Coupures d'électricité: pourquoi un délestage n'est pas un blackout?

Alors que l'hiver au sens météorologique vient de débuter, le risque de coupures de courant s'apprête à aller croissant dans l'Hexagone. Dans ses dernières perspectives du système électrique pour l'hiver à venir, le gestionnaire RTE alertait sur un risque de recours au dispositif Ecowatt (et en particulier au signal d’alerte rouge) qui apparaît "élevé sur le mois de janvier" bien qu'il dépende "largement des conditions climatiques et de la possible survenue d’une vague de froid même modérée".
C'est lors de ces journées dites "rouge" que des opérations de délestage pourraient survenir afin de soulager le réseau lors des pics de consommation identifiés sur les tranches horaires de 8 à 13 heures et de 18 à 20 heures. Et c'est bien là la principale différence entre le délestage et le black-out qui correspond à une perte de contrôle totale du système électrique sur toute ou partie d'un territoire. Dans la première situation, la coupure de courant est volontaire et contrôlée, ce qui n'est pas le cas dans la seconde.
Des coupures annulables "jusqu'au dernier moment"
Il y a plus d'un mois, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité et l'énergéticien Enedis ont dévoilé les grandes lignes de l'opération de délestage qui doit constituer un ultime recours en cas de pic de tension sur le réseau électrique. Le patron de RTE Xavier Piechaczyk l'a d'ailleurs réaffirmé sur le plateau de France Info ce jeudi: "On peut éviter le délestage si chacun fait les éco-gestes nécessaires, notamment les entreprises. On peut annuler ces coupures jusqu’au dernier moment."
Les signaux Ecowatt rouges étant indiqués avec une avance de trois jours, les particuliers seront avertis de la possibilité d'un délestage dans ce délai tandis que les coupures seront confirmées la veille aux alentours de 17 heures. Le site Ecowatt affichera une carte des départements potentiellement concernés vers 21h30 et les utilisateurs pourront entrer leur adresse postale afin de vérifier leur situation personnelle.
"C’est en faisant le bilan la veille que nous déterminerons les zones à cibler pour le délestage à partir de paramètres techniques, expliquait Jean-Paul Roubin, directeur exécutif Clients et Opération du système électrique de RTE. Si on constate que la consommation française a baissé le matin du jour J, nous n'enverrons par l'ordre de délestage ou alors de manière partielle en fonction de l'ampleur de la baisse."
Une rotation des délestages sur l'ensemble du territoire français
Le plan de délestage prendra la forme de coupure "tournantes, localisées et temporaires" qui seront d'une durée de deux heures avec une légère tolérance et seront appliquées au sein des tranches horaires de forte tension mentionnées plus haut. Ces coupures représenteront des blocs de consommation de 100 MW répartis sur tout le territoire selon des critères techniques et seront assurées par les Agences de conduite régionales d'Enedis sur le réseau moyenne tension. Sur le plan géographique, aucune zone ne sera épargnée à l'exception de celles à proximité de sites prioritaires déterminés par les préfectures départementales mais une rotation sera mise en place.
"On fera tourner la mesure sur l’ensemble du territoire pour ne pas se concentrer sur les mêmes régions s’il y a plusieurs périodes de délestage", indiquait Jean-Paul Roubin.
Le dernier black-out dans l'Hexagone remonte à décembre 1978
S'il est lié à une forte tension sur le réseau électrique ou des conditions météorologiques dégradées, le délestage n'en demeure donc pas moins une opération de coupures contrôlés. Tout l'inverse du "black-out" qui implique une perte généralisée de l'alimentation électrique sur le territoire. Le gestionnaire du réseau de transport d'électricité a insisté à plusieurs reprises sur le fait que la France ne courait pas ce risque cet hiver, RTE disposant "des moyens de sauvegarde du système électrique appropriés et proportionnés en fonction de l’ampleur d’un éventuel déséquilibre."
La dernière fois que la France a été confrontée à cette situation, c'était le 19 décembre 1978. L'incident avait commencé peu avant 8h30 lorsque la ligne "Bézaumont-Creney, à proximité de Nancy, avait cédé, ce qui avait eu pour conséquence de transférer l'électricité allemande - qu'importait la France ce jour - sur les lignes du réseau secondaire, ces dernières disjonctant à tour de rôle. La panne avait gagné la quasi-totalité du pays pendant près de quatre heures à la rare exception de certaines zones sur la partie orientale qui étaient alimentée directement par les voisins italiens et allemands.