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Retard de livraison du TGV M: cet été, la SNCF devra encore faire plus avec le même nombre de trains

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Si la livraison des nouveaux TGV est toujours prévue pour le second semestre de cette année, SNCF Voyageurs misait sur quelques rames cet été pour accompagner une demande toujours en hausse. Elles ne seront là que cet hiver. L'opérateur assure qu'il a des solutions.

Tous les feux sont au vert pour SNCF Voyageurs, la filiale du groupe SNCF qui chapeaute les TGV et les Intercités. "Notre chiffre d'affaires a augmenté de 20% en cinq ans avec une profitabilité solide qui nous permet d'investir", se félicite Christophe Fanichet, PDG de la filiale.

L'engouement pour le train ne se dément pas et le bond de la fréquentation se maintient depuis la fin de la crise sanitaire: "ce n'est pas un effet de mode", assure-t-on.

Pas moins de 126 millions de personnes ont pris un TGV l'an passé, soit +"3,8% sur un an et +11% depuis 2019. C'est +35% pour les Intercités sur la même période et +33% pour les TER.

"On a transformé le rebond post covid en croissance durable", souligne Tanguy Cotte-Martinon, Secrétaire général de SNCF Voyageurs.

126 millions de clients TGV en 2024, 11% de plus en cinq ans

On pourrait parler de situation idéale, mais cette surchauffe dépasse les capacités de l'opérateur, d'autant plus que les prochains pics de départs s'annoncent une nouvelle fois record. En clair, le manque de trains est un frein avec un parc de 376 TGV contre plus de 482 en 2012.

"Il ne faut pas oublier la situation de SNCF Voyageurs en 2014 avec moins de voyageurs, une activité dans le rouge qui nous a forcé à déprécier nos actifs, et à nous séparer de rames", rappelle Alain Krakovitch, directeur de TGV-Intercités.

Impossible à l'époque de sortir le carnet de chèques pour acheter des trains neufs. Sauf que cinq ans plus tard, SNCF Voyageurs observe un record de voyageurs qui, exceptée la période covid, sera à nouveau battu entre 2022 et 2024.

C'est en 2018 que la SNCF passe commande des fameux TGV M qui doivent accompagner cette croissance du trafic. Mais comme la plupart des industriels ferroviaires, Alstom a pris du retard. Et le train qui devait arriver en 2024 sera finalement sur les rails cette année.

Si Alstom et SNCF Voyageurs ont toujours évoqué "le second semestre 2025", l'opérateur espérait encore il y a peu avoir quelques TGV M dès cet été pour la ligne Sud-Est. Il n'en sera rien: le futur fleuron de la SNCF ne sera pas sur les rails avant cet hiver et les 115 rames arriveront progressivement jusqu'en 2033.

TGV M: "il nous manque mais..."

"Il nous manque, on aurait aimé le voir arriver en 2024 pas fin 2025, il y a un impact, mais il faut le relativiser", reconnaît Alain Krakovitch qui s'empresse de souligner que "comparer le nombre de rames n'a pas de sens, ce n'est pas le seul facteur pour offrir plus de places".

Le responsable précise qu'en dehors du TGV M, la SNCF a anticipé. Ainsi, lors des maintenances à mi-vie des TGV, les aménagements intérieurs sont modifiés permettant d'avoir plus de places par rames: +10% depuis 2019, affirme la compagnie, soit 556 places contre 509.

"Il y a vingt ans, un TGV c'était 400 places en moyenne. Aujourd'hui, c'est plus de 500 places. On est passé de 72 milliards de places au kilomètre à 81 milliards", précise Alain Krakovitch.

Il y a également la montée en puissance de l'offre Ouigo avec des trains qui embarquent plus de passagers qu'un TGV Inoui et qui va bénéficier de nouvelles rames (50 au lieu de 38 mais seulement d'ici 2027). Ou encore l'opération Botox qui doit permettre d'allonger la vie de 104 TGV qui auraient dû être radiés. Mais tout cela prend du temps.

300.000 places en plus cet été et Inoui First

À court terme, il va falloir continuer à opérer à parc constant. Faute de nouveaux TGV cet été, SNCF Voyageurs va de nouveau appliquer ses méthodes d'optimisation pour absorber la demande. Il s'agit de faire rouler les TGV plus longtemps sur une journée, de les doubler, d'optimiser les circulations, de mieux les répartir en fonction de la demande...

Alain Krakovitch l'assure, "cet été, on offrira plus de places même sans TGV M" et de promettre "300.000 places supplémentaires cet été, essentiellement sur la façade Atlantique et 2 millions de places supplémentaires sur l'année".

Encore une fois, aucun TGV ne sera au garage cet été et il ne faudra pas qu'un grain de sable vienne perturber cet équilibre.

D'autant plus que Trenitalia prépare son lancement vers Marseille cette année après avoir lancé Paris-Lyon-Milan.

"On se prépare depuis longtemps", assure Alain Krakovitch. "On mise sur notre fréquence (14 allers-retours par jour contre deux a priori pour Trenitalia, NDLR), sur du matériel récent et sur le projet Inoui First".

Alors que Trenitalia joue beaucoup la carte de la qualité de service et du confort, SNCF Voyageurs entend monter en gamme. "On veut faire progresser le service face aux attentes des clients, en termes de confort, de services, de personnalisation et d'indemnisation. On sera les plus performants dans ce domaine", promet le dirigeant.

Alstom: des pénalités, mais aussi des commandes supplémentaires

Les retards de livraison du TGV M de la part de l'industriel donneront lieu à des pénalités "dans le cadre du contrat", précise Alain Krakovitch. Si le responsable ne donne pas de chiffre, il attend néanmoins d'Alstom que les rames livrées soient 100% opérationnelles dès leur réception.

Il s'agit notamment d'éviter les pannes assez classiques pouvant frapper du matériel neuf, à l'image des tout nouveaux TGV de Talgo en Espagne qui multiplient les problèmes au grand dam de la Renfe et du gouvernement.

Preuve néanmoins de la confiance entre la SNCF et Alstom, la compagnie ferroviaire va étendre sa commande de TGV M. "On ira au-delà des 115 rames, notamment pour Eurostar et des annonces vont suivre", annonce le patron de TGV-Intercités.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business