BFM Lyon
Lyon

"Une vision d'horreur": une rescapée de l'incendie mortel de Vaulx-en-Velin témoigne

placeholder video
Dix jours après l'incendie mortel d'un immeuble à Vaulx-en-Velin, une rescapée s'est confiée au micro de BFM Lyon. Elle se trouvait au 4e étage avec ses quatre enfants et son mari lors du drame.

"Je souhaite que cet immeuble soit démoli, je prie très fort pour ça." La vie d’Anissa* a basculé dans la nuit du 15 au 16 décembre dernier à Vaulx-en-Velin. Ce soir-là, cette mère de famille, son mari et ses quatre enfants se trouvaient dans un appartement situé au 4e étage de l'immeuble qui a été ravagé par les flammes. Par miracle, sa famille s’en est sortie.

Elle a accepté de revenir sur l’ensemble des événements au micro de BFM Lyon.

"Les mots ne sont pas assez forts"

Emmitouflée dans sa doudoune, Anissa se remémore cette nuit d’horreur au cours de laquelle dix personnes, dont quatre enfants, sont mortes. Au domicile familial, "seuls les enfants ont été évacués par une échelle extérieure", explique-t-elle. "Les petits sont descendus courageusement tandis que mon mari, mon petit dernier et moi avons pris l’escalier intérieur." De cette descente en catastrophe, elle ne conserve qu’une "vision d’horreur".

"Les mots ne sont pas assez forts pour vous décrire ce que nous avons vu dans les escaliers", rapporte la mère de famille. "J’ai à l’esprit, encore, cette image d’un pompier qui arrive face à moi, il est vraiment épuisé. On sent qu’il a été éprouvé par les conditions dans lesquelles il a dû éteindre le feu."

Cette image ne la quitte pas. Pas plus que les visages de ses voisins partis trop tôt. "Je ne dors plus", souffle Anissa. "J’ai les visages de mes voisins disparus qui me hantent. Je les revois comme s’ils étaient devant moi."

Les jours passent difficilement du côté des rescapés. "Ça va faire plus d’une semaine que cet incendie a eu lieu et on garde encore les traumas de cet événement", rapporte-t-elle.

"Mes enfants ont été éprouvés"

Depuis l’incendie, la famille réside à l’internat du lycée Frédéric Faÿs de Villeurbanne. Une bulle de réconfort qu’Anissa peine à quitter. "J’ai mis du temps à sortir du lycée", souligne-t-elle. "J’avais l’impression de ne pas être en sécurité à l’extérieur, mais aujourd’hui, j’ai mis le pied dehors." Elle l'assure, "on va plutôt bien, je dirais qu’on s'accroche à tout point de vue. Physiquement, on est éprouvés."

Elle pense à ses enfants, témoins de l’inimaginable. "On essaye de les occuper, de faire des animations, de les consoler, d’occuper leur esprit à autre chose", raconte-t-elle. "Mais en dépit de cela, on sent qu’il y a un mal-être. C’est instinctif."

Elle le sait, "mes enfants ont été éprouvés et à ce sujet, je dis merci aux voisins et aux anciens copains d’école qui sont venus nous voir, qui nous ont apporté leur soutien, qui nous ont aidés."

Dans la tête de la rescapée, les sentiments s'entremêlent. "Je suis partagée entre deux sentiments, celui de la tristesse inconsolable et celui de la révolte, de la colère. C’est très difficile de concilier ces deux émotions", confie la mère de famille hantée par cette question: à qui la faute?

"Ce qui nous touche en plein cœur, ce sont les responsabilités. Les responsabilités, à qui elles incombent? Qui sont les mis en cause? Qui sont les responsables?", se questionne-t-elle. "Cette blessure ne sera pas refermée si les responsabilités de tous ne sont pas mises en lumière. J’espère qu’on ne nous oublie pas, que ceux qui ont disparu ne sont pas morts en vain."

Et d’ajouter: "Nous savons tous qu’il y avait des défaillances, des normes de sécurité qui n’étaient plus respectées. La sécurité et l’intervention des pompiers ont été rendues pénibles, j’en suis convaincue, par cette porte qui était soudée."

Elle affirme que la porte avait été soudée par l'administrateur judiciaire qui avait "soudé, verrouillé, condamné l’issue arrière", cultivant son obsession de "bloquer et coincer les jeunes".

Une enquête a été ouverte pour déterminer les causes de l’incendie. Les investigations se poursuivent, mais à ce stade, la piste criminelle n’est pas privilégiée. Alors que des habitants avaient fait état d'un squat installé dans le hall de l'immeuble, il n'est pas établi, à ce stade, que le sinistre soit d'origine criminelle. Une source proche du dossier avait indiqué à BFMTV qu'aucune trace de produit déclenchant ou toxique n'avait été retrouvée sur les lieux du drame.

"Les normes de sécurité n'étaient pas respectées"

"Le point de deal, c’est un facteur aggravant à mon sens", conclut Anissa. "Mais peut-être que l’enquête scientifique nous dira s’il faut écarter cette piste ou pas. Tout ce que je peux constater de manière factuelle, c’est que les normes de sécurité n’étaient pas respectées."

*Le prénom a été modifié.

Pauline Tugend avec Charlotte Lesage