Marseille: le procès de la "Brise de mer", un groupe de narcotrafiquants corse, s'est ouvert

Le procès fleuve des frères Guazzelli, fils d'un ex-baron de l'organisation mafieuse corse la "Brise de mer" assassiné en 2009, s'est ouvert lundi devant le tribunal correctionnel de Marseille où ils comparaissent avec 21 autres prévenus pour un trafic international de stupéfiants ou encore association de malfaiteurs.
Mais derrière ce dossier se profile une autre affaire: l'assassinat en décembre 2017 de deux figures du banditisme corse, Antoine Quilichini et Jean-Luc Codaccioni, à l'aéroport de Bastia, sur fond de vendetta. Sept des prévenus de ce dossier "stups", dont Christophe et Richard Guazzelli, 30 et 32 ans, sont renvoyés pour ces faits, avec huit autres personnes, devant une cour d'assises.
C'est l'analyse par des policiers de téléphones cryptés saisis lors de l'enquête "stups", avec la mise au jour de conversations accablantes et la revendication téléphonique du double assassinat, qui ont permis aux enquêteurs de résoudre rapidement ce dossier criminel et d'impliquer Christophe Guazzelli comme son cerveau présumé.
"Je lui avais promis de le venger"
"Je lui avais promis de le venger sur son lit de mort", expliquait ainsi Christophe Guazzelli à sa mère, après le double assassinat, sur une messagerie qu'il croyait inviolable.
Ces assassinats seraient en fait la vengeance des fils de Francis Guazzelli, un des fondateurs de la "Brise de mer", organisation qui a régné pendant plus de 25 ans sur le banditisme insulaire avant d'imploser dans une guerre fratricide. Vengeance tournée contre ceux qui avaient pris sa relève et leur chef présumé, Jean-Luc Germani.
Lundi, les deux jeunes hommes à l'allure sage ont pris place dans le box des accusés aux côtés de gros bras aux cheveux ras, chevilles ouvrières de leur organisation. Tous nient les faits.
À la barre, leurs avocats ont plaidé le renvoi du procès ou de la procédure à coup de nullités, ou encore la jonction de cette affaire avec le procès criminel à venir, arguant de la connexité des dossiers.
Un renseignement anonyme comme point de départ
Pour étayer cette demande, ils ont cité l'analyse des policiers selon lesquels le trafic de drogue aurait eu pour but de financer la vengeance des deux frères et leur cavale.
"On ne négocie pas avec de gros trafiquants marseillais pour financer une simple cavale", a balayé la procureure Isabelle Candau. Le président rendra sa décision sur ce point ce mardi matin.
Ce dossier de stupéfiants avait débuté en juillet 2014 par un renseignement anonyme rapportant l'existence d'un vaste trafic de drogue entre la région marseillaise et la Corse, trafic ayant à sa tête le fils d'une figure du grand banditisme corse assassiné prénommé "Christophe" et ayant comme lieutenant un autre "Christophe", identifié depuis comme Christophe Andréani, 34 ans, son ami d'enfance.
Les filatures se révélaient fructueuses: étaient ainsi dévoilées les relations de Christophe Guazzelli avec des membres de haut niveau du banditisme marseillais, comme le trafiquant international de cocaïne Eddy Boussaid, abattu en septembre 2016 à Marignane, ou encore son associé Hamza Djouhoud, tué en avril 2021.
Traces papillaires
Les enquêteurs constataient également "l'existence d'un lien fort, quasi-filial, de Christophe Guazzelli avec un autre malfaiteur bien connu du banditisme corso-marseillais, Jacques Mariani", fils de Francis, autre ex-parrain de la "Brise de mer", lui aussi tué en 2009.
En octobre 2017, lors d'une perquisition dans une résidence squattée à Saint-Florent (Haute-Corse), les enquêteurs mettent la main sur 62 kg de cannabis et relèvent des traces papillaires de Richard Guazzelli et l'ADN de Christophe Andreani. Quant à Christophe Guazzelli, la ligne "PGP" qui lui a été attribuée a borné dans la zone, ajoute l'accusation.
Le 12 décembre 2017, un vaste coup de filet aboutissait à la saisie de téléphones à la technologie ultra-sécurisés PGP, utilisant des mails cryptés. Ceux-ci allaient être percés et "révéler l'importance d'un trafic d'envergure internationale", écrit l'accusation, en évoquant les liens de la bande avec le Maroc et l'Espagne pour l'importation.
Les frères Guazzelli, qui nient les faits, ont été interpellés en Corse ce même 12 décembre 2017, sept jours à peine après le double assassinat de Bastia.
Le procès est prévu jusqu'à la fin du mois.