Budget 2024: vers une hausse des taxes sur l'alcool?

Le gouvernement songe à une augmentation des taxes sur l'alcool. La mesure n'a pas encore été détaillée, ni même officiellement confirmée, mais c'est l'une des pistes envisagées pour boucler le prochain budget de la Sécurité sociale. L'alcool, que l'on parle de vin, de bière ou de boissons plus fortes comme le rhum ou l'eau-de-vie, est soumis à des taxes dites "comportementales", dont l'objectif est d'influencer le consommateur pour le détourner de pratiques nocives pour sa santé, comme la surconsommation d'alcool. Et c'est de côté-là que regarde Bercy.
"La question est sur la table", a confirmé ce lundi matin le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, sur BFMTV-RMC. "Il y a aujourd'hui un mécanisme d'indexation. Je suis favorable, a minima, à ce qu'il soit maintenu, et après on verra si ce mécanisme est accéléré", a-t-il déclaré.
0,3 centime pour le vin
Des "droits d'accise" sont appliqués aux boissons alcoolisées (de même qu'au tabac et au pétrole). Plus concrètement, ces taxes s'élèvent aujourd'hui à 3,98 euros par hectolitre pour les vins tranquilles, c'est-à-dire environ 0,04 euro par litre. Elles montent à 7,82 euros/hectolitre pour la bière et à 9,85 euros/hectolitre pour le crémant et le champagne. Ce sont les alcools forts, dans les faits, qui sont les plus taxés, et de loin. Par exemple, il faut compter 917,72 euros/hectolitre d'alcool pur contenu dans le produit fini (9,2 euros/litre) pour les rhums français d'Outre-mer.
Les "droits d'accise" sont revalorisés chaque année en fonction de l'inflation. C'est le calcul de cette revalorisation annuelle qu'envisage de changer le gouvernement pour les indexer plus étroitement à l'inflation. Cette revalorisation est calculée à partir de la hausse des prix de l'année N-2 (2021 pour 2023, par exemple) et plafonnée à 1,75%. L'exécutif voudrait désormais la calculer à partir de l'année N-1 et supprimer le plafond. Selon Les Échos, ces taxes grimperaient d'environ 5% en 2024 si la mesure était appliquée – contre seulement 1,6% en 2023 malgré le contexte inflationniste.
Du côté du consommateur, si une telle mesure était appliquée, il faudrait rajouter 0,3 centime au moment d'acheter une bouteille de vin, une hausse finalement assez minime. Ce serait bien plus élevé du côté des alcools forts, de l'ordre d'1 à 2 euros, selon Les Échos.
Colère des viticulteurs
Le sujet est brûlant dans les régions viticoles, notamment dans le Bordelais et le Languedoc, qui ont rallié à leur cause les élus locaux. Les viticulteurs, même s'ils ne seraient pas les plus pénalisés par une hausse des droits d'accise, ont fait entendre leur voix dès qu'a été ébruité le projet du gouvernement au début de l'été. "Ce serait un très mauvais signal", a encore réagi ce lundi matin sur BFMTV Jérôme Despey, premier vice-président de la FNSEA en charge de la filière viticole, estimant que cette dernière était "déjà beaucoup taxée" en France.
"Taxer encore plus un secteur qui est en difficulté dans de nombreux bassins de production […], ça ne serait vraiment pas supportable", a estimé Jérôme Despey.
Même dans la majorité, l'idée suscite des remous et Bercy pourrait bien l'abandonner d'ici la présentation du projet de loi de finances 2024 pour la Sécurité sociale (PFLSS) à la rentrée. Les porteurs du projet, eux, vantent les bénéfices en matière de santé publique d'une hausse des taxes, notamment dans la lutte contre l'alcoolisme. Sur BFMTV, le médecin Bernard Basset, président d'Association Addictions France, a regretté lundi "une forme de censure de la santé publique", alors "que les dommages sont extrêmement importants", évoquant 40.000 morts par an.