Alors qu'ils doivent circuler en France, les nouveaux trains à grande vitesse espagnols de Talgo s'apparentent à un accident industriel

Ils devaient représenter le renouveau pour la Renfe en Espagne. Mais les nouveaux trains à grande vitesse S106 Avril de Talgo vendus à la compagnie ferroviaire nationale s'apparentent désormais à un véritable accident industriel. En mai 2024, l'opérateur accueillait les dix premiers exemplaires de ce train dans le cadre d'une opération de renouvellement de flotte évaluée à 5 milliards d'euros. Des trains fabriqués par le constructeur local Talgo.
Très vite, les premiers problèmes apparaissent, des soucis qui vont au-delà des simples dysfonctionnements de jeunesse. Les incidents se comptent en centaines, de quoi faire chuter la ponctualité. Le plus grave a eu lieu l'été dernier quand près de 500 passagers ont été bloqués pendant des heures dans un tunnel à l’extérieur de Madrid. Autre problème majeur le 1er janvier de cette année, une panne informatique générale paralyse l'ensemble de la flotte pendant près de 24 heures en raison d'une erreur logicielle.

Déjà le gouvernement demande des comptes à l'industriel qui a par ailleurs été condamné à une indemnité de 116 millions d'euros pour un retard de livraison de deux ans.
Le ministre des Transports chez Siemens pour trouver une solution
Mais les derniers événements sont plus inquiétants. Fin juillet, lors d'un contrôle de routine, les agents de maintenance observent une fissure dans le châssis du bogie, cet élément essentiel qui inclut les roues, les suspensions, les freins. Par mesure de précaution (et parce que les pièces de remplacement manquent), les cinq rames de la ligne entre Madrid et Barcelone sont retirées même si la Renfe assure qu'il n'y a aucun risque pour les voyageurs. Car selon les premières observations, les causes de cette fissure seraient dues en partie à l'état de la voie entre les deux villes qui accélère l'usure du matériel roulant. Selon la presse spécialisée, cette anomalie n'a d'ailleurs pas été observée sur d'autres lignes exploitées par le S106.
Il n'empêche. Cette accumulation de problèmes provoque une crise ouverte entre le gouvernement espagnol et Talgo. Oscar Puente, le ministre des Transports, a ainsi répété que ce train à grande vitesse "n'a pas donné les meilleurs résultats possibles". Selon La Razon, le ministre a annoncé qu'il se rendrait cette semaine à l'usine Siemens en Allemagne afin de "tenter d'obtenir du matériel ferroviaire au plus vite" pour améliorer le service et compenser les problèmes récurrents du S106.
Une circulation prévue sur les lignes Lyon-Barcelone et Marseille-Madrid
En attendant, le S106 devient un cauchemar pour la Renfe tant en termes d'exploitation que d'image. Surtout que ce tout nouveau train a vocation à circuler en France à travers les deux lignes transfrontalières opérées: Lyon-Barcelone et Marseille-Madrid mais aussi sur les nouvelles lignes sur lesquelles l'opérateur veut concurrencer la SNCF. Le train est à nouveau en cours d'homologation en France alors que les tests ont été interrompus plusieurs mois. Mais les ambitions de la Renfe en France sont aujourd'hui floues, l'opérateur a en effet menacé de quitter le marché hexagonal en raison des "difficultés et des retards successifs rencontrés dans le déploiement de son offre de services à grande vitesse".
La Renfe dénonce ce qu'il présente comme des entraves pour intensifier sa conquête de la grande vitesse en France et pointe la SNCF qui dément ces accusations. Rappelons également que la compagnie française Le Train qui souhaite lancer en 2028 une liaison régionale à grande vitesse et à haute fréquence entre les métropoles du Grand Ouest a également choisi ce train commandé à dix exemplaires auprès de Talgo.
"Déjà homologué en Espagne, le Talgo Avril entre dans sa dernière phase d'homologation en France. Nous poursuivons avec Talgo, méthodiquement, l’industrialisation d’un service nouvelle génération", commente le PDG. En espérant certainement que ses trains à grande vitesse ne subissent pas les mêmes revers qu'en Espagne.