Déficit commercial abyssal, Ukraine, terres rares: en visite en Chine, l'UE attend des "progrès concrets" de Xi Jinping

Pas de répit pour l'Union européenne. Alors que les négociations sur les droits de douane avec les États-Unis sont entrées dans une phase critique, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a atterri en Chine pour une rencontre très épineuse avec Xi Jinping.
Officiellement, ce sommet de Pékin est censé célébrer le 50e anniversaire des relations diplomatiques. Officieusement, les Européens arrivent avec une longue liste de contentieux sur lesquels ils espèrent avancer malgré un climat de plus en plus tendu avec la Chine.
"À mesure que notre coopération s'est approfondie, les déséquilibres se sont aussi accentués. Nous sommes arrivés à un moment charnière. Il est essentiel de rééquilibrer nos relations bilatérales", a déclaré la présidente de la Commission après son arrivée.
"Nous avons besoin de progrès concrets sur les questions liées au commerce et à l'économie, et nous voulons tous les deux que notre relation soit (...) mutuellement bénéfique", a ajouté Antonio Costa, le président du Conseil européen, qui accompagne Ursula von der Leyen à Pékin.
Déficit commercial abyssal
En tête des préoccupations: l'important déséquilibre commercial qui tourne en défaveur de l'Europe (contrairement à la relation avec les États-Unis où l'UE dégage un excédent sur les biens).
Le déficit commercial avec Pékin a atteint l'an dernier le niveau abyssal de 357 milliards de dollars (304 milliards d'euros), ce qui fait courir des risques majeurs pour l'industrie européenne.
"Au cours des cinq premiers mois de l'année, les exportations allemandes vers la Chine se sont effondrées, tandis que les importations en provenance de la République populaire ont augmenté de manière disproportionnée", relève une récente note du German Economic Institute (IW).
"La Chine exporte vers l'Europe sa déflation des prix et ses surcapacités" de production, jugent ses auteurs.
Mais les discussions partent mal. En réponse à un appel européen de "rééquilibrage" des échanges économiques, Pékin avait déjà appelé Bruxelles à tout d'abord rééquilibrer son "état d'esprit" vis-à-vis de la Chine.
""Plus la situation internationale est grave et complexe, plus la Chine et l'UE doivent intensifier la communication, renforcer la confiance mutuelle et approfondir la coopération", a pourtant assuré Xi Jinping à Ursula von der Leyen.
Conflit en Ukraine et terres rares
L'un des objectifs sera également de tenter d'obtenir la levée ou l'assouplissement des mesures de rétorsions prises par la Chine après l'augmentation des droits de douane européens sur les voitures électriques. Pékin a notamment ciblé le cognac, le lait et le porc.
Ursula von der Leyen a aussi assuré que Bruxelles demanderait à Pékin d'ouvrir davantage son marché aux entreprises européennes et d'assouplir ses restrictions à l'exportation de terres rares -stratégiques pour les technologies modernes.
La guerre en Ukraine devrait également être discutée. Les Européens voient avec méfiance le rapprochement économique et politique Chine-Russie depuis l'invasion de 2022. L'UE estime qu'il constitue un soutien implicite à Moscou.
La semaine dernière, l'UE a adopté de nouvelles sanctions contre la Russie -ciblant notamment deux banques chinoises. Cette mesure a poussé le ministre chinois du Commerce à protester auprès de son homologue européen.
L'Ukraine "est une question centrale pour l'Europe", a souligné le haut responsable européen, qui accuse les entreprises chinoises de fournir à l'économie russe des biens à double usage - c'est-à-dire des produits civils pouvant servir à des fins militaires.
Des avancées sur le climat, domaine traditionnel de coopération, restent possibles.
"Ce sommet devrait être pour nous l'opportunité d'être très durs vis à vis de la Chine des 'néo-lénino-marxistes' qui ont pris le pouvoir en 2022, mais au contraire de se rapprocher des entrepreneurs privés avec lesquels on travaille depuis vingt ans", estime de son côté l'investisseur David Baverez, installé à Hong-Kong, sur l'antenne de BFM Business. "La Chine n'a jamais eu autant besoin de nous", a-t-il poursuivi.