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+300% pour les pommes de terre: c'est quoi le "Bortsch Index", cet indice qui montre à quel point la guerre en Ukraine et les sanctions mettent en difficulté l'économie russe?

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Avec l'envolée des prix des légumes et de la viande, un tiers du revenu des Russes part désormais dans la nourriture. Le prix des pommes de terre a augmenté de 300% sur un an, la Russie est obligée d'en importer.

La Banque centrale russe a tranché vendredi 12 septembre: elle a abaissé son taux directeur de 18% à 17%. Malgré cette baisse, forcée par la dégradation de l'économie russe, les taux restent tout de même très élevé pour tenter de juguler une forte inflation, à plus de 8% sur un an.

Mais les chiffres sont bien plus alarmants sur l’alimentaire. Alors que Vladimir Poutine continue de pilonner le front ukrainien, la quotidien des Russes, lui, est de plus en plus compliqué. C'est le constat du "Bortsch Index", un indice qui suit l’evolution des produits de ce plat populaire.

Selon les données du gouvernement, relayées par le quotidien économique russe Kommersant, en mai, sur un an, le prix des ingrédients du bortsch, plat préparé dans toutes les familles russes, s'envole: +87% pour les oignons, +56% pour le chou, +12% pour les betteraves. Seules les tomates connaissent une inflation contenue, à +1,2%.

+300% pour les pommes de terre

Mais c'est la pomme de terre qui inquiète le plus. Chaque année, les Russes consomment 131 kg de pomme de terre par habitant. Or, le prix de la pomme de terre a explosé de près de 300% en un an. La pomme de terre russe est désormais trois fois plus chère que la moyenne mondiale.

La faute aux coûts de production qui ont fortement augmenté, notamment à cause des prix du gaz et de l'électricité. Mais pas uniquement. Il y a aussi la guerre en Ukraine. L’oblast de Briank, première région productrice de pommes de terres de la Russie, se trouve à la frontière ukrainienne. Là-bas, la culture des champs est devenu difficile.

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Autre explication: le secteur agricole Russe doit faire face à une pénurie de main d’oeuvre. Les travailleurs immigrés sont plus attirés vers l’industrie où ils sont mieux payés.

Résultat, la Russie a dû importer 548.000 tonnes de pommes de terre d'Égypte l’année dernière, signe qu’elle n’est plus autosuffisante. Et surtout une brèche dans sa doctrine de souveraineté alimentaire.

Un tiers du revenu des Russes part dans la nourriture

Les légumes ne sont pas les seuls à voir leur prix flamber. C'est aussi le cas du porc: +22% en un an pour la poitrine, +21% pour l'épaule, +19% pour le jambon… Au total, le prix de gros moyen de la carcasse de porc a flambé de 30% en un an.

Une envolée soutenue par l'inflation générale forte en Russie, mais aussi par des coûts plus élevés de main d’oeuvre, d’électricité, de transports… Avec en toile de fond les prix du gaz et de l’électricité en Russie qui alourdissent le coût de production des élevages porcins.

Certes, les prix de la plupart des matières agricoles ont un peu baissé en août, mais uniquement par effet de saisonnalité: c'est le plus gros mois de récolte en Russie, permettant de relâcher la pression sur les prix. Mais la tendance longue reste sur une très forte inflation.

Et tout ça commence à coûter cher à la population. Selon le cabinet Romir, qui collecte et analyse les tickets de caisse pour faire un suivi mensuel des postes budgétaires des ménages, plus d’un tiers du revenu des Russes part dans la nourriture. Guerre en Ukraine, sanctions occidentales, chocs énergétiques… Le jusqu'au-boutisme guerrier de Vladimir Poutine fait mal dans l'assiette des classes populaires.

Mathieu Jolivet