26, 28 ou 33°C… Y a-t-il une température critique au-delà de laquelle on ne peut plus (légalement) travailler ?

Le thermomètre peut-il monter à l'infini? La France fait face à une vague de chaleur depuis le 19 juin et dix jours plus tard, la canicule continue de s'intensifier. À partir de ce lundi 30 juin, 84 départements ont été placés en vigilance orange, plongeant presque tout le pays dans une chaleur étouffante au moins jusqu'en milieu de semaine prochaine, alors que l'été débute à peine.
Dans ce contexte, existe-t-il un seuil critique à partir duquel on ne peut plus travailler? Juridiquement, la réponse est non. Le code du travail ne prévoit pas de température à partir de laquelle le chômage technique serait automatiquement imposé.
Pour autant, le Code du travail oblige l'employeur à prendre "les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs" (article L 4121-1).
Du point de vue de la santé et de la sécurité, l'INRS (Institut national de recherche et de sécurité au travail) considère que les seuils suivants doivent constituer une alerte:
• au-delà de 28°C pour un travail physique
• au-delà de 30°C pour une activité sédentaire (de bureau par exemple)
• au-delà de 33°C, travailler peut constituer un véritable danger
"La température de l’air ne suffit pas à évaluer les risques"
"Toutefois, certaines situations de travail peuvent être dangereuses en dessous de 28°C ou maîtrisées au-delà de 30°C, la température de l’air ne suffisant pas à évaluer les risques liés aux ambiances thermiques chaudes", explique l'institut sur son site.
L'intensité de la chaleur est influencée par différents facteurs, listé par l'INRS:
• liés à l’environnement de travail (humidité, déplacements d’air, rayonnement solaire)
• aux caractéristiques de l’activité (tenue de travail, charge physique de travail)
• aux paramètres individuels influant sur les capacités de thermorégulation (acclimatation, antécédents, traitements…).
• à l'organisation du travail et aux moyens mis à disposition (pauses dans un endroit frais, accès à l’ombre, à l’eau…).
Il importe donc de prendre en compte ces différents paramètres dans l'évaluation du risque associé à la chaleur.
Par ailleurs, la norme NF X35-203/ISO 7730 défini des seuils relatifs au confort thermique. Elle prévoit entre 20 et 22°C dans les bureaux, entre 16 et 18°C dans les ateliers pour une activité physique moyenne, et entre 14 et 16°C dans les ateliers pour une activité physique soutenue.
Attention, il ne s'agit pas de bornes maximales mais de températures considérées comme confortables. Par ailleurs, la réglementation interdit aussi d'activer la climatisation si la température ne dépasse pas 26°C.
De nouvelles obligations en cas de vigilance jaune, orange ou rouge activées par Météo France
Si la loi ne prévoit pas de température maximale, elle s'appuie tout de même sur les niveaux d'alerte de Météo France. Un nouveau décret qui s'appliquera au 1er juillet prévoit même de nouvelles obligations en cas d'"épisode de chaleur intense" (soit le niveau de vigilance jaune, orange ou rouge défini par Météo France),
Lorsqu'un risque d'"atteinte à la santé et à la sécurité des travailleurs" est identifié, les employeurs doivent aménager les horaires et l'organisation du travail pour amortir les effets de la chaleur et du soleil.
Les entreprises doivent notamment prévoir des dispositifs occultants, d'aération ou de brumisation. Il doit également fournir des équipements adaptés (vêtements respirants, couvre-chefs, lunettes...).
Par ailleurs, depuis le 28 juin 2024, la canicule est reconnue comme un motif de chômage technique dans le secteur du BTP.
Maux de tête, vertiges, déshydratation ou coup de chaleur
Le salarié peut également faire valoir son droit de retrait s'il considère que l'épisode de chaleur "un danger grave et imminent pour sa vie ou pour sa santé". Mais il faut que le travailleur ait un "un motif raisonnable" de penser qu'il est dans une situation dangereuse. En cas de litige entre l'employé et l'employeur sur la légitimité de ce motif, il appartiendra au juge de trancher.
Les dangers pour la santé du travail sous la chaleur sont réels: fatigue, nausées, maux de tête, vertiges, crampes… Ils peuvent même précéder des troubles plus graves, voire mortels, comme la déshydratation ou le coup de chaleur.
Enfin, l'INRS rappelle que "la chaleur augmente par ailleurs les risques d’accidents car elle induit une baisse de la vigilance et une augmentation des temps de réaction".