Dans le rouge ou excédentaire: quels sont les régimes de retraite qui couteront cher en 2030?

Syndicats et grévistes sont à nouveau dans la rue ce mardi pour une journée de protestation contre la réforme des retraites dont la principale mesure est le report de l’âge légal de départ de 62 à 64 ans.
Céder sur les 64 ans ce “serait renoncer au retour à l’équilibre” a déclaré le ministre du Travail, Olivier Dussopt. Tel quel, le système de retraite devrait, en effet, enregistrer des pertes de plus en plus importantes jusqu'à la fin de la décennie. Excédentaire en 2021, notamment grâce à la reprise de l’activité post-Covid, il est resté dans le vert en 2022, puis devrait entamer une plongée sous les zéros.
Mais les disparités sont grandes entre les situations financières des différents régimes. En l’absence de réforme, qui va plomber la balance des retraites en 2030 ? Et d'ailleurs, la réforme changerait-elle fondamentalement la donne ?
Les régimes qui s’enfonceront dans le rouge
13,5 milliards, c’est le déficit total qu’enregistrerait le système de retraite en 2030 si l’on en croit le rapport du gouvernement publié en janvier. Pour faire l’état des lieux du système pré-réforme, l’étude s’appuie sur les chiffres du Conseil d’Orientation des Retraites (COR), l'organisme qui fait référence dans le débat, et retient un ‘scénario central’ avec une croissance de la productivité de 1% et un chômage de long terme, qui semble optimiste, à 4.5%.
Parmi les gros contributeurs aux déficits prévus en 2030 se trouve la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) qui amasserait quelque 8,4 milliards d’euros de perte. Structurellement déficitaire, sa situation ne cesserait de se détériorer entre 2022 et 2030.
La caisse des fonctionnaires hospitaliers et territoriaux ne perçoit plus assez de cotisations pour couvrir les pensions qu'elle verse. En 2021, elle avait déjà posté 1,2 milliard de perte alors qu’elle comptait 1,5 million de retraités pour 2,2 millions de cotisants. Le nombre de ses pensionnés a augmenté de 40% en 10 ans et va continuer de croître. Du côté de ses cotisants, ils ont quasiment stagné sur la même période.
Les régimes de base alignés qui couvrent entre autres salariés du privé, artisans, commerçants et employés agricoles afficheraient aussi des résultats groupés largement négatifs à la fin de la décennie si le système de retraite reste inchangé. 10,2 milliards d’euros de déficit prévisionnel pour l’ensemble de ces régimes, minimum vieillesse inclus.
La bonne élève du système
“Les autres régimes de base et les régimes complémentaires pris dans leur ensemble seraient légèrement excédentaires,” selon le rapport.
Parmi ceux-là, la caisse complémentaire des salariés du privé tire son épingle du jeu fin 2030 du fait de la bonne tenue de ses comptes financiers. Ce régime obligatoire qui s’appelle l’Agirc-Arrco dégagerait un excédent de 2,6 milliards d’euros en 2030.
Géré par les syndicats et le patronat, ce régime qui verse une retraite à plus de 13 millions de personnes a déjà engrangé un surplus de plusieurs milliards en 2021 et 2022, et cette année ne devrait pas faire démentir ses bons résultats passés. L’Agirc-Arrco possède également des réserves financières qui se chiffrent en dizaines de milliards d’euros et qu’aucun autre régime de retraite ne peut se targuer d’égaler.
La réforme ne résorberait pas tous les déficits
Le gouvernement promeut sa réforme des retraites depuis plusieurs semaines affirmant qu’elle permettra un retour à l’équilibre du système en 2030. Outre le report de l’âge légal de départ à 64 ans, le texte inclut la hausse des pensions minimums et l’amélioration de l’emploi des seniors.
Certains régimes, réforme ou pas, resteront dans le rouge en 2030.
“Compte tenu de la grande variabilité des situations financières des régimes avant réforme, les mesures viennent dans certains cas amoindrir les besoins de financement de régimes qui restent toutefois déficitaires,” dit le rapport.
Cela ne suffirait donc pas à stopper la hausse prévue du déficit de la CNRACL mais cela résorberait tout de même celui des régimes alignés tandis que l’excédent de la caisse complémentaire des salariés du privé serait encore plus important, selon le rapport du gouvernement.
Les chiffres issus de l'étude, comme ceux du COR, sont à utiliser avec précaution, les prévisions à l’horizon 2030 contenant nécessairement une marge d’erreur du fait de l’incertitude de l’avenir. Ils permettent néanmoins de se faire un ordre d'idée: si l’Agirc-Arrco n’a pas de souci à se faire, le déficit du régime des fonctionnaires locaux et territoriaux devrait persister.