3000 km en 28 heures: le périple d'un Haut-Alpin pour venir en aide à ses proches coincés en Ukraine

Henri David s'est rendu jusqu'en Roumanie pour porter secours à ses proches. - BFM DICI
Sa décision a été prise en une fraction de seconde. L'invasion des troupes russes sur le sol ukrainien avait à peine débuté, il y a une semaine, quand Henri David, a sauté dans sa voiture, pris le volant au départ de Chorges et roulé en direction de la commune de Siret, à la frontière roumaine. Avec un objectif en tête: venir en aide à sa belle-famile. Le Haut-Alpin n'est revenu de son périple que ce vendredi après-midi.
"Le parcours a été extrêmement long depuis le 24", résume l'homme aux cheveux blancs ébouriffés et aux yeux rougis. Bras croisés et voix emplie d'émotion, il déroule le fil de son parcours au micro de BFM DICI.
Alors qu'Henri David avale ses premiers kilomètres au volant de sa voiture, sa belle-famille et les enfants pour fuir le déluge de bombes qui s'abat sur la capitale et prennent la route avec la frontière roumaine en ligne de mire.
"Comme vous avez pu le voir à la télé"
"Sur Kiev, ça a été extrêmement difficile, comme vous avez pu le voir à la télé. Il y avait vraiment des bouchons pas possibles, lui rapporte Tanya, une membre de sa famille. Ils ont mis énormément de temps pour arriver à la frontière, environ trois jours, alors que la distance n'est pas énorme. C'est 300 km à peu près."
Et le Haut-Alpin de reprendre: "De mon côté, c'était long aussi. J'ai eu à peu près 24 heures de route pour faire 2400 kilomètres pour arriver chez mes amis en Hongrie, puis encore quatre heures de route pour arriver à la frontière. Entre-temps, je m'étais organisé avec mes amis de Roumanie, qui eux sont dans un premier temps partis pour la frontière..."
Mais ces derniers se retrouvent embourbés dans les bouchons, également massifs du côté roumain. "Mes amis ont été obligés de faire demi-tour", relate-t-il.
Réveillé par un bombardement
"Je suis reparti le lendemain pour les récupérer. Nous avons passé une nuit sur place pour attendre (mes proches) parce que c'était extrêmement long. Les voitures passaient au compte-goutte."
Henri David et ses amis se résolvent à passer la nuit dans la voiture au poste-frontière. Aux environs de 3 heures du matin, il est réveillé par des bombardements survenus dans une ville ukrainienne à quelques kilomètres de là. "Au petit matin, se souvient le Haut-Alpin, nous avons vu des grandes colonnes de fumée noire qui venaient de cette ville."
Après une interminable attente, ses proches posent enfin le pied en Roumanie. "Ils ont été extrêmement bien accueillis", souligne l'intéressé. Lui-même avait pu se ravitailler grâce à la générosité d'un boulanger roumain, qui avait parcouru près de 200 km pour apporter une fournée de sandwichs.
"On ne survivra pas"
Henri David et ses proches sont désormais en sécurité, installés dans sa maison de Chorges, baignée de soleil. Mais sur le front, les nouvelles sont "très, très peu rassurantes", souffle-t-il. "On a l'exemple de Tanya, qui a appris que son magasin avait été bombardé. Heureusement qu'elle était avec nous. Elle aurait été prise sous le feu des tanks qui ont bombardé le village..."
Une sombre "nouvelle" vient de parvenir à Henri David: "Une de nos cousines, qui est à Tchernigov (Tchernihiv, en ukrainien) un des endroits les plus touchés, une des grandes villes qui se trouve entre la Biélorussie et Kiev, un lieu de passage pour les troupes russes, a appelé sa fille qui travaille en Tchéquie et a préparé la famille en disant: 'Préparez-vous, on ne survivra pas à ce bombardement'".
Le "ciel bleu" et les "belles choses" qui entourent désormais Henri David et ses proches dans les Hautes-Alpes ne font pas le poids face aux images qui rongent leurs pensées. "On apprécie la vie quand on a vu toutes ces horreurs", reconnaît-il néanmoins. Mais l'intéressé estime surtout que sa mission n'est pas encore accomplie: "Aujourd'hui, je n'ai qu'un but: venir en aide à mes amis et mes frères et sœurs qui sont là-bas".