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Plateforme de signalement des discriminations: la colère des policiers ne faiblit pas

Des policiers en patrouille à Nice, le 4 novembre 2020

Des policiers en patrouille à Nice, le 4 novembre 2020 - Valery HACHE © 2019 AFP

Les policiers ne décolèrent pas après l'annonce d'Emmanuel Macron de créer une plateforme pour signaler les discriminations. L'ensemble des syndicats appelle à cesser les contrôles d'identité.

Les policiers y voient une nouvelle mesure anti-flics. L'annonce d'Emmanuel Macron, la semaine dernière, de créer une plateforme pour signaler les discriminations, dont feraient l'objet certains citoyens lors des contrôles policiers, laisse un goût amer du côté des forces de l'ordre. Les syndicats de policiers appellent tous désormais à cesser les contrôles d'identité pour manifester leur colère.

Longuement interrogé par le média Brut sur les violences policières, notamment après l'interpellation d'un producteur de musique noir à Paris le 28 novembre, le président de la République a estimé qu'"aujourd’hui, quand on a une couleur de peau qui n’est pas blanche, on est beaucoup plus contrôlé (...) On est identifié comme un facteur de problème et c’est insoutenable."

"Notre meilleure action sera l'inaction", rétorque le syndicat majoritaire Unité SGP Police FO dans un tract publié ce week-end.

"Blocage total"

"Nous sommes violents, n’interpellez plus! Nous sommes racistes, ne contrôlez plus! Blocage total!!!", exhorte encore sur Twitter le syndicat, qui estime que les paroles du chef de l'Etat sont "dictées" par "l'émotion" après l'interpellation polémique de Michel Zecler. Alors que le syndicat France Police dénonce "l’instrumentalisation" de cette affaire "pour faire reculer les forces de l’ordre face aux gangs et aux islamistes", Alliance police nationale déplore dans une vidéo "les allusions douteuses sur les actions des policiers".

"Non! La police n'est pas raciste, elle ne choisit pas sa délinquance", insiste le syndicat policier.

"La présomption de culpabilité, de racisme et de contrôle au faciès n'aura pas lieu!", a écrit encore vendredi soir sur Twitter le syndicat Alliance police nationale qui lui aussi appelle à cesser tous contrôles d'identité. Outre cet appel lancé à l'unisson aux agents, les syndicats s'accordent pour dénoncer les propos "honteux" du chef de l'Etat.

"La police nationale abandonnée par notre président", s'insurge le syndicat UNSA police, estimant que "les propos du président ont écoeuré tous les policiers".

"On fait notre travail correctement"

"On fait notre travail correctement. Ce n'est pas parce qu'on a une couleur de peau ou un nom à consonnance issue de l'immigration qu'on est plus contrôlé", abonde sur BFMTV Matthieu Valet, secrétaire national adjoint du syndicat indépendant des commissaires.

Unanimement, les syndicats déplorent le changement de ton du président de la République, alors que les policiers sont sollicités pour la lutte contre le terrorisme, après les récents attentats, et pour les contrôles d'attestation dans le cadre du confinement.

"Reçus à l'Elysée le 15 octobre, lâchés le 4 décembre", résume le syndicat Unité SGP police FO. Cette rencontre avec le chef de l'Etat est intervenue dans un contexte de violences à l'encontre des forces de l'ordre dans plusieurs quartiers de France. Les syndicats avaient alors obtenu des "engagements" et notamment l'article polémique 24 de la proposition de loi "Sécurité globale" qui prévoit de sanctionner la diffusion d'images de policiers en mission.

Un système de statistiques ethniques?

La tension entre le gouvernement et les forces de l'ordre est présente depuis plusieurs mois. En juin, le ministre de l'Intérieur de l'époque, Christophe Castaner, qui assurait que les policiers seraient suspendus "systématiquement" en cas de soupçons avérés d’actes ou de propos racistes, avait déjà provoqué la colère des agents.

Les syndicats, à l'instar d'Alternative police, relancent désormais l'idée de créer "un système de statistiques ethniques comme en Angleterre afin que l'on puisse comparer proportionnellement ces soit-disants contrôles au faciès avec l'environnement où cela a été fait, la population qui y réside où y transite". En 2017, le Défenseur des Droits relevait que les jeunes hommes "perçus comme noir ou arabe" ont "une probabilité 20 fois plus élevée que les autres d'être contrôlés".

https://twitter.com/justinecj Justine Chevalier Journaliste police-justice BFMTV