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Pluie, vent, vagues, marée... Comment la météo a influencé la date du Débarquement en 1944

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Une courte et difficilement prévisible accalmie prévue pour le 6 juin 1944 a permis aux forces alliées de reporter de 24 heures la date du Débarquement et d'arriver sur les plages normandes dans des conditions acceptables et en surprenant le commandement allemand.

Comment, où, et surtout quand? Ce jeudi 6 juin marque l'anniversaire du Débarquement des forces alliées en Normandie. Et cette date n'a pas été choisie au hasard il y a 80 ans de cela: c'est la météo qui a tranché. En effet, une courte fenêtre météorologique s'est ouverte ce 6 juin 1944.

"Quelque part les Alliés ont été pressés de débarquer, ils ont vu cette fenêtre météorologique entre la dépression et l'anticyclone et ils en ont profité pour débarquer. S'ils avaient loupé le coche, ça aurait peut-être pu changer le tournant de la guerre", explique Xavier Popineau, documentaliste à Météo-France.

Le risque d'un report

Comme le rappelle l'institut météorologique, en raison des impératifs de la guerre et des premières estimations météo, le général Dwight D. Eisenhower, commandant en chef des forces alliées en Europe, fixe, le 17 mai, la date du Débarquement en Normandie au 5 juin 1944.

Durant les semaines qui précèdent cette date, la météo est très clémente. "Le temps du mois de mai 1944 en France est beau et ensoleillé car soumis aux hautes pressions", détaille auprès de Ouest-France Xavier Popineau.

À la fin du mois néanmoins, les conditions se dégradent et l'anticyclone qui protégeait l'Europe de l'Ouest jusqu'ici se désagrège. Des mauvaises précisions qui menacent la remise du plan au... 19 juin, un report extrêmement lointain tant l'opération est cruciale et secrète.

Poste de commandement météorologique

Les conditions optimales d'un débarquement sur les côtes normandes sont "une nuit de pleine lune et peu de nuages pour les bombardements préalables, un vent faible pour le parachutage des hommes, peu de vagues à la côte pour le débarquement des hommes et du matériel", détaille Météo-France.

En outre, pour bénéficier à la fois d'un effet de surprise et y voir suffisamment bien, l'opération doit être menée à l'aube. Autre condition: que la marée soit basse pour distinguer les mines et les obstacles déposés par les Allemands sur les plages normandes.

Les prévisions météorologiques sont donc cruciales pour le bon déroulé du débarquement. Au quartier général des forces armées installé près de Portsmouth, au sud de l'Angleterre, dans le manoir de Southwick House, un poste de commandement météorologique complet est mis sur pied.

Des prévisions très instables

À moins de deux jours de la date initiale prévue, le 3 juin 1944, "les conditions météorologiques prévues ne s'annoncent pas propices au débarquement: le vent doit se renforcer, jusqu'au passage du front froid, le 7 juin", raconte Météo-France.

"Le tableau est le pire et le plus indéchiffrable de tous ceux qui me sont passés sous les yeux cette année", écrit James Stagg, colonel dans l'aviation et chef météorologue au quartier général britannique, dans ses mémoires rapportées par Ouest-France.

Le lendemain matin, les prévisions ont changé. "James Martin Stagg signale que le front froid pourrait traverser la zone dès le lendemain matin, rendant impossible le débarquement", détaille Météo-France, ce qui pousse Dwight D. Eisenhower à retarder l'opération de 24 heures et d'arrêter les forces navales déjà en mouvement.

Selon les archives et les récits de l'époque, les trois équipes de prévisionnistes consultées ne parviennent pas à se mettre d'accord pour déterminer le temps qu'il fera ce jour-là, notamment car leurs méthodologies diffèrent. Les Américains sont ainsi plutôt optimistes et les Anglais pessimistes.

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Le soir du 4 juin, "avec l'annonce d’une amélioration à partir de l’après-midi du 5 juin, avant une nouvelle dégradation", le général Eisenhower confirme la date du 6 juin pour le Débarquement.

Effet de surprise

Les forces allemandes, qui prévoyaient un débarquement des Alliés en France, surveillent également de près le ciel. "Ils savaient que les conditions de marée et de Lune seraient favorables à partir du 5 juin, et ils avaient prévu du mauvais temps du 5 au 7 juin", raconte Météo-France.

Toutefois, "ils pensaient que les Alliés avaient besoin d'au moins 6 jours de beau temps pour lancer une telle opération".

Privés de moyens d’observation fiables dans l'Atlantique Nord, ils ne peuvent pas prévoir cette soudaine et courte accalmie. Ce mauvais temps, bien que donnant du fil à retordre au commandement allié et aux prévisionnistes, contribua au succès de l’opération.

Salomé Robles