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"Un cauchemar qui se reproduit": la colère des élus face aux nouvelles inondations dans le Pas-de-Calais

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Plusieurs élus du département et de la région poussent un cri de colère deux jours après les nouvelles inondations qui touchent durement le département.

Ils sont une nouvelle fois en première ligne. Dans le Pas-de-Calais, les élus, au même titre que leurs administrés, subissent le retour des inondations de plein fouet depuis maintenant deux jours. Une nouvelle catastrophe naturelle contre laquelle ces femmes et hommes poussent un cri de colère à peine plus de deux mois après les précédentes montées des eaux.

À Blendecques, Vincent Maquignon, adjoint au maire et sinistré, manifeste sont désarroi sur quelques lignes inscrites sur une banderole installée sur la grille principale de son habitation : "On veut vivre en sécurité. Maintenant il faut agir endiguer ou raser ce quartier".

L’élu interpelle également les autorités compétentes avec ses mots écrits au marqueur rouge. “L’État, Capso (Communauté d'agglomération du Pays de Saint-Omer, Ndlr), SMAGEAA (Syndicat mixte pour l'aménagement et la gestion des eaux de l'Aa, Ndlr) doivent agir et vite.”

"Ce qu’on demande c’est de vivre en paix et que l’État réagisse, rapporte Vincent Maquignon à TFI. Les discours c’est beau mais malheureusement maintenant il faut agir."

Le maire d'Andres envisage une plainte

L’élu prévoit de créer une association pour porter plainte contre l’Etat pour inaction et mise en danger de la vie d’autrui.

Cette envie de traduire sa colère en justice, Allan Turpin le partage. Le maire d’Andres "ne souhaite pas couper la tête de quelqu’un" mais il attend des réponses. "Je suis en train de réfléchir à une plainte contre X sur la gestion de l’eau", confie l’élu à BFMTV ce jeudi 4 janvier.

Depuis les premières inondations, en novembre dernier, le maire d’Andres est l’une des figures de la révolte des maires et administrés des communes sinistrés. Sur les réseaux sociaux, Allan Turpin dénonce, condamne sans langue de bois. Aujourd’hui, il se dit en colère. Auprès de BFMTV, il dénonce le manque de réactivité des autorités compétentes à l’aube d’importantes pluies.

"La semaine dernière, on avait demandé à l’institution intercommunale de wateringues de baisser le niveau du watergang qui se trouve en aval de nos communes afin d’anticiper ces nouvelles précipitations", explique-t-il. "On aurait pu perdre 50 centimètres de plus au niveau de l’eau", poursuit-il.

La réponse est sans appel. "On nous a dit que techniquement ce n’était pas possible, mais on ne nous apporte pas de raisons techniques, des explications", s'agace-t-il.

"Il faut que l'Etat mette la pression sur toutes ces institutions qui ont la compétence de gérer cette évacuation d'eau de manière régulière", appelle également l'élu.

"L'histoire se répète et ça ne marche pas trop bien"

Les pieds dans l’eau, Allan Turpin demande l’ouverture d’une "enquête administrative sur la gestion de l’eau". Le maire de Blendecques, Rachid Ben Amor, attend lui aussi une action offensive des services en prévision d’une nouvelle montée des eaux.

"L’histoire se répète et ça ne marche pas trop bien, souffle l’élu à BFM Grand Littoral. Aujourd’hui, je suis désappointé, fortement déçu." Les questions s’entremêlent dans la tête de cet homme déjà soucieux du bien-être et de la sécurité de ses administrés.

"Que fait-on avec l’Aa, s’interroge-t-il. Car à nouveau, si ça remonte, ça débordera et puis on recommencera." Rachid Ben Amor, qui a connu une période de grande fatigue après des journées de mobilisation en novembre dernier, prévient: "je ne vais pas faire ça tous les quatre ans".

En attendant, lui et son équipe municipale conservent et entretiennent les liens sur les réseaux sociaux avec leurs administrés en livrant les informations pour éviter les drames. Un centre d’accueil a été également monté au pavillon de l’hôtel de Ville avec l’aide de la police municipale et l’appuie de la Croix-Rouge.

