Une "subvention illégale" de 2,9 millions d'euros? Le maire de Menton accusé de favoritisme et prise illégale d'intérêts

Bientôt un an qu'Yves Juhel occupe le mandat de maire de Menton dans une ambiance tumultueuse avec l'opposition.
L'ancienne candidate à la mairie et actuelle cheffe de file de l'opposition, Sandra Paire, a signalé au procureur de la République, "un présumé délit de favoritisme et une prise illégale d’intérêt dans le cadre de la gestion privée de trois jardins publics", rapporte Nice-Matin. Une information confirmée par BFM Nice Côte d'Azur ce dimanche.
Dans un courrier, elle explique que la commune a accordé, lors d'un conseil municipal, le 17 mai dernier, 2,9 millions d’euros à l'association pour la sauvegarde des jardins d’exception mentonnais (ASJEM), "pour que cette association exploite les jardins de la ville".
Elle indique également que l'association a mis à disposition cinq agents, des logements ainsi que "la villa Maria Séréna qui est l’un des plus beaux joyaux de notre ville".
La préfecture demande la résiliation de la convention
Cette dernière s'appuie sur un courrier de la direction des élections et de la légalité d'octobre dernier. En effet, la préfecture considère "que la délibération susvisée est illégale" et demande "de procéder à son retrait", ainsi qu'à la "résiliation de ladite convention".
La préfecture note plusieurs irrégularités dans le dossier. Tout d'abord, "le dispositif juridique contenu au sein du projet de convention, présenté comme l'octroi d'une subvention pluriannuelle au profit de ladite association, contient un certain nombre d'éléments tendants à la requalification de ce dernier en contrat de la commande publique". En d'autres termes, la préfecture indique ne pas avoir reçu de preuves de la demande de subventions de l'association.
De plus, les autorités jugent que le "contenu du projet de contrat tend à répondre à des besoins" de la commune, puisque les jardins sont la "propriété" de la ville.
Un conflit d'intérêts
Enfin, la préfecture remarque un conflit d’intérêts, puisque la deuxième adjointe Stéphanie Jacquot, a pris part au vote lors du conseil municipal du 17 mai. Or c'est également la fille du secrétaire général de l’ASJEM, François Jacquot.
Sandra Paire rajoute également que Francois Jacquot, "est accessoirement un membre fondateur de l’association des amis d’Yves Juhel créé pour la campagne électorale du maire".
Cette dernière juge que l'association "ne dispose d’aucun état de service ni de moyen prouvant qu’elle est en capacité de gérer les jardins d’exception de Menton".
Sandra Paire demande le remboursement des aides
La conseillère municipale demande publiquement "qu’Yves Juhel inscrive à la prochaine séance du conseil municipal le reversement à la ville des aides financières versées irrégulièrement à l’association".
Elle explique que le maire a refusé de le faire lors de la dernière séance du conseil municipal. L'élue dénonce l'attribution de ces aides "alors que pendant ce temps, la commune a augmenté les impôts des mentonnaises et des mentonnais qui eux, font face à la crise".
Le maire de Menton riposte
Dans une interview à Nice-Matin, Yves Juhel juge que les propos de son opposante sont "outranciers et inexacts". "Personne n’a pris de l’argent", assure-t-il.
"On a signé le 7 juin une convention avec l’association pour la Sauvegarde des jardins d’exception du Menton, présidée par Michael Likierman, à qui l’on doit, quand même, la restauration du jardin des Colombières et de la villa Eileen Gray. Il était prêt à mettre 3 millions d’euros, autant que la Ville, pour valoriser trois parcs. L’objectif était de récupérer, d’ici fin 2026, le label des jardins remarquables, que nous avions perdus il y a deux ans, et d’obtenir le label de jardins botaniques. Ce qui était intéressant économiquement", explique le maire à nos confrères.
L'élu reconnaît une "erreur". "On aurait dû passer par une délégation de service public. Le contrôle de légalité nous a signalé le cadrage à faire sans mettre en cause le projet", assure-t-il. "On a échangé avec la préfecture et on a réglé les problèmes qu’il y avait à régler."
Quant au conflit d’intérêts, Yves Juhel assure que ce n’était pas intentionnel. "Mme Paire devrait balayer devant sa porte. Une erreur a été faite par Stéphanie Jacquot, mais elle a été réparée. Son père a démissionné de l’association", assure-t-il.
Dans un communiqué publié sur le site de la mairie de Menton, le maire juge que "tout au long de la procédure, ni les élus, ni les services de l’Etat ont remis en cause le projet de réhabilitation des jardins d’exception de Menton et en regrettant que la Ville soit privée de 3 millions d’euros de mécénat."
L'élu explique que le 24 janvier dernier, en accord avec le président de l’ASJEM, il a écrit au préfet des Alpes-Maritimes "pour convenir d’une résiliation de la convention qui fera l’objet d’une délibération au prochain Conseil municipal extraordinaire".