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Essais cliniques à l'IHU de Marseille: l'agence du médicament allège ses restrictions

L'Institut IHU Méditerranée Infection à Marseille, le 26 février 2020

L'Institut IHU Méditerranée Infection à Marseille, le 26 février 2020 - GERARD JULIEN © 2019 AFP

Sous la direction du professeur Didier Raoult, qui en a été démis l'an dernier, l'IHU de Marseille a été le cadre de multiples essais cliniques qui ne respectaient pas les règles éthiques en vigueur.

L'agence du médicament va alléger les restrictions imposées en matière d'essais cliniques à l'IHU de Marseille, autrefois dirigé par Didier Raoult, sans pour autant les lever intégralement vu l'attitude encore "insatisfaisante" de l'institut.

"Les recherches impliquant la personne humaine (RIPH) pourront reprendre mais sous certaines conditions", a déclaré l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) dans un communiqué, jugeant que l'IHU n'appliquait toujours pas de façon "totalement satisfaisante" la réglementation.

Sous la direction du professeur Didier Raoult, qui en a été démis l'an dernier, l'IHU de Marseille a été le cadre de multiples essais cliniques qui ne respectaient pas les règles éthiques en vigueur, par exemple sur le consentement des patients.

Si M. Raoult, désormais largement discrédité par ses pairs, a acquis une grande notoriété lors de la crise du Covid, notamment en défendant sans réel fondement l'intérêt thérapeutique de l'hydroxychloroquine, ces manquements remontent à bien avant la pandémie.

Mais c'est dans la foulée de cette crise sanitaire que l'ANSM a mené ces dernières années une enquête sur les pratiques de l'IHU. Ces investigations l'avaient notamment conduite à restreindre fin 2022 les conditions des essais cliniques à l'institut, menant celui-ci à suspendre tous les essais en vigueur.

L'ANSM avait notamment demandé un bilan intégral des recherches en cours, et de celles ayant donné lieu à des publications depuis cinq ans. Elle avait aussi exigé la mise en place en interne d'une formation à la réglementation des essais cliniques.

"La plus grande vigilance"

Désormais dirigé par le professeur Pierre-Edouard Fournier, longtemps proche de Didier Raoult, l'IHU --de concert avec son autorité de tutelle, les hôpitaux de Marseille (AP-HM)-- a mis en oeuvre les actions demandées, selon l'ANSM, qui lève donc ses "injonctions" en vigueur.

Mais l'Agence n'est pas entièrement satisfaite: elle juge, dans un rapport transmis parallèlement à son communiqué, que l'IHU ne semble "pas pleinement avoir pris la mesure des cadres réglementaires existant en termes de prise en charge des patients".

En cause, notamment, la mise en ligne au printemps d'une nouvelle étude sur les effets de l'hydroxychloroquine, cosignée par Didier Raoult. Le professeur a martelé qu'elle n'était qu'"observationnelle" et ne constituait donc pas un essai clinique, mais cette interprétation est sujette à caution.

L'ANSM, qui a antérieurement saisi la justice concernant cette étude, maintient donc des restrictions: elle impose désormais à l'IHU et l'AP-HM de transmettre un bilan trimestriel des projets d'essais cliniques, ainsi que des prescriptions de traitements hors autorisation de mise sur le marché (AMM).

Dans un communiqué commun, l'AP-HM et la Fondation Méditerranée Infection, qui administre l'IHU, se sont félicitées de la reprise annoncée des essais, promettant "la plus grande vigilance" sur le "strict respect des règles, et des principes d'éthique et d'intégrité".

L'AP-HM a aussi annoncé, entre autres, que son propre personnel devra valider toute étude future, avec une attention particulière notamment sur la "distinction" entre essais cliniques et études observationnelles.

L'AP-HM et la FMI se sont dites "confiantes dans le fait que ces errements appartiennent au passé".

A. La. avec AFP