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Emmanuel Macron, encore président et déjà candidat: l'édito politique de Guillaume Daret

Le chef de l'État n’écarte plus une nouvelle candidature à l’Élysée… en 2032. Une perspective de troisième mandat qui risque d’empêcher l'émergence durable d’un successeur pour 2027.

"J'aurai besoin de vous pour dans deux ans, pour dans cinq ans, pour dans dix ans". La petite phrase du président de la République pour les 10 ans des Jeunes avec Macron n’a échappé à personne.

Il fallait voir la mine un peu déconfite de Gabriel Attal, lui qui venait d’annoncer quelques instants plus tôt qu’il souhaitait "proposer un chemin" aux Français et conduire son camp "sur le chemin de la victoire", affichant clairement son ambition présidentielle. L’ancien Premier ministre a bien compris le message, pour ne pas dire le recadrage: Emmanuel Macron veut garder la main sur l’après 2027 et nourrit donc pour la première fois l’idée qu’il puisse vouloir se représenter en 2032. 

S’il remet ce sujet sur la table, c’est d’abord qu’il est comme les autres. "Quand on y a goûté, difficile de s’en passer... C’est comme une drogue, décrypte un ancien candidat à l'Élysée qui a tenté plusieurs fois sa chance. Quand tu es piqué à la présidentielle tu ne penses qu’à ça, on ne s’en remet jamais".

Ensuite Emmanuel Macron nourrit sans aucun doute l’ambition de réaliser ce qu’aucun de ses prédécesseurs n’a réussi dans l’Histoire: faire son retour après avoir quitté l’Élysée. Nicolas Sarkozy en a rêvé mais a échoué.

Une profonde déconnexion du chef de l’État

Réélu président des Républicains en 2014, il est balayé au 1er tour de la primaire de la droite en 2016 par François Fillon et Alain Juppé... François Hollande est en train de l’espérer mais a très peu de chance de le réaliser. Son âge, notamment, lui donne une raison d’y croire: Emmanuel Macron n’aura que 54 ans lors de l’élection présidentielle de 2032. À cet âge-là, Jacques Chirac, François Mitterrand et Georges Pompidou n’avait même pas encore accédé à la fonction présidentielle.

Mais cela traduit aussi une profonde déconnexion du chef de l’État. Il n'a même pas achevé son deuxième quinquennat qu’il semble déjà réfléchir au meilleur moyen d’en conquérir un troisième. Au risque de donner le sentiment d’être plus préoccupé par son avenir personnel que par les problèmes de la vie quotidienne des Français, pour qui il promet pourtant d’agir “jusqu’au dernier quart d’heure”. 

Déconnexion et audace aussi de penser que les Français voudront le réélire en 2032 alors qu’il est aujourd’hui très impopulaire. Tout juste un peu plus de 20% de bonnes opinions, critiqué y compris dans son camp, pour une dissolution désastreuse il y a tout juste un an dont il continue de payer les conséquences.

Le risque d’empêcher l'émergence d'un successeur

Enfin, cette "carte postale" du retour n’est pas forcément une bonne nouvelle pour son propre camp. Elle traduit le pouvoir de nuisance, ou au minimum d’interférence que va conserver Emmanuel Macron. Le ou la candidate de chez Renaissance vivra en permanence avec cette ombre portée.

En alimentant l'hypothèse d’un retour en 2032, le chef de l’État risque d’empêcher l'émergence durable d’un successeur, accréditant l’idée que le mandat 2027-2032 ne serait finalement qu’une parenthèse. 

Guillaume Daret