"Il nous faut des moyens très importants"

À Arques, une commune du Pas-de-Calais d’un peu moins de 10.000 habitants, les maisons se retrouvent une nouvelle fois sous l’eau.

"C’est de la résiliation. On n'est pas dans la résilience pour le coup… On fait face à la situation, on tente de donner tout ce qu’on peut donner", rapporte Benoît Roussel, le maire.

Garder le cap malgré les prévisions météorologiques et l’annonce de jours encore longs. "On est au moins de janvier, on sait qu’il va pleuvoir en mars, en février, en avril", s’inquiète le premier édile de la commune. Un centre d’accueil a été également monté au pavillon de l’hôtel de ville avec l’aide de la police municipale et l’appuie de la Croix-Rouge.

Les pompes sont arrivées dans la nuit de mercredi à jeudi dans le Pas-de-Calais. Quatre nouvelles méga-pompes, arrivées de l’ensemble de la France et misent en œuvre pour offrir au plus vite du répit aux sinistrés.

Agir au plus vite

"On ne peut pas regarder la météo comme ça", reprend Benoît Roussel. "Là, on est à la troisième inondation. Je n’ai pas envie qu’au mois de mars ou février, on en soit à la sixième, huitième ou dixième dans le centre-ville."

L’élu connaît son territoire. "On sait que les sols sont gorgés d’eau, il nous faut des moyens très importants pour faire en sorte que les cours d’eau restent au plus bas", répète l’édile.

La ville d’Arques connaît sa troisième inondation en six semaines. “Aujourd’hui, ce sont les mêmes personnes qui sont sinistrées", alerte-t-il. "Le 11 novembre, on nous expliquait qu’ils s’agissaient de crues de l’ordre du millénaire, bi-centennale, que c’était exceptionnel, conclut-il. Au final, six semaines plus tard, on revit la même chose.”

Six longues semaines de travail réduit à néant. "La situation pèse énormément les administrés, ils en ont ras-le-bol".

Un épuisement ressenti également à Saint-Omer. Auprès de BFM Grand Littoral, l'édile François Decoster partage sa confusion. “Nous espérions avoir tourné la page, souffle-t-il. Et en quelque sorte, c’est un cauchemar qui se reproduit. C’est donc une énorme fatigue.”

Xavier Bertrand souhaite des travaux "avant l'hiver"

Lui non plus ne souhaite plus attendre. Xavier Bertrand, le président des Hauts-de-France, a appelé ce mercredi sur BFM Grand Littoral à ce que les travaux liés aux inondations dans le Pas-de-Calais commencent "avant la fin de l'hiver".

"Si on ne peut pas empêcher l'eau de tomber, on peut permettre à l'eau de s'écouler beaucoup plus facilement et aussi d'être retenu par endroit", a expliqué Xavier Bertrand.

"Je souhaite qu'avant la fin de l'hiver, on ait des premiers travaux qui soient faits sur le nettoyage des cours d'eau", précise l'élu qui souhaite un début des travaux "au plus vite".

Xavier Bertrand espère obtenir "le feu vert" du ministre de la Transition écologique pour engager des travaux rapidement et simplifier les procédures. Car le président de la région est également en lien avec les assurances. Un premier bilan dressé après les premières inondations dans le Pas-de-Calais faisait état d'au moins 550 millions d'euros de dégâts.

En déplacement à Thérouanne ce jeudi, Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique, a dit comprendre "l'exaspération, je comprends la fatigue, je comprends la colère et je comprends la crainte de le revivre à nouveau" des inondations.

Le ministre de la Transition écologique promet de revenir "mardi prochain pour une réunion, précisément, avec tous les présidents d'intercommunalités, avec tous les présidents de syndicats de gestion d'eau."

Il estime qu'"on a des leçons à prendre" pour prévenir les futures crues. En ce sens, des études ont été lancées "pour aller regarder ce que font nos voisins hollandais, belges".

Charlotte Lesage