"Uber Files": que pèse Uber en France?

Grâce à 124.000 documents internes à Uber, datés de 2013 à 2017, The Guardian et de nombreux médias internationaux, dont Le Monde et Radio France, ont pu reconstituer les méthodes qui ont conduit le géant du VTC à s'imposer dans le monde.
Ces documents mettent en avant certaines méthodes employées pendant ces années d'expansion rapide, mais aussi de confrontation pour Uber, notamment à Paris face aux taxis. Justement, quel est le poids et l'histoire de Uber en France?
60 voitures en 2011
C'est en décembre 2011 que le géant américain annonce son lancement à Paris qui devient la première ville hors des États-Unis à accueillir le service. Un mois plus tard, Uber France est officiellement créé.
Très vite, une soixantaine de voitures de tourisme avec chauffeurs (VTC) haut de gamme sont enregistrées sur l'application Uber et circulent dans la capitale. Ces premiers VTC viennent alors se frotter aux 19.000 taxis parisiens qui vont multiplier les actions pour contrer cette arrivée.
Progressivement, Uber France étend sa toile sur le territoire: après Lyon en mars 2013 et Lille en juin 2014, l'entreprise lance en septembre 2014 son service à Bordeaux, Toulouse et Nice.
En juin 2013, Uber passe à la vitesse supérieure à Paris avec le lancement d'UberX, une version économique d'Uber avec des véhicules traditionnels et des tarifs moins élevés que la version "limousine". C'est ce service qui va assurer le succès d'Uber en France.
Polémiques et controverses
Fin 2014, Uber lance une solution à destination des entreprises (Uber for Business) puis UberPool à Paris, option qui permet de partager son trajet (et le prix de la course) avec un autre utilisateur situé près de soi et voyageant dans la même direction.
La même année, UberPOP, un service de mise en relation entre passagers et conducteurs particuliers est lancé mais Uber est contraint de suspendre cette activité en juillet 2015.
Cette année là, l'application d'Uber est utilisée par 500.000 personnes, ce qui en fait son deuxième marché mondial. En 2015, son chiffre d'affaires en France se hisse à 20,4 millions d'euros.
2015, c'est aussi le moment où la justice française commence à s'intéresser à Uber, l'entreprise américaine fait alors l'objet d'une enquête pour travail dissimulé. Mise en sommeil, cette enquête est réactivée en 2020 à la faveur d'un signalement à la justice de l'Urssaf. Cette enquête est toujours en cours.
Nombreuses procédures judiciaires
Le statut d'indépendant des chauffeurs Uber est au coeur de nombreuses procédures judiciaires dans le monde. Le 10 janvier 2019, la cour d'appel de Paris a ainsi estimé qu'un plaignant était lié à Uber par un "contrat de travail", ouvrant la voie à une requalification en masse, une décision qui fait l'objet d'un pourvoi en cassation.
Reste que selon un sondage commandé par Uber, 80% de ses chauffeurs souhaitent rester indépendants contre 18% qui préféreraient devenir salariés.
En 2018, Uber France comptait environ 25.000 chauffeurs inscrits sur sa plateforme avec une moyenne d'âge de 39 ans. Elle a généré 76,5 millions d’euros de chiffre d’affaires pour l’exercice 2020 (avec 30.000 chauffeurs).
En 10 ans en France, 350 millions de trajets
Combien gagne un conducteur Uber? Basé "sur des données réelles" tirées de l'application, le chiffre d'affaires médian horaire s'élevait en 2019 à 24,81 euros. Ce n'est évidemment pas la somme qui va dans la poche du chauffeur. Son revenu horaire net après versement de la commission due à la plateforme (25%), frais de service, TVA et cotisations sociales, s'affiche à 9,15 euros.
Soit un revenu net mensuel de 1617 euros, selon Uber. Ce revenu est calculé sur l'hypothèse de 45,3 heures de connexion hebdomadaire à l'application, ce qui est, souligne Uber, le "temps de travail des non-salariés".
Le profil type conduit une Peugeot 508 - véhicule le plus utilisé sur Uber - il est un peu plus d'une fois sur trois (37%) titulaire d'un bac +2 et plus. 89% des conducteurs choisissent Uber pour l'"indépendance" offerte, 81% pour être leur "propre patron".
En 2021, pour ses 10 ans en France, Uber disait avoir assuré 350 millions de trajets (avec un record le 31 décembre 2019 avec plus de 301.000 courses) et disait compter 5 millions de clients dans l'Hexagone.
Selon un sondage, les deux-tiers des passagers utilisent l'application fréquemment: 46% plusieurs fois par mois et 20% plusieurs fois par semaine.