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Brexit: comment la France s'est préparée au défi douanier

Le terminal des ferries à Calais

Le terminal des ferries à Calais - DENIS CHARLET / AFP

Anticipant des perturbations à la frontière entre la France et le Royaume-Uni au 1er janvier, les autorités ont adapté la procédure de contrôles douaniers pour fluidifier les échanges au maximum.

Accord ou non, le Brexit entraînera d’importantes modifications à partir du 1er janvier 2021, date de sortie définitive du Royaume-Uni de l’Union européenne. Les entreprises commerçant des deux côtés de la Manche seront en première ligne puisque directement affectées par le rétablissement d’une frontière physique. Laquelle marquera la fin de la libre circulation des biens, des services et des personnes.

Une révolution tant les liens entre la France et le Royaume-Uni sont étroits. Chaque année, environ 30 millions de voyageurs, 5 millions de camions et autant de véhicules légers traversent la Manche. Sur un plan purement commercial, 34 milliards d’euros de marchandises tricolores ont été exportés chez nos voisins britanniques l’an passé, soit 7% du total, tandis que 22 milliards d’euros de biens ont fait le chemin inverse.

Autant d’échanges auxquels contribuent quelque 150.000 entreprises françaises, selon les estimations du gouvernement qui les appelle à se préparer depuis de nombreux mois. Car le rétablissement de la frontière au 1er janvier signera surtout le retour de formalités douanières et de contrôles sanitaires et phytosanitaires susceptibles de perturber le transport de marchandises.

Recrutement et investissements

Afin de limiter les turbulences et éviter la congestion, les autorités ont pour principal objectif de fluidifier au maximum les échanges. Ce qui nécessite une organisation en amont. Le gouvernement a ainsi annoncé il y a déjà quelques mois le recrutement et la formation de 600 douaniers dont 270 ont déjà été affectés en renfort dans les Hauts-de-France, région la plus exposée compte tenu de ses ports et, bien entendu, du point d’entrée dans le tunnel sous la Manche situé à Calais. 100 douaniers supplémentaires seront également recrutés l’année prochaine.

Des dizaines de millions d’euros ont par ailleurs été investis à Calais pour renforcer les infrastructures (routes, parkings et bâtiments phytosanitaires pour procéder aux contrôles en particulier). Plusieurs exercices y ont été réalisés ces derniers mois pour tester le nouveau processus de contrôles à la frontière.

Enregistrement automatisé

Pour fluidifier les échanges, la France souhaite maintenir un régime de transit avec le Royaume-Uni. Sans transit, une déclaration de douane devrait être déposée à l’arrivée et à la sortie de chaque territoire douanier emprunté. De même, des droits et taxes devront être acquittés à chaque passage de frontière dans le cas d’un "no deal". Or, l’avantage de la procédure de transit est de permettre le report des formalités et du paiement des droits et taxes avant un dédouanement au plus proche de l’entreprise. De quoi gagner du temps à la frontière.

Un système de "frontière intelligente" baptisé SI Brexit a été mis en place pour renforcer cette procédure. Dans le cas d’importations vers la France par exemple, il permettra grâce à des déclarations anticipées regroupées sous un code-barres d’enregistrer de manière électronique la plaque d’immatriculation du camion et les documents douaniers à l’infrastructure de départ.

Durant sa traversée vers la France, le transporteur sera notifié de la voie à emprunter à son arrivée en fonction des déclarations de marchandises qu’il transporte. Si les formalités ont été correctement remplies et que le véhicule ne contient pas de produits sanitaires ou phytosanitaires, le conducteur pourra emprunter la "file verte" qui ne nécessite pas d’arrêt. Dans le cas inverse, il devra suivre la "file orange" pour des contrôles. Contrôles notamment assurés par des vétérinaires, recrutés par le ministère de l’Agriculture pour l’occasion.

Communication auprès des entreprises

Si les autorités disent s’être organisées pour fluidifier les passages de frontière à partir du 1er janvier, encore-faut-il qu’il en soit de même pour les entreprises concernées. C’est pourquoi Bercy assure avoir mis le paquet sur la communication auprès de ces dernières, qui sont "pour la plupart des PME qui n’ont pas forcément l’habitude de procéder à des formalités douanières".

La Direction générale des entreprises a par ailleurs lancé un guide d’autodiagnostic en ligne sous la forme d’un questionnaire spécial Brexit afin de recenser l’ensemble des points d’attention à prendre en compte (formalités douanières, fiscales, etc.) en fonction de ses réponses. En plus du site brexit.gouv.fr, un numéro vert a également été mis en place et quelque 160 réunions d’informations en région ont été organisées en régions depuis 2019 pour répondre aux questions liées aux échanges commerciaux post-Brexit.

A deux semaines de la date butoir, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a tenu à faire un dernier rappel dans une lettre publiée jeudi en invitant les entreprises concernées par le Brexit à "continuer à faire preuve d’anticipation afin de ne pas perdre en compétitivité et d’éviter les blocages dans (leur) chaîne logistique".

https://twitter.com/paul_louis_ Paul Louis Journaliste BFM Eco