"La mer est dangereuse": à Calais, un hommage rendu au bébé mort dans la Manche

Un hommage aux victimes des naufrages dans la Manche le 19 octobre 2024 à Calais. - Bernard BARRON / AFP
"J'ai peur pour mon enfant" mais "qu'est-ce que je peux faire d'autre?", s'interroge un candidat à l'exil. De nationalité érythréenne, l'homme était présent à Calais ce samedi 19 octobre. Dans cette ville se tenait la commémoration en hommage au nourrisson mort dans une tentative de traversée clandestine de la Manche. Il était âgé de quatre mois seulement.
La mort de ce bébé, probablement kurde irakien, dans le naufrage d'une embarcation de fortune où il se trouvait jeudi avec ses parents et sa fratrie, n'empêchera pas l'exilé de tenter sa chance avec son bébé de deux ans.
"Pour moi, c'est difficile parce que j'ai un enfant avec moi", explique l'homme de 42 ans, qui ne souhaite pas donner son nom par peur de représailles dans son pays. Avec son bébé et sa femme, il a déjà tenté deux fois de traverser la Manche. "J'ai peur pour mon enfant", martèle-t-il, "la mer est dangereuse, mais je n'ai pas d'autre solution que d'essayer de traverser". Il pense au prochain départ, fataliste: "Qu'est-ce que je peux faire d'autre?"
"Nous avons tous des familles"
"Ici, nous avons tous des familles!", s'exclame un peu plus loin Thaeer, venu de Syrie, en désignant quatre comparses, dont les proches sont restés au pays. "Moi, j'ai deux enfants en Syrie, lui il a six enfants", égrène le trentenaire qui a déjà tenté plusieurs fois de rejoindre l'Angleterre, et se prépare à recommencer.
Sur le sol, une ligne a été ajoutée à la longue liste répertoriant les noms des centaines de morts à la frontière entre France et Royaume-Uni depuis la fin des années 1990: "4 mois, Kurde".

Macabre décompte
Pour les associations présentes, ce macabre décompte n'est pas près de s'arrêter. "L'augmentation du nombre de personnes par bateau, les départs plus vite et plus loin font qu'on a plus de morts à la frontière et c'est directement lié à la politique migratoire mise en place", indique Axel Gaudinat, coordinateur au sein de l'association Utopia 56 à Calais.
L'association appelle à des "accueillir dignement en France et de mettre en place des voies de passage sûres pour les personnes qui souhaitent demander l'asile en Angleterre".
L'année 2024 est la plus meurtrière depuis le début en 2018 du phénomène des small boats, ces embarcations de fortune utilisées pour tenter de rejoindre l'Angleterre, avec au moins 52 morts dans des naufrages et bousculades mortelles.