"La figure horrifique la plus puissante depuis Freddy": pourquoi "Terrifier 3" cartonne au cinéma

Terrifier 2 avait attiré à peine 80.000 spectateurs début 2023 dans les salles obscures françaises. En seulement cinq jours, sa suite triple ce score: 244.182 curieux ont osé découvrir ce film d'horreur interdit aux mineurs de moins de 18 ans - une décision rare. Preuve de cet engouement: une centaine de copies seront ajoutées ce mercredi.
La planète entière tourne désormais autour de Art le Clown. Aux États-Unis, Terrifier 3 vient de détrôner de la tête du box-office Joker: Folie à deux. Avec une recette de 18,2 millions de dollars, ce film produit pour seulement 2 millions de dollars est le volet le plus lucratif de cette franchise horrifique imaginée par Damien Leone.
"Quelque chose de dingue est en train de se passer", se réjouit sur BFMTV Victor Lamoussiere, le distributeur du film en France avec la société ECS. "Le film est déjà largement amorti aux États-Unis. Ça reste une production indépendante et il fait des chiffres déments sur chaque territoire."
En France, Terrifier 3 est déjà le film interdit aux mineurs le plus vu depuis Saw 3. Sorti le 22 novembre 2006, le film avait alors obtenu 738.451 entrées. "Je ne sais pas si on arrivera à ce score", modère le distributeur. "Smile 2 arrive. Mais on est déjà au-delà de nos espérances. Si on dépasse les 500.000 entrées, on sera très heureux."
Des salles pleines
En France, les séances battent des records de fréquentation. Avec une moyenne de 1.596 spectateurs par copie, c'est un raz-de-marée. "C'est une moyenne que seulement des films très attendus obtiennent. On a reçu beaucoup de demandes de toute la France pour diffuser le film", précise Victor Lamoussiere.
"On savait que le film était attendu par les fans de la franchise. C'est une niche de spectateurs qui nous suit et qui aime ce qu'on fait. On savait que le démarrage serait bon mais là ça prend des proportions bien plus larges. On sait que des gens y sont allés par curiosité et qu'ils n'avaient pas vu les premiers films."
Dans les salles, le public vibre à l'unisson en découvrant la perversité d'Art. "On ne vit que ça avec le cinéma d'horreur. On y va avec ses amis. Certains supportent, d'autres non. C'est ce qu'on aime dans l'expérience en salles. Chacun le vit différemment. Certains partent aussi, on le sait. Au bout 1h30, il y a trop de meurtres pour eux."
"Je suis très reconnaissant", a fait savoir sur X le réalisateur et créateur de la franchise Damien Leone. "J'ai pu voir Terrifier 3 dans un cinéma blindé à Times Square hier soir. Je n'ai jamais vécu quelque chose comme ça. L'énergie de la foule était vraiment quelque chose à vivre".
Une décennie de labeur
Ce triomphe vient couronner une décennie de labeur. Fan des films d'horreur depuis ses 3 ans, Damien Leone a créé dans les années 2000 Art le Clown, personnage à l'humour sadique et tordu, apparu dans plusieurs courts-métrages, réunis en 2013 dans le film à sketches All Hallow's Eve.
Tourné avec seulement 35.000 dollars, grâce à une campagne de financement participatif, le premier Terrifier avait rapporté 416.000 dollars. Le film, sorti en catimini en 2016, aurait pu rester dans l'oubli. Mais une scène désormais célèbre impliquant une scie à métaux a assuré son succès lors de sa diffusion sur Netflix.
Financée avec seulement 250.000 dollars, la suite, sortie en octobre 2022 aux États-Unis, en a rapporté 15,7 millions. Malgré les moyens réduits, un autre morceau de bravoure horrifique a marqué les esprits, inspiré par un livre sur Jack l'éventreur. On y voit une femme être écorchée vive.
Un effet d'entraînement
Terrifier 3 propose lui aussi une scène horrifique d'anthologie où Art le Clown découpe membre par membre à l'aide d'une tronçonneuse un couple en plein ébat sexuel sous une douche. Une scène qui repousse les limites et place le public dans une position d'extrême inconfort. La promesse des films Terrifier.
Le défi de voir cette scène sans vomir a pu pousser une partie du public à se rendre en salles. "Il y a un effet d'entraînement", confirme Victor Lamoussiere. "Ce week-end, à Lyon, un gamin de 16 ans est venu nous voir en nous disant qu'il avait essayé d'y aller trois fois." Il a été refoulé par des vigiles aux portes des salles.
Terrifier 3 est aussi pour les fans du genre un retour aux sources. Cette œuvre mêlant sadisme, nihilisme et grand guignol renoue avec l'aspect crapoteux des films d'horreur des années 1970 et 1980. "C'est un film où tout est fait à la main. Les effets à l'ancienne plaisent. C'est un retour au cinéma de minuit généreux."
Le nouveau Freddy Krueger
Terrifier 3 propose également "la figure horrifique la plus puissante" du cinéma d'horreur depuis Freddy Krueger, estime Victor Lamoussiere. "Depuis Ghostface dans Scream, il n'y a pas eu de nouveau personnage aussi efficace. Les gens sont contents, après toutes les suites et les préquels, de voir autre chose."
David Thornton Howard, qui incarne Art le Clown dans les trois films Terrifier, contribue à rendre ce personnage inoubliable avec ses expressions outrancières et son jeu corporel inspiré par le cinéma muet. "Il ne parle pas et le contraste avec les atrocités qu'il commet fonctionne très bien car on ne connaît pas ses limites."
"On a déjà vu beaucoup de clowns tueurs au cinéma et lui il renouvelle le personnage pour créer un personnage unique et rafraîchissant qui rappelle Charlie Chaplin et le Mime Marceau", poursuit Victor Lamoussiere, en précisant que Terrifier est aussi une comédie d'horreur "qui ne se prend pas au sérieux".
"On y va pour se marrer"
Les scènes de Terrifier 3 sont souvent excessives dans leur traitement. Le sang y est volontairement rouge vif, comme pour accentuer leur dimension cartoonesque. Les cadavres ressemblent à des mannequins. "Il y a un mélange d'horreur et d'humour très particulier. Ce contraste fascine et explique le succès de Terrifier."
"Quand on y va, on y va plus pour se marrer que pour autre chose. C'est un exutoire, quelque chose de cathartique", insiste-t-il. "Ce qui se passe dans le film, c'est du sadisme mais ce ne sont pas des films très méchants."
La saga baigne aussi dans une atmosphère onirique, qui participe à sa renommée auprès des critiques. "Damien Leone a créé une mythologie. On en saura plus dans le 4. Art le Clown n'est pas un simple clown masqué, mais une entité démoniaque dont on ignore toutes les relations avec Sienna, l'héroïne", prévient Victor Lamoussiere.
Alors que Halloween approche, les salles vont continuer d'organiser des soirées thématiques autour du film. Certains spectateurs viennent en salles habillés comme Art. Victor Lamoussiere prépare déjà la sortie vidéo, qui aura lieu dans 4 mois. Les précommandes seront ouvertes cette semaine.
"On est attendu", se réjouit-il. "On reçoit beaucoup de messages. Sur les films comme Terrifier, le support vidéo est important. Terrifier 2 a en plus été un carton en vidéo, ce qui a permis de consolider la fanbase."De quoi augurer de nouveaux records de vente l'année prochaine en vidéo.