enceinte n'est pas un adulte comme les autres". Le gynécologue Olivier Picone, membre du Collège national des gynécologies et obstétriciens français (Cngof), a appelé ce lundi, sur BFMTV, à vacciner plus massivement les femmes enceintes contre le Covid-19.
Car, si elles n'ont pas plus de risques de développer une forme symptomatique de la maladie, "elles ont un risque plus important d'aller en soins intensifs et d'avoir besoin d'une ventilation invasive plus agressive, ce qui peut aller jusqu'à la nécessité de devoir induire une prématurité", a précisé le professionnel de santé. Selon le gynécologue Cyril Huissoud, secrétaire général du Cngof, les femmes enceintes "ont entre deux et cinq fois plus de risque de développer une complication en lien avec le Covid-19", a-t-il indiqué à Franceinfo.
Le professeur Jacky Nizard, gynécologue-obstétricien à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris), a ainsi affirmé sur BFMTV avoir eu la semaine dernière "quasiment 10% des femmes qui accouchaient positives au Covid-19".
"On a tous les jours au moins deux patientes (enceintes) en réanimation. C'est une constante en ce moment et c'est une constante depuis deux semaines", a-t-il ajouté.
L'injection n'est pas "contre-indiquée"
Depuis le 5 mars, les femmes qui attendent un enfant peuvent se faire vacciner. Ces dernières doivent passer par les sages-femmes, autorisées par un décret du même jour à injecter les vaccins contre le Covid-19, qui pourront également prescrire un vaccin à "l'entourage" des parturientes et du nouveau-né.
À la fin du mois de l'année dernière, la Haute Autorité de Santé (HAS) n'avait pas inclus les femmes enceintes dans les populations à vacciner en priorité, "en raison de l’absence de données sur cette population, exclue des essais cliniques", selon une décision du 17 décembre 2020.
Dans un nouvel avis, diffusé le 2 mars, l'instance a changé de position. Elle a indiqué que "malgré l’absence de données suffisantes au cours de la grossesse, l’administration des vaccins contre le Covid-19 chez la femme enceinte n’est pas contre-indiquée", peut-on lire dans le document.
"Elle doit être envisagée si les bénéfices potentiels l’emportent sur les risques pour la mère et le fœtus. En particulier, les femmes enceintes de plus de 35 ans ou celles présentant d’autres comorbidités comme l’obésité, le diabète ou les maladies cardiovasculaires, ou les femmes enceintes susceptibles d’être en contact avec des personnes infectées du fait de leur activité professionnelle pourraient se voir proposer la vaccination", précise la HAS.
Le Cngof s'est félicité, le 8 mars, du changement de position de la Haute Autorité de Santé. Il a tout de même demandé à ce que les femmes enceintes "soient intégrées officiellement à la liste des publics prioritaires pour la vaccination".
Privilégier les vaccins à ARN messager
L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) estime, de son côté, que la vaccination est à évaluer chez les femmes enceintes "au cas par cas". La décision doit être prise "en étroite concertation avec son médecin, sa sage-femme ou son gynécologue afin d’évaluer individuellement le bénéfice de la vaccination".
Elle recommande de privilégier les vaccins à ARN messager, comme celui de Pfizer ou Moderna, "pour lesquelles les études animales n’ont pas montré de conséquence sur le développement du fœtus".
Une étude est en cours pour effectuer les mêmes vérifications avec le vaccin AstraZeneca. Ce dernier peut, en outre, provoquer "des syndromes de type grippal souvent de forte intensité, avec fièvre élevée", souligne l'ANSM.
"Sur la base des mécanismes biologiques, il n’y a pas d’effet attendu chez le nourrisson et l’enfant allaités par une femme vaccinée", précise encore l'établissement public français.
L'Académie nationale de médecine a, quant à elle, appelé à vacciner "toute femme enceinte professionnellement ou familialement exposée, ou porteuse d'une comorbidité" et "de pas retarder ou interrompre une grossesse en raison de la vaccination".
Des bienfaits de la vaccination
Une récente étude américaine, coordonnée par le Massachusetts General Hospital, a analysé les conséquences de la vaccination de Pfizer et Moderna chez 131 femmes, parmi elles 84 attendaient un enfant, 31 allaitaient et 16 n'étaient pas enceintes.
Il en ressort que les vaccins sont très efficaces chez les femmes enceintes et allaitantes, leur permettant de produire des anticorps contre le SARS-CoV-2 et de transmettre une immunité protectrice à leur bébé.
Aux États-Unis, 60.448 femmes enceintes qui ont été vaccinées se sont déclarées auprès des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC).