JO 2030: après la chute du gouvernement, une inquiétude à degré variable parmi les élus des Alpes du Sud

Quelques semaines après sa prise de fonctions, Michel Barnier, alors Premier ministre, a signé une lettre d’engagement à destination de Thomas Bach, le président du Comité international olympique (CIO).
Avec 500 millions d'euros dans la balance, l'État français apportait une garantie financière à l'organisateur des Jeux d'hiver 2030. Le vote de la censure de son gouvernement, mercredi 4 décembre, entraîne maintenant un gel du budget 2025.
L'ex-locataire de Matignon était très engagé dans le projet des JO d’hiver dans les Alpes françaises, lui qui est né en Isère. Avec son départ, de nombreuses questions se posent sur la tenue des JO 2030 dans les Alpes françaises.
Muselier demande "le respect de la parole de l'État"
Chez nos confrères de La Provence, le président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, Renaud Muselier, appelle l’État "à respecter ses engagements". "J'ai la garantie du Premier ministre, mais la garantie de l'État passe par le vote du budget. Les JO de 2030 sont dans le budget, mais si le budget n'est pas voté...", souffle l'élu. Ce dernier ne "demande pas de promesses pour le futur", mais seulement le "respect de la parole de l'État.
Parmi les conséquences de la censure du gouvernement Barnier sur les JO 2030, deux points clefs: le retardement de la nomination du président du Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojop) et le lancement de la Solideo (Société de livraison des équipements olympiques), qui pourrait être perturbé.
Des conséquences qui pourraient ne pas plaire au CIO. Lors d’une conférence de presse auquel Le Dauphiné libéré a assisté, Christophe Duby, directeur des Jeux olympiques au CIO, s'est interrogé: "Si Michel Barnier ne peut même rester pour gérer les affaires courantes –les JO de 2030 feraient-ils d’ailleurs partie de ces affaires courantes?-, quelle sera la position d’un nouveau Premier ministre soucieux des finances de la France et moins enthousiasmé par les JO 2030 que ne l’est Michel Barnier?"
"C'est loin, mais c'est court"
"Le CIO nous soutient même si j’imagine que la France commence à les fatiguer. Il serait quand même souhaitable qu’on ait un budget avant Noël. Et pas que pour les JO", confie à BFM DICI une cheville ouvrière de l’organisation dans les Hautes-Alpes.
"C’est dans cinq ans. L’engagement pour ça, c’est aussi d'avoir des infrastructures et une dynamique de développement pour les Hautes-Alpes. On connait les délais pour avoir des projets. Comment arriver à pousser une dynamique alors qu’il faut 30 ans pour faire trois kilomètres de rocade à Gap? Comment arriver à pousser une dynamique finie dans cinq ans alors qu’elle n’a pas commencé car nous n’avons ni président, ni structure, ni budget. C’est loin, mais c’est court quand on connaît le délai des projets, même avec une loi d’exception", alerte une autre source départementale, proche de l’organisation.
Arnaud Murgia, maire de Briançon, et Chantal Eyméoud, maire d’Embrun, deux défenseurs du projet, ne souhaitent pour l'heure faire aucun commentaire au vu de la situation politique du pays et des incertitudes qu’elle engendre.
De son côté, Élisabeth Jacques, la présidente de la Communauté de communes d'Ubaye-Serre-Ponçon, n’a pas plus de commentaire à faire et fait confiance à Renaud Muselier: "Je suis dans la même temporalité que Renaud Muselier. C’est notre chef. Il nous dit de bouger, on bouge. Il nous dit de rester tranquille, on reste tranquille. Nous travaillons sur le terrain. Et le but, c’est d’avoir le meilleur retour possible pour notre territoire d’un événement international de cette qualité-là".
Les "NO JO" se réjouissent
Dans les Alpes-de-Haute-Provence encore, les deux parlementaires, qui ont voté la motion de censure pour faire tomber le gouvernement Barnier ne redoutent pas la suite des opérations.
"Je ne suis pas inquiet. Le président a assuré de son soutien et la France est caution de ces Jeux Olympiques. Tout est mis en place, donc…", réagit Christian Girard, député Rassemblement national (RN).
De son côté, la députée Union des droites pour la République, Sophie Vaginay-Ricourt, se demande si les Jeux en valent le coup. "Aujourd’hui, nous allons voir dans le budget où nous pouvons faire des économies pour éviter une augmentation des impôts. On va retravailler la loi de finances. Si dans le budget, il y a les JO, il va falloir discuter. Est-ce que c’est opportun aujourd’hui? Ce sont de grosses dépenses. Le président de la région Sud fait savoir dans la presse qu’il est inquiet sur le financement. Et il a raison", analyse l'ancienne maire de Barcelonnette.
Valérie Rossi, la députée Nouveau Front Populaire (NFP), fait confiance au Premier ministre démissionnaire: "Michel Barnier n’a pas dû s’engager à la légère. Il avait l’expérience d’Albertville. Je ne vois pas comment la parole de l’État pourrait être remise en doute avec un changement de premier ministre. Je pense que l’État a une parole et qu’elle sera tenue. Je n’ai aucune inquiétude pour ces JO 2030".
Une situation qui est loin de déplaire aux détracteurs de l'aventure olympique. "On est satisfaits. Ils ne sont pas sortis de l’auberge", se réjouit Stéphane Passeron, militant de "NO JO". Et l'intéressé de conclure: "C’est tellement tendu dans tous les sens, ils sont bloqués, on ne voit pas comment ils pourraient trouver une solution".