BFM Business
Finances publiques

Budget: ce que contient la loi spéciale présentée en Conseil des ministres ce mercredi

placeholder video
En l'absence de PLF et de PLFSS pour 2025, cette loi spéciale est proposée par Bercy pour garantir "la continuité des services publics". Elle devra être abondée par le Parlement la semaine prochaine pour espérer entrer en vigueur avant le 31 décembre.

C’est une loi temporaire qui permet d’assurer la continuité de la vie nationale dans l’attente d’une loi de finances pour 2025. Prévu par l’article 45 de la loi organique relative aux lois de finances et par l’article 47 de la Constitution, le projet de loi a été prévu par un Emmanuel Macron suivant un calendrier au timing très serré.

Une première audition des ministres Antoine Armand et Laurent Saint-Martin aura lieu ce mercredi après-midi à l'Assemblée nationale et au Sénat. Puis le texte passera un examen en séance publique auprès des députés lundi 16 décembre et des sénateurs le mercredi suivant.

Une fois cette loi d’urgence publiée au Journal officiel, un décret relatif aux services votés sera pris pour ouvrir le minimum de crédits indispensables à la bonne exécution des services publics.

Le contenu du projet de loi

Le texte comporte 3 articles succincts pour permettre aux administrations publiques de lever l’impôt, à l’Etat de s’endetter et aux organismes de Sécurité sociale d’emprunter.

  • Article 1 : Autorisation de percevoir les impôts existants, sans possibilité d’intégrer de nouvelles mesures fiscales
  • Article 2 : Autorisation pour l’agence France Trésor d’émettre de la dette pour le financement des services publics. (sans montant fixé)
  • Article 3 : Autorisation pour quatre organismes de sécurité sociale de recourir à l’emprunt (sans montant) 

Ainsi, aucune nouvelle mesure fiscale n’est possible, ce qui exclut donc un nouveau barème de l’impôt sur le revenu. De la même manière, les subventions et les donations dépendent du régime des services votés et ne sont donc pas comprises par cette loi spéciale.

Investissements et recrutements suspendus

L'Agence France Trésor (AFT) est autorisée à recourir à l’emprunt jusqu’à l’entrée en vigueur d’une prochaine loi de finances pour 2025. Un montant indicatif de 300 milliards d’euros net des rachats est prévu pour les opérations d’emprunt à moyen et long terme débutant en janvier 2025.

Pour l'emprunt des Organismes Sociaux, aucun plafond précis n’a pour l’instant été défini mais le décret suivant la promulgation de cette loi spéciale pourra accorder des dépenses “avec l’objectif de couvrir uniquement ce qui est nécessaire à leur besoin de trésorerie”, précise Bercy. Ces dépenses “nécessaires à la continuité de la vie de la nation” seront donc examinées au cas par cas.

Parmi les Organismes Sociaux ciblés, on retrouve l’ACOS, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, la CNRACL, la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel ferroviaire et  la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines.

Plusieurs projets d'investissements et de recrutements en cours ne pourront pas être réalisés à l'image des 25,7 milliards d’euros en autorisation d’engagement et des 3,3 milliards d'euros en crédit de paiement pour les armées ou encore des 800 millions d’euros pour le ministère de l’Intérieur et des 350 millions d’euros pour la justice. Les 700 ETP (équivalents temps plein) supplémentaires pour l'Armée et les 1 500 emplois au ministère de la Justice sont aussi gelés en l'absence d'un PLF.

Les hausses d’effectifs prévues ne pourront donc pas être réalisées tant qu’un PLF n’est pas voté. Mais les recrutements nécessaires à la continuité des services publics pourront néanmoins se poursuivre. À savoir que le Conseil constitutionnel autorise dans certains cas une rétroactivité fiscale pour préserver des situations acquises ou pour des motifs d’intérêt général, mais cela reste à l’appréciation du Conseil.

Les mesures fiscales suspendues

Les crédits d’impôts qui arrivent à échéance ne peuvent pas non plus être prolongés en 2025, à l’image des CII et CIC pour les startups. La baisse progressive prévue de la Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ne sera en revanche pas interrompue.

Parmi le lot des mesures fiscales suspendues, celles accordées en soutien aux agriculteurs ou à la Nouvelle-Calédonie en font partie. Pour les collectivités, le prélèvement sur recettes (PSR) sera bien versé en début d’année mais pas les dotations de soutien à l’investissement local (DSIL) ou encore d’équipement des territoires ruraux (DETR). Le Fonds Vert ne peut toutefois pas être exécuté sans PLF: les collectivités recevront donc le paiement des subventions accordées en 2024 mais ne pourront pas en demander de nouvelles.

Comme prévu, il ne sera plus possible non plus d'utiliser les titres restaurants pour l'achat certains produits bruts dans les supermarchés à partir du 1er janvier 2025, a précise Bercy et les tarifs de l'électricité reviendront aux niveaux de pré-crise à 33,78 euros/MWh, avec une révision des tarifs réglementés d’électricité au 1er février 2025. Le bouclier tarifaire pour les installations électro-intensives ne sera pas non plus maintenu.

Pierre Berthoux