"Est-ce que cela va se produire? Oui": le ministre allemand de la défense n'écarte pas une confrontation directe avec Moscou (et veut fabriquer plus d'armes)

Boris Pistorius, ministre de la Défense allemand. - BRITTA PEDERSEN / POOL / AFP
Boris Pistorius n'a pas sa langue dans sa poche, mais il assure sa place, en ayant conservé son poste au changement de gouvernement entre Olaf Scholz et Friedrich Merz.
Alors que l'Allemagne se réarme à vitesse grand V, une phrase du ministre dans une interview au Financial Times évoque la préparation de la Bundeswehr à un conflit ouvert.
Interrogé par le quotidien sur l'éventualité de tuer des soldats russes en cas d'attaque de Moscou contre un État membre de l'OTAN, Boris Pistorius ne louvoie pas.
"Je vous recommande simplement d'aller à Vilnius et de parler aux représentants de la brigade allemande sur place. Ils savent parfaitement en quoi consiste leur mission."
Mais c'est surtout l'industrie allemande de l'armement qui est attendue au tournant.
"Il n'y a plus de raison de se plaindre", a-t-il fait savoir. "L'industrie sait parfaitement qu'il lui incombe désormais d'obtenir des résultats."
Les priorités portent notamment sur les drones, les chars et les munitions.
L'ambition allemande est de porter l'effort de défense à 162 milliards d'euros par an à l'horizon 2029 – soit une augmentation de 70% par rapport à cette année, précise le Financial Times.
"L'armée la plus puissante d'Europe"
Cette hausse du budget, dans la droite ligne des objectifs fixés au sommet de l'Otan fin juin, doit permettre aux industriels du secteur de respecter leur part du marché et de pallier les retards relevés dans certains programmes.
"Malheureusement, nous subissons encore des retards dans certains programmes, où tout semble réglé, mais nous constatons également des retards côté industriels – pour lesquels je dois rendre des comptes", a expliqué Boris Pistorius.
Le ministre a indiqué que le ministère était en train d'étudier des plans d'acquisition dans le domaine des chars, des sous-marins, des drones et des avions de combat, conformément aux objectifs du chancelier allemand Friedrich Merz de faire de l'Allemagne "l'armée conventionnelle la plus puissante d'Europe".
Faciliter les acquisitions
Début juin, la présidente de l'Office fédéral des achats militaires Annette Lehnigk-Emden avait déclaré au quotidien allemand Tagesspiegel que l'armée disposait de trois ans pour se doter des matériels nécessaires pour se défendre face à une éventuelle attaque de la part de la Russie.
Une ambition qui passe notamment par des procédures d'achat allégées, mais également des contrats à long termes assortis "d'obligations d'achat annuelles régulières", voire des paiements anticipés, explique le Financial Times, ceci afin de permettre aux industries d'investir sur le long terme dans les capacités de production.
"Nous devons être plus rapides. Nous devons être plus efficaces. Nous devons nous débarrasser des règles en matière d'approvisionnement et de planification", a martelé Boris Pistorius.
En contrepartie, l'industrie allemande doit donc s'engager à produire et livrer les commandes en temps et en heure.
L'industrie allemande en plein boom
Du côté des industriels, les ambitions politiques se traduisent bien en chiffres d'affaires: le conglomérat Rheinmetall a multiplié son action par 12 depuis le début de la guerre en Ukraine, la part de la division militaire de MTU Aero Engines est en augmentation, 27% du chiffres d'affaires de Renk est généré par des ventes à l'Allemagne.
L'industrie allemande de la défense se développe également par le biais de partenariats conclus avec des entreprises étrangères. Ainsi, Rheinmetall a annoncé des coopérations avec le géant américain Lockheed Martin mais aussi avec la startup américaine Anduril ou l'entreprise finlandaise Iceye, que ce soit pour co-produire des missiles, des roquettes, des satellites, des munitions ou encore des drones.