Décines-Charpieu: parents et professeurs du groupe scolaire Al-Kindi se mobilisent après la perte des subventions

Al-Kindi n'a pas dit son dernier mot. Après la décision de la préfète de résilier les contrats entre le groupe scolaire privé musulman et l'État, l'établissement de Décines-Charpieu va déposer deux recours contre la région et la préfecture.
En l'état, à la rentrée prochaine, le groupe scolaire ne bénéficiera donc d'aucune subvention. La préfecture accuse Al-Kindi de manquement pédagogique et de porter des valeurs incompatibles avec celles de la République.
"Les enseignants sont experts dans leur matière"
En interne, enseignants et parents d'élèves se mobilisent pour sauver Al-Kindi, alors que 80% de ses classes fonctionnent grâce aux contrats avec l'État. Beaucoup estiment que la décision de l'État n'est pas justifiée.
"Les enseignants ici sont experts dans leur matière, ils ont leur master, leurs diplômes", clame Rachida Briza, professeur de physique-chimie. "Quand je fais mon cours, je suis le bulletin officiel et le programme de l'Éducation nationale."
Dans ses reproches, la préfecture soulève des problèmes de discrimination envers les filles dans le règlement intérieur, ou encore les propos d'un enseignant contraire aux valeurs de la République, et la présence de livres religieux radicaux au CDI.
"Ce serait dingue de penser que je fais de la physique-chimie islamiste dans mon cours", insiste Rachida Briza. "C'est vraiment loin de tous les fantasmes qu'on peut s'imaginer."
"On a toujours respecté les valeurs de la République"
De son côté, la direction a assuré avoir pris des mesures dès les premiers manquements soulevés par la préfecture et la publication du rapport d'inspection académique. "Concernant le règlement intérieur, on n'a plus la distinction fille/garçon, on a juste la mention 'élève'", assure le directeur adjoint Karim Chihi.
La préfecture avait également dénoncé les propos d'un des professeurs sur sa chaîne Youtube. "On s'est séparés de cet enseignant", répond le directeur adjoint d'Al-Kindi.
Enfin, concernant les livres présents au sein du CDI du groupe scolaire, "ils ont été retirés". "Mais je tiens à préciser que ce sont des livres que l'on retrouve à la Fnac ou par exemple à la bibliothèque de Lyon, à la Part Dieu", ajoute Karim Chihi.
Comme il y a plusieurs semaines, le groupe scolaire reste ouvert à la discussion et tente de répondre aux problématiques soulevées. "Nous ne sommes pas en rupture avec l'État", assure Karim Chihi.
"On a toujours respecté les valeurs de la République, cela va de soi. Nous aspirions à être sous contrat justement parce que nous respectons les valeurs de la République, nous ne sommes pas hors-sol, nous sommes français."
Et d'ajouter: "Nous avons mis des codes couleurs dans les règlements vestimentaires, noir et blanc, dans le but de préparer à la mise en place d'un uniforme, donc nous sommes même en phase avec ce qui a été fait par les demandes gouvernementales il y a deux ans."
Une cagnotte ouverte
En attendant, pour compenser la perte de subvention publique, une cagnotte en ligne a été lancée pour l'établissement. "C'est un projet qui est ce que devrait être l'école française laïque", estime Nicolas Thierry Jebali, un des parents d'élèves mobilisés pour la sauvegarde du groupe scolaire.
En colère, il dénonce, comme beaucoup d'autres, une décision politique, alors que Al-Kindi est l'un des mieux classés de France. En 2022, le lycée Al-Kindi était en tête du classement du magazine L'Étudiant des meilleurs lycées du Rhône. Ses derniers taux de réussite au bac étaient de 100%, de même pour le collège qui affiche carton plein pour les dernières épreuves du brevet.
"On nous pousse au séparatisme alors que le projet tel que moi je l'ai vu à Al-Kindi c'est l'inverse, c'est l'inclusion des communautés, c'est pousser les élèves de tous les milieux vers l'excellence", conclut le père de famille.
La cagnotte a d'ores et déjà permis de récolter 145.000 euros en cinq jours.