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Var: l'ordination de prêtres dans le diocèse de Fréjus-Toulon suspendue par le Vatican

L'évêque Dominique Rey à La Farlède, près de Toulon, le 4 octobre 2017

L'évêque Dominique Rey à La Farlède, près de Toulon, le 4 octobre 2017 - BERTRAND LANGLOIS / AFP

Les quatre prêtres et six diacres du diocèse ne seront finalement pas ordonnés en juin. "Une décision rare" qui vient interroger les méthodes de Mgr Rey au sein du séminaire.

Le Vatican a suspendu l'ordination de prêtres dans le diocèse de Fréjus-Toulon (Var), tenu par Dominique Rey, l'un des évêques français les plus conservateurs, un fait extrêmement rare qui vient interroger sa ligne et ses méthodes.

Ils devaient être ordonnés fin juin: quatre prêtres et six diacres du diocèse ne le seront finalement pas.

Dominique Rey en a fait l'annonce lui-même jeudi, dans un communiqué publié discrètement sur le site du diocèse. Il a été décidé "de surseoir" à ces ordinations, à la suite de visites effectuées "à la demande de Rome", par l'archevêque métropolitain Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille, a indiqué l'homme d'église à la tête de ce diocèse du sud-est de la France depuis 22 ans.

La raison? "Certains dicastères romains", les organismes du Vatican, se posent des questions "autour de la restructuration du séminaire [La Castille, dans le Var] et de la politique d'accueil du diocèse", a-t-il affirmé, sans davantage de précisions.

Des méthodes qui interrogent

Mgr Rey est considéré comme l'un des plus conservateurs au sein de l'épiscopat français, notamment pour son soutien marqué en 2012-2013 à La Manif pour Tous qui s'opposait au mariage de personnes homosexuelles. L'accueil offert en 2015 à Marion Maréchal-Le Pen, une des figures de l'extrême droite française, à une université d'été catholique, avait aussi suscité l'émoi dans les rangs chrétiens.

Au sein de l'Eglise, les méthodes de l'homme issu de la communauté de l'Emmanuel et qui a pu s'inspirer de pasteurs évangéliques américains, entraînent des réactions clivantes. Notamment sa politique d'accueil de communautés nouvelles, dont certaines, traditionalistes, sont adeptes de la messe en latin par exemple, ou charismatiques, venant de l'étranger, en particulier d'Amérique latine.

Au séminaire La Castille, situé à quelques kilomètres de Hyères, "plusieurs signalements ont été faits au sujet des méthodes de formation qui interrogeaient" en son sein, "ainsi que sur des abus", a affirmé une source vaticane à l'AFP.

Depuis sa réouverture en 1983, plus de 150 prêtres ont été ordonnés dans ce lieu de formation, qui est l'un des plus gros pourvoyeurs de membres du clergé en France.

Son recteur, qui a changé récemment -le père Benoit Moradei- a rappelé, sur le site de son institution, "son souci de l'évangélisation et de l'accueil de la diversité des charismes" comme "son attachement à Rome".

"Audace évangélisatrice"

"L'audace évangélisatrice de Mgr Rey a un revers, celui d'accueillir des personnes qui au final peuvent s'avérer pas fiables", indique une source proche du dossier, qui rappelle que dans plusieurs communautés nouvelles, il y a eu parfois "des abus de pouvoir" et "besoin de réajuster la gouvernance".

"Il y a un débat, ou un désaccord entre Rome et le diocèse sur cette ligne-là, sur cette option pastorale", a-t-elle ajouté.

D'où la décision d'une "mission d'inspection, discrète, sur place", qui a abouti à une décision finale, très rare", selon la source vaticane.

"Nous accueillons cette demande (de Rome) à la fois dans la douleur et la confiance, conscients de l'épreuve qu'elle représente avant tout pour ceux qui s'apprêtaient à recevoir l'ordination", a indiqué Mgr Rey, qui a aussi précisé avoir eu un entretien avec le Cardinal Ouellet, préfet de la Congrégation pour les évêques, permettant "d'apporter des compléments utiles".

Dans le collimateur du Vatican

"C'est une suspension le temps d'éclaircir certains points sur l'accueil des communautés dans le diocèse et sur l'accueil des vocations", a expliqué vendredi une porte-parole du diocèse, qui précise que ces échanges portent sur un ensemble d'éléments et non sur un fait en particulier.

Quelle suite attendre du Vatican? "J'imagine qu'il y a une volonté de donner à Rome les gages de prudence qui permettront d'avoir une confiance retrouvée", veut croire un membre du clergé.

Cette institution n'est pas la seule dans le collimateur du Vatican: selon le quotidien Libération, la très conservatrice communauté Saint-Martin à Evron (Mayenne), est sous le coup d'une visite décidée par Rome qui devrait commencer prochainement et porter entre autres sur sa gouvernance et la formation de ses séminaristes.

H.D. avec AFP